La Côte en billard à trois bandes

Jean-Marc Puissesseau, président de la CCI Côte d’Opale et premier vice-président de la CCI régionale, a fait sa rentrée le 4 septembre dernier à Calais. Au programme, la création d’entreprise sur les territoires littoraux, un premier bilan touristique et les sempiternelles problématiques du transmanche.

Le transmanche occupe toujours les esprits.
Le transmanche occupe toujours les esprits.

 

Jean-Marc Puissesseau, président de la CCI Côte d’Opale, le 4 septembre dernier à Calais pour sa rentrée.

Jean-Marc Puissesseau, président de la CCI Côte d’Opale, le 4 septembre dernier à Calais pour sa rentrée.

La CCI Côte d’Opale a pris sa vitesse de croisière depuis sa fusion f in 2010. Recentrée sur ses missions premières de facilitatrice, l’institution joue la proximité pour pousser les chiffres des créations sur ses quatre pôles. Car les résultats ne sont pas encore au niveau des ambitions. “Notre objectif, c’est 500 créations d’entreprises par an pendant le mandat. Mais nous sommes dans une tendance nationale baissière” a expliqué Jean- Marc Puissesseau. Au premier semestre 2012, la France a enregistré une baisse des créations d’entreprises de 2,6%. De son côté, le Nord-Pas-de- Calais affiche une décrue de 1,6%. Plus bas sur l’échelle, la Côte d’Opale s’accroche avec -0,06%. Dans le détail, on observe que le Calaisis, le Boulonnais et le Dunkerquois sont à la baisse alors que le Montreuillois est en forte progression avec un gain de 8%. L’immobilier avec un recul des ventes et les services aux personnes avec la fin d’une progression continue depuis quelques années sont les secteurs qui ont le plus souffert. “Nous travaillons à l’amélioration de ces chiffres. Le salon Entreprendre a réuni plus de 400 personnes. Nous avons aussi mobilisé 1 500 étudiants parmi lesquels 147 porteurs de projet de création ont été détectés. Au final, nous accompagnons 37 projets”, a détaillé le président de la CCI. En 2011, 36 réunions relatives à la création/reprise/transmission ont été organisées dans les antennes territoriales. Une étude globale sur les créations doit sortir dans les prochaines semaines et doit permettre de définir les manques dans les quatre pôles du territoire consulaire. On considère qu’une création d’entreprise (TPE) engendre en moyenne 1,5 équivalent temps plein. Au 30 juin dernier, la CCI Côte d’Opale avait enregistré 2 285 entreprises, dont un tiers d’auto-entrepreneurs. Parmi les créateurs, trois ont ouvert un établissement hôtelier (à Hardelot, Wissant et Audinghen). Ils rejoignent presque 200 confrères “que je n’ai pas beaucoup entendu se plaindre” dixit Jean-Marc Puissesseau. Tirant un prébilan de la saison, il a annoncé la baisse de 5% de la fréquentation hôtelière en juillet, “avec des pointes à -15% pour certains. Le Montreuillois a particulièrement souffert”.

JO : retombées mitigées…Si la Côte d’Opale a vécu un mois de juillet pluvieux avec près de 20 jours de précipitations, le mois d’août, ensoleillé, a

Le transmanche occupe toujours les esprits.

Le transmanche occupe toujours les esprits.

