L’économie américaine au bord du précipice avec Trump ?
Les choix de Donald Trump créent de l’incertitude et menacent l’économie américaine d’une récession, ce qui inquiète les entreprises et les marchés financiers.

Dans
son discours devant le Congrès, le 4 mars dernier, Donald Trump
a déclaré fièrement : « nous avons accompli plus en
43 jours que la plupart des administrations en quatre ou huit
ans — et nous ne faisons que commencer ». Et c’est vrai,
si l’on en juge par les 89 décrets
présidentiels signés depuis son investiture et la litanie de prises
de paroles et de positions quotidiennes. Mais, loin de rassurer, sa
politique du « Make America Great
Again » (MAGA) est en train de bouleverser
l’ordre économique, social et politique du monde entier. Et aux
États-Unis, c’est désormais la récession qui guette…
La
guerre commerciale
Bien
que prohibée par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l’arme
des droits de douane est dégainée à tour de bras par Trump contre
tous les pays, alliés ou ennemis, la transformant de facto en
une sorte de politique de la canonnière. Désormais, les États-Unis
assument des « droits de douane réciproques », censés
permettre un rétablissement de « l’équité dans les
relations commerciales », en appliquant aux importations un
niveau de droits
de douane identique à celui subi par les exportations
américaines. Trump espère ainsi améliorer la compétitivité des
entreprises américaines, négligeant que celle-ci ne dépend pas que
des prix, mais aussi de la manière dont les produits sont perçus
par les consommateurs (qualité, design, conditions de fabrication…).
Quoi
qu’il en soit, le président des États-Unis a décidé de frapper
les importations d’acier et d’aluminium européens de 25 %
de droits de douane. Quant au Canada, il n’hésite pas à évoquer
le rattachement du pays aux États-Unis, tout en menaçant de
détruire son industrie automobile. Bien entendu, la plupart des pays
ont rétorqué par des mesures similaires, ce qui aura pour effet
principal d’augmenter partout les coûts pour les entreprises et
les consommateurs, tout en pesant très lourdement sur
l’activité et les balances commerciales.
Un
risque de récession
La
menace d’une récession plane de ce fait sur l’économie
américaine, même si le taux de chômage reste pour l’heure
faible, d’autant que la
croissance retrouvée depuis la pandémie relève davantage de la
politique d’investissements massifs de Joe Biden que d’un
quelconque dynamisme interne aux États-Unis. Les coupes
budgétaires claires menées par Elon Musk et son « Département
de l’Efficacité gouvernementale » — avec les
licenciements de fonctionnaires à la clé — ne feront dès lors
qu’aggraver la situation, tout en désorganisant des pans entiers
de la société.
Quant
aux droits de douane réciproques, ceux-ci conduiront inévitablement
à une hausse des prix, dans un pays où les électeurs/consommateurs
n’ont jamais pardonné à Joe Biden d’avoir laissé filer
l’inflation. Rien d’étonnant donc à ce que le moral des ménages
ait commencé à reculer au mois de mars aux États-Unis, avec à la
clé le risque d’une baisse de la consommation qui obérerait
encore un peu plus l’activité économique. Le moral des
entreprises est également en berne. Il y a certes les mastodontes de
la Big Tech, dont les « sept magnifiques » (Apple, Meta,
Nvidia, Microsoft, Amazon, Tesla, Google), qui bien qu’ayant les
reins solides semblent néanmoins avoir mangé leur pain blanc entre
concurrence chinoise, réglementation au sein de l’UE et danger
d’un ralentissement économique généralisé.
Mais toutes les entreprises n’ont pas le privilège de Tesla de pouvoir
vendre en direct à la télévision leurs produits au président des
États-Unis. Au contraire, la plupart des entreprises vont être
frontalement percutées par l’onde de choc protectionniste, ne
serait-ce que dans leurs approvisionnements. Qu’il suffise de
penser aux 200 % de taxes sur les vins et spiritueux européens
annoncés par Trump en réplique aux 50 % de droits de douane
sur le bourbon et les whiskys américains…
Les
marchés financiers entre doute et affolement
Il
n’en fallait pas plus pour que les marchés financiers
commencent à s’inquiéter. Les indices Dow Jones et Nasdaq ont
ainsi dégringolé depuis un mois, les investisseurs ne sachant plus
trop à quel saint se vouer avec l’incertitude croissante liée à
la politique menée par Trump, d’autant que ce dernier multiplie
les déclarations intempestives, voire contradictoires, sur tous les
sujets.
Le
président américain a pourtant donné des gages aux marchés
financiers, certes pas sur l’endettement public quasiment absent
des débats électoraux, mais sur la déréglementation monétaire et
financière. Il a même nommé à la tête du Trésor un gestionnaire
de fonds spéculatifs,
Scott
Bessent,
et
promis de limiter le champ d’action des autorités de contrôle des
marchés financiers. Mais, rien n’y fait, la lune de miel avec Wall
Street semble avoir viré à l’aigre.
Toujours
optimiste, Donald Trump a balayé les critiques d’un revers de la
main et considéré qu’il faudrait un peu de temps pour atteindre
cet « âge d’or » évoqué dans son discours
d’investiture. Il n’est pourtant pas certain que le brouillard
anxiogène créé par sa politique soit vraiment de nature à y
mener.