L’intelligence économique en Picardie : une stratégie globale et structurée
Dans une économie marquée par la mondialisation et par une forte concurrence internationale, les entreprises doivent protéger leurs savoir-faire et maîtriser l’information afin d’assurer leur pérennité. L’intelligence économique, outil de « course à la compétitivité », bénéficie d’une stratégie nationale publique, déclinée en Picardie, et qui mutualise tous les acteurs du domaine.
La circulaire du Premier ministre du 15 septembre 2011 définit l’intelligence économique comme consistant à collecter, analyser, valoriser, diffuser et protéger l’information économique stratégique, afin de renforcer la compétitivité d’un Etat, d’une entreprise ou d’un établissement de recherche », peut-on lire sur le site internet de la délégation interministérielle à l’intelligence économique (D2IE). A la fois politique publique et démarche d’entreprise, l’intelligence économique s’inscrit dans le contexte de la mondialisation et de « l’interconnexion des économies ». Apparition de nouveaux acteurs, milieu de plus en plus concurrentiel ou encore développement d’une société à l’information omniprésente, les entreprises françaises doivent désormais, pour transformer ces évolutions en opportunités, protéger leur compétitivité et leurs savoir-faire. La solution ? Mettre en place une démarche d’intelligence économique au sein de l’entreprise leur permettant de comprendre, d’analyser et d’anticiper les mutations. Dans l’objectif de soutenir et renforcer la compétitivité des entreprises françaises et donc la création d’emploi, l’Etat a fait de l’intelligence économique une véritable politique publique depuis 2010, en développant une stratégie française d’intelligence économique. Cette dernière est élaborée par la D2IE et déclinée ensuite au niveau régional sous l’autorité des préfets de région. En Picardie, un comité régional stratégique donne les orientations et les objectifs à tenir pour l’année. Le comité opérationnel, qui se réunit trois fois par an, a la charge de décliner cette stratégie selon les quatre axes fixés par Claude Revel, déléguée interministérielle à l’intelligence économique : un volet pédagogique, un volet anticipation et accompagnement des évolutions, un volet sécurité et un volet travail d’influence. Un secrétariat permanent et un groupe sécurité économique, composé des services de sécurité intérieure et de défense, vient compléter ce dispositif. « L’objectif est de fédérer et coordonner les actions mises en oeuvre par les différents partenaires régionaux touchés par les problématiques liées à l’intelligence économique, indique Christophe Cavignaux, chargé de mission régionale intelligence économique à la Direccte. De nombreux acteurs participent au Comité régional : la Banque de France, la Direccte, l’Agence régionale de l’innovation, la gendarmerie nationale, etc. Nous essayons de nous focaliser dans nos actions, sur des “cibles” régionales à forts enjeux en termes de compétitivité, telles la filière aéronautique, les pôles de compétitivité, les projets liés aux investissements d’avenir et les plates-formes d’innovation. En mutualisant les actions et en ciblant, cela nous permet d’avoir une stratégie cohérente et pertinente. »Au niveau pédagogique, les actions se concentrent autour de l’organisation de réunions de sensibilisation en direction des chefs d’entreprise. Différents guides des bonnes pratiques sur l’intelligence économique à destination de publics ciblés viennent compléter cette politique de sensibilisation. L’enseignement de l’intelligence économique aux futurs actifs est également un objectif défendu par le dispositif régional à l’intelligence économique. « A la rentrée 2013, un module libre de 20 heures est proposé aux étudiants de l’université de Picardie Jules Verne. Nous passons ainsi en revue toutes les questions tournant autour du réseau, de la sécurité économique, de l’influence, de la communication de crise, etc. Quelques cours sont également proposés au sein du groupe Sup de co Amiens-Picardie, ainsi qu’à l’Université technologique de Compiègne », souligne Christophe Cavignaux. Concernant le volet anticipation et accompagnement, différents outils de veille stratégique existent, comme celui de la Direccte, à destination des décideurs économiques locaux. L’idée en 2014 étant de monter un groupe de travail et ainsi de mutualiser les actions et les bonnes pratiques sur ce volet spécifique.
« Chaque entreprise peut mettre en place une stratégie de veille, qu’il s’agisse de veille juridique, géopolitique, financière, technologique, sociétale, etc. Il faut comprendre l’intérêt de l’information, l’analyser, la maîtriser pour ensuite l’exploiter au service de son entreprise », évoque Christophe Cavignaux. En termes de sécurité économique, les entreprises, dont une centaine identifiées, sont suivies par les différents corps de sécurité de l’Etat selon leurs juridictions. Des visites d’entreprises, des réunions de sensibilisation, ainsi que des interventions sur les salons professionnels et auprès des syndicats professionnels sont ainsi réalisées. « Durant les visites, nous pouvons identifier les failles de sécurité existantes et apporter des préconisations au chef d’entreprise. Durant les réunions, nous les informons sur les bonnes pratiques de sécurité à mettre en place pour se protéger des actes malveillants », relate Alain Dherse, référent sûreté du groupement de la gendarmerie départementale de la Somme. Enfin, concernant le volet influence, il s’agit de sensibiliser les entreprises aux questions importantes de réseautage, de réputation ou de positionnement dans le bassin économique régional. « On peut faire de l’intelligence économique avec peu de moyens. Néanmoins, cela doit répondre à une stratégie d’entreprise (nouveau produit, export…) et à un besoin informationnel. Il existe de nombreux outils gratuits ou peu onéreux. C’est donc bien plus une question d’organisation et de structuration interne. Les chefs d’entreprise doivent simplement prendre conscience que l’intérêt de l’intelligence économique est de comprendre son environnement. Une fois ce dernier compris, il est bien souvent mieux maîtrisé », conclut Christophe Cavignaux.