permis de limiter les dégâts, notamment pour les campings. Mais l’été, ce fut aussi les JO de Londres qui ont attiré les visiteurs. Pourtant, une partie de la clientèle britannique a certainement été perdue, une partie de nos voisins d’outre-manche choisissant de rester chez eux. “Il n’y a pas eu de retombées des JO sur les restaurateurs et peu ailleurs. Il convient d’être prudent sur cette question” a confirmé Jean-Marc Puissesseau. Pour le Groupe Eurotunnel, les JO ont toutefois été une opportunité d’accroître encore ses parts de marché sur le transmanche au détriment des compagnies maritimes. La navette supplémentaire mise en circulation en juin dernier s’est révélé être un choix gagnant pour le transporteur, un nouveau record ayant été enregistré début août : plus de 75 000 véhicules sur un weekend. Eurotunnel affirme donc de plus en plus sa position sur l’ensemble de la Côte d’Opale avec le soutien à la compagnie coopérative MyFerryLink qui bénéficie des navires qu’Eurotunnel a acquis en juillet auprès du liquidateur judiciaire de SeaFrance. Et Eurotunnel dispose encore d’un navire fréteur (le Nord-Pas-de-Calais, issu de la flotte de SeaFrance) qu’il compte bien positionner sur le Calais-Douvres (ou à Boulogne-sur-Mer ?). Le président de la CCI s’est félicité de l’arrivée de la nouvelle compagnie : “Pour nous, le bon chiffre c’est trois compagnies sur le Calais-Douvres. Il faut repartir à l’assaut des parts de marché perdues depuis l’arrêt des navires de SeaFrance l’an dernier. On peut sans problème avoir dix bateaux avec des rotations variables.” Les recettes portuaires de la CCI ont, de fait, chuté de 20% avec la disparition de SeaFrance.

Eurotunnel. Le marché du fret frémit à la hausse depuis le début d’année (+3,4% sur les six premiers mois) et donne l’occasion à Jean-Marc Puissesseau de se rappeler au bon souvenir d’Eurotunnel : “Nos prévisions de croissance du fret que nous annoncions lors du débat public sur le projet Calais port 2015 se révèlent exactes contrairement à ce que d’autres disaient. Trois compagnies, ça justifie aussi Calais port 2015.” Dans une contribution écrite au débat relatif à ce projet à 500 millions d’euros, Eurotunnel avait en effet minoré la croissance potentielle du trafic fret et émis des réserves sur la taille du projet. Le train en concurrence du navire : les relations entre deux des acteurs majeurs de l’économie littorale sont mouvementées depuis le début. Les “portuaires” de la chambre n’avaient pas réservé un bon accueil au projet du tunnel sous la Manche dans les années quatre-vingt. En 2010, un rapprochement commençait : Eurotunnel voyait un de ses cadres entrer à l’assemblée consulaire pour la première fois depuis l’installation du tunnel sous la Manche. Depuis, le groupe ferroviaire gestionnaire du tunnel réinvestit la place, au point de postuler à la gestion des ports de Calais et Boulogne-sur-Mer suite à l’appel d’offres lancé par la Région (NDLR : nous en reparlerons dans nos prochaines éditions). Et de nombreux esprits consulaires de se questionner : que devient la Chambre sans les ports ? Eurotunnel reprend place aussi en tant qu’aménageur avec sa candidature à l’appel à projets de la plaine de loisirs de Sangatte (golf, complexe hôtelier, équipements dédiés aux loisirs…). “On aurait dû candidater sur ce projet ? Il paraît qu’il n’y a qu’un seul candidat” s’est faussement questionné Jean-Marc Puissesseau.
Bref, un jeu complexe dans l’attente des réponses à l’appel d’offres sur la gestion des ports de Calais et Boulogne-sur-Mer. Les candidats à la future concession portuaire devront remettre leur dossier en 2013 et remplir les conditions du cahier des charges régional. “Je rappelle que le concessionnaire doit s’engager à réaliser des travaux au port de Boulogne” a prévenu le président de la CCI. Selon la direction portuaire, l’investissement serait compris entre 20 et 30 millions d’euros. Après ceux de la Région pour la nouvelle passerelle, nul ne doute (surtout à Boulogne-sur-Mer) qu’il faudra bien une ligne supplémentaire dans le cadre d’une nouvelle carte maritime entre Calais et Boulogne-sur-Mer. Dunkerque reste en lice : la compagnie maritime (DFDS) s’est installée il y a six mois sur le Calais-Douvres et son port autonome discute avec Eurotunnel pour dégager du fret ferroviaire. Au détriment du transmanche maritime…