Hôtellerie - restauration

La Table à Victor cherche sa relève… comme tant d’autres restaurants

Restaurant traditionnel à vocation résolument humaine, La Table à Victor s’escrime à trouver du personnel. Un exemple local des grandes difficultés auxquelles sont confrontés beaucoup d’employeurs du département de la branche hôtellerie et restauration. Son gérant, Jean-Claude Breton, dépeint la situation. 

Anthony Charles, responsable d’une salle comptant 32 couverts.
Anthony Charles, responsable d’une salle comptant 32 couverts.

L’endroit est typique de ces restaurants de nos villes et villages où il fait bon faire une halte. Témoin d’un savoir-faire culinaire, d’un art de vivre à la française. La Table à Victor, à proximité de la gare ferroviaire de Toul, a fait son lifting ces dernières années, de la cuisine à la façade, à la salle, laquelle présente un joli cachet. Un écrin à l’ancienne, des miroirs peints en doré, des alcôves garnies de bouteilles, un portrait de Victor Hugo. Le boss, ici, c’est Jean-Claude Breton. Volubile, il n’a pas son pareil pour mitonner un plat dont il a le secret, distillé avec convivialité. L’homme baigne dans le milieu de la restauration depuis plus de quatre décennies, chef ici depuis 1980. Le lieu s’appelait autrefois La Belle Époque. Des évolutions dans son métier, il en a vu. Mais, il l’avoue, avec sa faconde coutumière : «Jamais les difficultés pour trouver du personnel n’ont été aussi importantes.» Même son de cloche chez nombre de ses collègues, ici en quête d’un serveur, là d’un cuisinier. Le baromètre des besoins en main-d’œuvre de Pôle emploi pour la Meurthe-et-Moselle est un bon indicateur. L’item «aides et apprentis de cuisine, employés polyvalents de la restauration» arrive en 4e position, avec 760 offres déposées, dont 7 sur 10 sont difficiles à pourvoir, voisinant avec les mêmes carences d’aides à domicile et ménagères, de professionnels de l’animation socioculturelle, d’agents d’entretien de locaux, d’aides-soignants.

L’effet pervers du Covid-19

«Cela, c’est la partie immergée de l’iceberg. Quand je dis que l’on ne trouve personne, c’est personne. Moi, j’ai tout essayé pour pallier la défection de deux de mes salariés, mon adjointe en cuisine et une plongeuse.» Forcément, un effectif normalement constitué de huit personnes pour faire tourner La Table à Victor, amputé ainsi, cela n’est pas sans conséquences pour l’activité. «Du coup, on ferme le dimanche et le lundi, on n’assure plus que cinq services.» Jean-Claude Breton pointe un responsable : «Le Covid-19. Les systèmes d’aides et de soutien ont eu un effet direct. On a payé les salariés à rester à la maison… et ils ne sont plus jamais revenus en salle. On vit dans un monde de loisirs, de consommation. Travailler les soirs, les week-ends, durant les «coups de feu», c’est beaucoup d’investissement, d’efforts. Sans doute trop pour beaucoup...» À 69 ans, Jean-Claude Breton ne désespère pas de trouver «simplement une personne qui veuille bien travailler, même si elle n’a pas forcément le profil de la restauration. Je la formerai, sur le tas, de toutes les façons, les diplômes ne remplacent pas l’apprentissage terrain.» À ses côtés, Anthony Charles, le responsable de salle, glisse : «Ce sont tout de même des métiers intéressants en lien direct avec le client. On partage de beaux moments et l’amour du travail bien fait.» Lui connaît bien la maison. Il fut l’apprenti, ici-même, de Jean-Claude Breton, avant d’en devenir son fidèle associé. La Table à Victor, une histoire de famille… et une cuisine qu’il faut absolument savourer.

L’imbroglio administratif de l’Hôtel de l’Europe

À deux pas de La Table à Victor, le gérant de l’Hôtel de l’Europe, établissement 3 étoiles, Hervé Simonin a aussi ses soucis de recrutement. «Pour trouver du personnel, c’est une galère. En début d’année, j’ai embauché une femme de ménage de nationalité marocaine. Arrivée d’Italie, elle a de l’expérience, est motivée, dispose d’un titre européen de long séjour… non valable pour travailler en France, mais dans d’autres pays, si. J’ai sollicité un autre document valable sur le sol français auprès des autorités compétentes depuis le mois de mai. Depuis, j’attends… Cela me laisse songeur quand on parle d’harmonisation européenne. Surtout que la femme de ménage est en règle, ses enfants sont scolarisés. Mon établissement a besoin de ce poste !»