L’entreprise et les salariés
Revue de récentes décisions de la Cour de cassation en matière de droit du travail.
Contrats de travail
Selon l’article L 1243-10 du Code du travail, l’indemnité de fin de contrat n’est pas due lorsque le salarié en CDD refuse la conclusion d’un contrat de travail à durée indéterminée pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente. Une cour d’appel ne saurait donc condamner l’employeur au paiement de cette indemnité, en retenant que sa proposition de transformation du CDD en contrat à durée indéterminée a été faite après la demande de non-renouvellement du contrat de travail de la salariée, alors que l’employeur avait offert la conclusion d’un contrat de travail à durée indéterminée avant le terme du CDD. (Cass. soc., 3 juillet 2024, pourvoi no 23-12340). Les obligations réciproques des parties au titre d’une clause de non-concurrencesont comprises dans l’objet de la transaction par laquelle le salarié déclare être rempli de l’intégralité de ses droits, et renonce à toutes demandes, en lien avec l’exécution comme la rupture de son contrat de travail, notamment toutes demandes de salaires ou indemnités de rupture. (Cass.soc., 3 juillet 2024, pourvoi no 23-14754). La proposition d’une modification du contrat de travail pour motif économique refusée par le salarié ne dispense pas l’employeur de son obligation de reclassement, et par suite de lui proposer éventuellement le même poste dans l’exécution de cette obligation. (Cass. soc, 10 juillet 2024, pourvois nos 22-18481, 22-18484, 22-18486, 23-13952).
Santé au travail
L’initiative de la saisine du médecin du travail en vue d’organiser la visite médicale de reprise appartient normalement à l’employeur, dès que le salarié qui remplit les conditions pour bénéficier de cet examen en fait la demande et se tient à sa disposition pour qu’il y soit procédé. En l’espèce, le salarié avait informé l’employeur de la fin de son arrêt de travail et demandé à plusieurs reprises l’organisation de la visite médicale de reprise. Pour la Cour de cassation, la cour d’appel ne pouvait pas le débouter de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail en raison du défaut de paiement de son salaire, au motif que l’employeur n’avait pas à organiser cet examen médical et à lui verser de salaire dès lors que l’intéressé, qui n’avait pas repris son poste, n’avait fourni aucun travail. (Cass. soc., 3 juillet 2024, pourvoi no 23-13784).
Licenciements
Pour cause de l’atteinte qu’il porte à la liberté fondamentale de témoigner, garantie d’une bonne justice, le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié dans le cadre d’une instance judiciaire, est atteint de nullité, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur. Une cour d’appel ne peut débouter le salarié de ses demandes, au motif qu’il a été licencié, non pas pour avoir témoigné contre l’employeur en justice, mais pour avoir, par ce témoignage, manqué à son obligation de confidentialité précisément définie dans son contrat de travail. (Cass. soc., 10 juillet 2024, pourvoi n° 23-17953). La cour d’appel avait retenu, dans cette affaire, la baisse de la consommation en volume des produits hygiène et beauté, en raison, notamment, de la concurrence des produits bio et naturels, qui avait entraîné une baisse corrélative du chiffre d’affaires et des parts de marché et, d’autre part, que sur ces catégories de produits l’environnement mondial concurrentiel était agressif. Pour la Cour de cassation, la cour d’appel qui a fait ressortir une tendance structurelle justifiant une réorganisation de l’entreprise, a pu déduire que la menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise, dans le secteur d’activité auquel elle appartient, était établie. (Cass. soc., 10 juillet 2024, pourvois nos 22-18481, 22-18484, 22-18486, 22-18498).
François TAQUET, avocat,
Spécialiste en droit du travail et protection sociale