La comédie des masques

Emily Fons et Roberto Lorenzi lors des répétitions.
Emily Fons et Roberto Lorenzi lors des répétitions.
D.R.

Emily Fons et Roberto Lorenzi lors des répétitions.

En ouverture de saison, l’opéra de Lille présente du 4 au 17 octobre, l’un des opéras de jeunesse de Gioachino Rossini, La Cenerentola, dans une mise en scène de Jean Bellorini et dirigé par Antonello Almandi à la tête de l’orchestre de Picardie. Un “conte poétique” baigné par l’univers forain où devrait briller la jovialité d’une oeuvre enchantée.
Créé le 28 janvier 1817 au Teatro Valle de Rome, La Cenerentola est le dernier opéra-bouffe composé par Gioachino Rossini pour le public italien. Inspiré du Cendrillon de Charles Perrault, le livret de Jacopo Ferretti gomme les éléments surnaturels du conte, transforme certains personnages – la marâtre est devenue le méchant beau-père, la fée est désormais un philosophe –, mais modifie aussi l’épilogue du récit puisque Cendrillon, au moment de devenir reine, pardonne à son père et à ses deux soeurs de l’avoir traitée de façon si cruelle au fil du temps. Mais si quelques détails changent, l’enchantement demeure au long du vingtième opéra d’un compositeur de 25 ans où l’amour pur, la noblesse du coeur et la bonté triomphent des apparences, souvent trompeuses. Metteur en scène de théâtre désormais reconnu dans le paysage hexagonal – il a créé une adaptation des Frères Karamazov de Dostoïevski au dernier festival d’Avignon –, Jean Bellorini signe ici sa première “vraie” mise en scène d’opéra où il tente de retrouver le remarquable travail de troupe qu’il déploie sur le plateau de théâtre. Soutenant, avec quelque raison, que “le divertissement est salutaire en notre époque chaotique”, il souhaite créer “une fantaisie où le simple, le pauvre, le dépouillé, s’invitent au bal du rêve et du grandiose, et tutoient les étoiles.” Un univers pop et coloré, onirique et poétique, “au croisement de la magie du conte et du cinéma”, faisant référence ici à la comédie italienne des années 1960 et aux personnages hauts en couleurs des films de Dino Risi. Scénographe de ses spectacles, Jean Bellorini a donc imaginé un univers forain comme décor de l’intrigue, où tournent vélos et hélices, où se déploient passerelles et parapluies, en un mélange de nostalgie et de nécessité vitale du chant. Dans cette nouvelle production, la fraîcheur intemporelle de la partition est placée sous la baguette du maestro italien Antonello Allemandi– qui retrouve les musiciens de l’Orchestre de Picardie avec lesquels il a triomphé dans L’Élixir d’amour et Le Barbier de Séville– entouré d’une équipe de chanteurs relativement jeune avec, en particulier, la mezzo-soprano américaine Emily Fons qui interprètera le rôle-titre et le ténor américain Taylor Stayton dans celui du prince.

Patrick BEAUMONT