L'IA en Hauts-de-France : de la sensibilisation à la pratique

Deux ans après le lancement du projet IAHDF (Intelligence artificielle Hauts-de-France), il était temps de faire le point sur les avancées en région. Si le chemin est encore long avant d'arriver à impliquer toutes les entreprises à s'intéresser à l'IA, la démarche en région est clairement enclenchée.

Sur la période 2018-2022, l'Etat a annoncé un plan national IA d'un montant d'1,5 milliard d'euros. © Tierney
Sur la période 2018-2022, l'Etat a annoncé un plan national IA d'un montant d'1,5 milliard d'euros. © Tierney

En 2018, l'Etat (la DGEFP – Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle – et la DIRECCTE devenue DREETS – Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités), la Région Hauts-de-France, le Medef Lille Métropole et Opcalia (devenu Akto) se sont unis pour lancer une expérimentation de deux ans pour détecter, anticiper et accompagner la transformation des compétences induites par l'émergence de l'IA en Hauts-de-France.

Alors que la région compte 1,5 million de salariés et 450 000 fonctionnaires, 230 000 collaborateurs seront sensibilisés à l'IA d'ici 2030 selon l'étude menée. Quatrième région française en nombre d'emplois numériques derrière l'Ile-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et l'Occitanie, les Hauts-de-France compterait plus de 400 chercheurs en IA sur les 5 300 que compte le territoire.

Un levier pour l'emploi

Les besoins en formation et en recrutement pour la région se montent à 111 400 postes, dont 4 200 postes d'experts en IA à pourvoir d'ici 2023 et 6 400 postes d'experts à faire évoluer en IA. «A cinq ans, un emploi sur cinq sera touché par l'IA ; un sur trois à dix ans. On estime les besoins à 7 500 spécialistes d'ici 2023 à l'échelle nationale», détaille Hervé Dissaux, dirigeant du cabinet Helevato. Autant dire que les besoins sont nombreux et sur toutes les thématiques de l'IA : les données, les algorithmes, les métiers et les usages.

La région est quatrième en nombre d'emplois numériques. Sur la période 2018-2022, l'Etat a annoncé un plan national IA d'un montant d'1,5 milliard d'euros. © RAEng_Publications

A travers l'EDEC – Engagement sur le développement de l'emploi et des compétences – qui structure cet engagement, la certification «Chef de projet IA» a été créée en lien avec l'IMT Lille Douai pour, justement, faire monter en compétences des collaborateurs, devenus des femmes et des hommes «augmentés». Alors, certes, l'IA ne sera pas sans détruire certains emplois – comme toute transition technologique –, mais elle permettra aussi de supprimer des tâches répétitives. Surtout, l'IA concerne tous types de métiers : du bac au bac +5. Mais aussi tous les secteurs d'activité.

Défricher le terrain

La sensibilisation à l'IA a déjà été suivie par des collaborateurs de chez Arc International, du groupe Amethys, du groupe Centaure France ou encore la pâtisserie Meert, venus témoigner lors d'une journée de bilan, le 9 septembre dernier à Entreprises et Cités. Tous sont d'accord pour dire qu'ils ont pu mettre des mots sur un terme qui peut paraître abstrait.

«Une dizaine de collaborateurs ont été sensibilisés. Et autant dire qu'on partait de loin : avec le confinement et la fermeture de la boutique, on s'est rendu compte qu'on ne connaissait rien de nos clients ni de leurs attentes. Comment garder le lien avec eux ? Il fallait créer une vraie base de données. Notre idée, c'est de segmenter l'information, en plus de la collecter», détaille Thierry Landron, directeur exécutif de chez Meert.

Celui pour qui l'IA était encore «très obscure» avant le confinement va tester prochainement la livraison à domicile, des recettes de pâtisserie en ligne chaperonnées par Camille et vient d'embaucher un spécialiste du marketing digital.

Même constat au sein du groupe Amethys (services et solutions durables dédiés aux réseaux d'eau) : «On voulait savoir si l'IA était faite pour nous. Quinze collaborateurs ont été sensibilisés et on avance puisque nous sommes en train d'installer un ERP (entreprise ressource planning) et une GMAO (gestion de maintenance assistée par ordinateur) pour éviter la déperdition d'informations», complète Nicolas Baltazar, repreneur de l'entreprise.

Même s'il est encore trop tôt pour dresser un bilan chiffré de ces expérimentations, force est de constater que les entreprises semblent avoir pris le train de l'IA, avec chacune ses spécificités et ses attentes. Pionnière dans la démarche, la région Hauts-de-France devrait être rapidement suivie par l'Ile-de-France, en train de lancer une expérimentation similaire sur son territoire.