Le Blosne, un quartier rennais "traumatisé" par une fusillade liée au trafic de drogue

Une fusillade à l'arme automatique, une dizaine de dealers impliqués, pendant plus d'une heure, à Rennes: de nombreux habitants du Blosne, traumatisés par cette nuit du 9 mars, regrettent que ce quartier longtemps apprécié...

La cité du Blosne, au sud de Rennes, le 19 mars 2024 © Damien MEYER
La cité du Blosne, au sud de Rennes, le 19 mars 2024 © Damien MEYER

Une fusillade à l'arme automatique, une dizaine de dealers impliqués, pendant plus d'une heure, à Rennes: de nombreux habitants du Blosne, traumatisés par cette nuit du 9 mars, regrettent que ce quartier longtemps apprécié soit rongé par le trafic de stupéfiants.

"S’il n’y avait pas le problème de la drogue, il n'y aurait rien à dire sur le quartier", relève Annie, qui ne veut pas donner son nom de famille comme les autres personnes interrogées. 

Cette retraitée de 67 ans apprécie la verdure de ce quartier composé de grands ensembles, où 200 millions d'argent public ont été investis, avec de nombreux équipements neufs, comme le Conservatoire. 

Non loin de l'arrêt de métro et de cerisiers en fleurs, les impacts de Kalachnikov au cours "de véritables scènes de guerre" la nuit du 9 mars, selon un communiqué du syndicat Alliance, étaient encore visibles sur les tours de la place du Banat.  

"On entend souvent des coups de feu, je croyais que c’était la police...On a l'impression qu'il ne peut rien arriver aux dealers", dit Annie au sujet de la nuit de la fusillade. Habitant à un rez-de-chaussée, elle a déjà subi la visite de "policiers qui ont fouillé sous le rebord (de son balcon) où il y avait de la drogue. Ils ont bien vu que ce n’était pas à nous", soupire-t-elle, désabusée.

Laurent, infirmier libéral, qui sort du hall d'une tour, vient de rendre visite "à une patiente traumatisée". 

Habitué à aller dans ce quartier du sud de Rennes, il doit parfois "passer en prenant la haie d’honneur formée par des dealers" pour se rendre chez ses patients. "Ça va finir que des gens vont vouloir partir, et être comme à Marseille avec des quartiers où l'on ne peut plus aller", lâche-t-il, amer.

Sarah, 30 ans, habite elle place de Serbie, où se trouve un important point de deal de Rennes, qui en compte une trentaine, selon le parquet. 

"Ce n’est pas possible d’élever des enfants dans un tel milieu, ils dealent devant les enfants", maugrée cette mère d'un garçon de quatre ans, qui paye 719 euros de loyer pour un T3. 

"C'est à peine si j’ouvre les volets, j’ai tellement peur... Quand ils crient, je ferme toutes mes portes et je me mets dans une pièce avec mon fils. Je veux quitter le quartier", assure-t-elle.

Mafias du narcotrafic

Selon Frédéric Gallet, du syndicat Alliance, au Blosne se joue "une guerre de conquête des points de deal". 

D'après le procureur de Rennes Philippe Astruc, "l'équipe qui tenait ce point de deal de revente s'est faite déloger en décembre". Deux groupes se disputent ce point de vente avec "une partie des acteurs qui viennent de la région parisienne".  

Nathalie Appéré, maire PS de Rennes, assure que "le Blosne n’est pas un territoire perdu: il est hors de question qu’un bout de territoire soit laissé à la main des dealers et confisqué, d'autant plus que ce quartier fait l’objet actuellement d’un grand programme de rénovation urbaine". 

"C'est le territoire le moins dense et le plus vert de Rennes, avec une qualité de vie qui est reconnue, des services publics très présents. C'est d’autant plus révoltant (...) que les efforts puissent être confisqués par les mafias du narcotrafic", ajoute l'élue. 

Dans une tribune au vitriol publiée au Figaro, Florian Bachelier, ancien député LREM d'Ille-et-Vilaine, dénonce lui "l'abandon du quartier du Blosne qui concentre la pauvreté d'une ville dont les loyers ont explosé et qui a progressivement recommunautarisé ses tours avec les nouveaux arrivants et où le trafic de stupéfiants permettait jusqu'alors d'acheter la paix sociale à bas prix".

Transportant son sac de courses, Pimeta, retraitée d'origine portugaise et arrivée en 1982, dit vivre désormais dans l'angoisse de la balle perdue. "On y a élevé nos enfants qui jouaient avec tout le monde et aujourd'hui nos enfants, qui sont partis d'ici, ont peur pour nous".

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