L'emploi aux Etats-Unis défie encore la gravité en janvier

Les créations d'emplois aux Etats-Unis ont une fois de plus surpassé toutes les attentes pour le premier mois de 2024, du pain bénit pour le président Joe Biden en pleine campagne électorale, mais le...

Manifestation de salariés du journal Los Angeles Times après des annonces de licenciements, le 19 janvier 2024 à Los Angeles, en Californie © Patrick T. Fallon
Manifestation de salariés du journal Los Angeles Times après des annonces de licenciements, le 19 janvier 2024 à Los Angeles, en Californie © Patrick T. Fallon

Les créations d'emplois aux Etats-Unis ont une fois de plus surpassé toutes les attentes pour le premier mois de 2024, du pain bénit pour le président Joe Biden en pleine campagne électorale, mais le diable se cache peut-être dans les détails.

En janvier, 353.000 emplois ont été créés, a annoncé vendredi le département du Travail, deux  fois plus qu'attendu, et est même un peu supérieur à décembre, dont les données ont pourtant été révisées à la hausse. 

Le taux de chômage, lui, est stable à 3,7%.

"L'économie américaine est la plus forte du monde", a même clamé Joe Biden, qui brigue un second mandat à la Maison Blanche.

Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, les consommateurs, qui ont longtemps reproché au président démocrate la flambée des prix, sont "désormais assurés que l'inflation continuera de ralentir", et leur moral a bondi en janvier à son plus haut niveau depuis juillet 2021, selon l'estimation finale de l'Université du Michigan, également publiée vendredi.

La campagne électorale pour la présidentielle de novembre est lancée. Le principal concurrent de Joe Biden côté républicain est l'ancien président Donald Trump, qui vante régulièrement la santé vigoureuse de l'économie américaine lorsque lui-même était à la Maison Blanche.

Indicateurs de faiblesse

Cependant, si certains éléments montrent "la solidité remarquable du marché du travail", il y a aussi "des indicateurs de faiblesse préoccupants", nuance Julia Pollak, cheffe économiste pour le site d'annonces d'emplois ZipRecruiter.

Elle relève notamment que "la durée hebdomadaire moyenne du travail, est tombée à son niveau le plus bas depuis la récession" de 2020, liée à la crise du Covid-19, et, avant cela, depuis 2010.

Il s'agit selon elle d'un "signal d'alarme" avertissant que "des suppressions d'emplois pourraient être imminentes", car "les entreprises réduisent généralement les heures de travail avant de réduire la masse salariale".

D'ores et déjà, janvier a vu de multiples annonces de licenciement, comme au Los Angeles Times qui s'est séparé de plus d'un cinquième de sa rédaction, ou encore dans le groupe de messagerie et de livraison de colis UPS qui a annoncé la suppression de 12.000 emplois sur les 500.000 de l'entreprise.

La réduction des coûts est le "principal moteur" des licenciements, selon Andrew Challenger, vice-président du cabinet de consultants Challenger, Gray & Christmas, qui a publié jeudi une enquête sur le sujet.

Il y a aussi, souligne-t-il, "des tendances économiques plus larges et une évolution stratégique vers une automatisation accrue et l'adoption de l'intelligence artificielle dans divers secteurs", tandis que l'approche de l'élection pousse les entreprises à anticiper "d'éventuels changements politiques susceptibles d'avoir un impact sur leurs secteurs".

La Fed attentiste sur les baisses de taux

La croissance de l'emploi en janvier, certes, "a été exceptionnelle", mais cela devrait conforter la banque centrale américaine (Fed) à être patiente avant de commencer à baisser les taux, commente Rubeela Farooqi, cheffe économiste pour High Frequency Economics.

La Fed envisage en effet de commencer à assouplir sa politique monétaire en 2024. Cela lâchera du lest pour l'accès des ménages au crédit, et redonnera un peu de pouvoir d'achat.

Son président Jerome Powell a cependant jugé mercredi "peu probable" d'atteindre d'ici la prochaine réunion, en mars, un "niveau de confiance" suffisant quant à la trajectoire de l'inflation pour entamer les baisses de taux à ce moment.

Il a décrit un "marché du travail (qui) reste tendu, mais les conditions d'offre et de demande continuent de se rééquilibrer". Et "alors qu'il y a un an, nous pensions qu'il fallait un certain ralentissement de l'activité économique" pour faire baisser l'inflation, désormais, "nous ne cherchons pas à affaiblir le marché du travail"

L'inflation PCE, indice privilégié par la Fed et qu'elle veut ramener à 2%, a montré une évolution des prix hors énergie et alimentation de 2,9% sur un an en décembre, au plus bas depuis près de trois ans.

34HH7T2