L'UE réplique aux subventions américaines pour une usine de batteries

Au nom d'un nouveau pragmatisme économique, l'UE a approuvé lundi une aide d'Etat pour sécuriser l'implantation en Allemagne d'une usine de batteries automobiles et répondre aux subventions vertes américaines...

La commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager et le ministre allemand de l'Économie Robert Habeck s'expriment lors d'un point de presse à Bruxelles le 8 janvier 2024 © Kenzo TRIBOUILLARD
La commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager et le ministre allemand de l'Économie Robert Habeck s'expriment lors d'un point de presse à Bruxelles le 8 janvier 2024 © Kenzo TRIBOUILLARD

Au nom d'un nouveau pragmatisme économique, l'UE a approuvé lundi une aide d'Etat pour sécuriser l'implantation en Allemagne d'une usine de batteries automobiles et répondre aux subventions vertes américaines qui risquaient de l'attirer aux Etats-Unis.

La Commission européenne a donné son feu vert à une aide du gouvernement allemand au projet du groupe suédois Northvolt, sous la forme d'une subvention de 700 millions d'euros assortie d'une garantie de 202 millions d'euros.

Il s'agit de "la première aide" autorisée par Bruxelles dans le cadre d'un mécanisme de l'UE créé en mars 2023 afin d'éviter le "détournement" de projets d'investissement européens vers les Etats-Unis, a expliqué la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager.

Northvolt avait annoncé en mai 2023 l'implantation de cette usine géante à Heide (nord), à une centaine de kilomètres de Hambourg, grâce à la promesse du soutien financier de Berlin et après plusieurs mois d'incertitudes, l'entreprise menaçant de déplacer son investissement aux Etats-Unis.

Electricité décarbonée

Cette usine, proche des côtes de la mer du Nord, bénéficiera d'un approvisionnement en électricité décarbonée issue de parcs éoliens géants. Le groupe suédois a par ailleurs annoncé en novembre avoir développé une nouvelle technologie de batteries sodium-ion, moins gourmande en métaux stratégiques, qui pourrait réduire la dépendance envers la Chine.

"Il est important d'être pragmatique", a souligné Mme Vestager, lors d'un point de presse commun à Bruxelles avec le ministre allemand de l'Economie, Robert Habeck. "Nous aurions pu ne rien faire, mais nous savons, grâce à des documents internes de Northvolt, que l'investissement aurait alors eu lieu aux Etats-Unis" grâce à une subvention américaine, a-t-elle affirmé.

Bruxelles a préféré permettre à l'Allemagne "de verser une aide équivalente pour que l'investissement ait lieu ici", a-t-elle expliqué. Cette aide incite, selon elle, l'entreprise "à développer ses installations de production et sa technologie" en Europe. "Je pense que c'est une bonne chose", a-t-elle martelé.

"Nous avons besoin d'implanter sur le sol européen une partie de la production des industries essentielles du futur", a déclaré de son côté Robert Habeck, défendant une politique de "sécurité stratégique" en matière d'économie.

L'Union européenne (UE) apporte ainsi une réponse concrète à l'Inflation Reduction Act (IRA), le plan de soutien de 370 milliards de dollars décidé par l'administration américaine pour favoriser l'industrie verte et les usines américaines.

3.000 emplois en jeu

L'usine allemande de Northvolt, la première du groupe en dehors de la Suède, devrait employer 3.000 personnes. Elle aura une capacité annuelle de 60 GWh, de quoi équiper 800.000 à 1 million de véhicules électriques par an, selon la taille de la batterie. 

La production démarrera en 2026 et atteindra sa pleine capacité en 2029.

Northvolt est l'un des plus grands espoirs européens en matière de batteries au moment où le Vieux continent cherche à rattraper son retard dans cette production indispensable à la transition de l'industrie automobile.

Le projet d'usine à Heide, dans la région du Schleswig-Holstein, avait d'abord été annoncé en mars 2022. Mais le projet était ensuite devenu incertain, le patron du groupe suédois, Peter Carlsson, affirmant que l'investissement "pourrait être repoussé" en raison de la hausse des prix de l'énergie en Europe et de la concurrence des subventions américaines.

La Commission européenne a adopté en mars 2023 un texte facilitant les aides d'Etat en faveur de projets contribuant à réduire les émissions de CO2 de l'UE, en réponse aux subventions américaines et chinoises qui font craindre une fuite des investissements verts hors d'Europe.

Le texte simplifie et étend les possibilités de subventions publiques jusqu'à fin 2025. Il inclut notamment un mécanisme permettant aux Etats membres, dans certains "cas exceptionnels", de s'aligner sur le montant d'aide proposé par un pays tiers pour éviter qu'il ne "détourne" un investissement prévu en Europe.

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