L’entreprise et les salariés

Indemnité de licenciement. L’indemnité de licenciement, lorsqu’elle est prévue par le contrat de travail, a le caractère d’une clause pénale et peut être réduite par le juge, même d’office, si elle présente un caractère manifestement excessif (cass. soc. 4 février 2014 – pourvoi n° 12-14782).
Le contrat d’un directeur industriel comportait une clause stipulant qu’en cas de rupture du contrat de travail à son initiative, même en cas de force majeure, de faute grave ou de faute lourde, l’employeur s’engageait à respecter un délai de préavis de huit mois à compter de la réception de la lettre de licenciement, et à verser une indemnité de licenciement d’un montant égal à quatre mois de salaire brut. Cette indemnité, calculée sur la base des appointements bruts des douze derniers mois de salaire, n’étant pas cumulable avec une quelconque autre indemnité de licenciement d’origine légale ou conventionnelle. Licencié pour motif économique, le salarié avait saisi le conseil de prud’hommes.

Contrôle Urssaf. L’inspecteur du recouvrement, à qui l’employeur n’a pas présenté les justificatifs nécessaires pour permettre le contrôle, peut solliciter, avant l’envoi de la lettre d’observations, la production de documents supplémentaires (cass. civ.2° – 13 février 2014 – pourvoi n° 13-14132).
L’Urssaf de Bretagne avait notifié à une société un redressement, suite à un contrôle d’assiette portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007. Une mise en demeure lui avait été notifiée le 25 novembre 2008. L’entreprise avait saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale. Les juges du fond avaient annulé le redressement : d’après les pièces versées, et notamment la réponse, le 1er août 2008, de l’inspecteur du recouvrement aux observations de la société, la dernière visite sur place avait eu lieu le 3 juin. Lors de cette visite, celui-ci avait demandé à la société de lui faire parvenir des documents complémentaires, demande réitérée par courrier du 9 juin, énumérant les documents à lui adresser et précisant qu’à défaut de les obtenir pour le 19 juin, les sommes correspondantes seraient soumises à cotisations. Cette demande étant intervenue avant même l’envoi de la lettre d’observations, le contrôle n’avait pas été réalisé dans le respect du principe du contradictoire. La Haute Cour casse cet arrêt.

Transfert des contrats de travail. L’article L. 1224-1 du code du travail ne s’applique qu’en cas de transfert d’une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise (cass. soc. 12 février 2014 – pourvoi n° 12-17918). Un ouvrier d’entretien avait été embauché par la société A. Le 28 février 2003, cette dernière avait cédé ses droits d’exploitation de lits et places de chirurgie et maternité à trois cliniques, filiales de la société B. Le salarié avait été licencié pour motif économique. Pour la Cour de cassation, l’article L. 1224-1 du code du travail, interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, ne s’applique qu’en cas de transfert d’une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise. Or, en l’espèce, les autorisations administratives cédées à trois sociétés distinctes ne constituaient pas à elles seules une entité économique autonome et la société cédante avait poursuivi son activité après ces cessions. Dans ces conditions, les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail n’étaient pas applicables à cette opération.

Sanction disciplinaire. Le fait pour un employeur de ne pas prononcer de sanction disciplinaire à l’encontre d’un salarié ne peut constituer en soi un acte de répression syndicale vis-à-vis d’un autre salarié (cass. soc. 5 février 2014 – pourvoi n° 12-29130).
En l’espèce, un salarié, titulaire de divers mandats représentatifs, avait saisi la juridiction prud’homale pour demander l’annulation d’un avertissement prononcé à son encontre, d’une mise à pied, et la condamnation de son employeur à des indemnités en réparation d’un comportement de répression syndicale, ainsi que d’une discrimination syndicale dans le déroulement de sa carrière. Pour retenir l’existence d’actes de répression syndicale à l’encontre du salarié, les juges d’appel avaient relevé, outre l’avertissement et la mise à pied disciplinaire annulés par les prud’hommes, le comportement de l’employeur. Alors qu’il avait constaté que le supérieur hiérarchique du salarié avait, en 2007, commis une faute à l’égard de ce dernier en envoyant à ses collègues cadres un courrier électronique reproduisant et commentant de manière ironique une annonce privée diffusée par le salarié, celui-ci s’était contenté d’un simple courrier invitant le supérieur hiérarchique à faire part de ses regrets au salarié, sans prononcer aucune sanction réelle.
La Cour de cassation censure cette décision.

Clause de non-concurrence. La clause de non-concurrence qui prévoit le versement d’une indemnité avant la rupture du contrat de travail est nulle. La contrepartie financière versée au cours de l’exécution du contrat constitue un complément de salaire (cass. soc. 15 janvier 2014 – pourvoi n° 12-19472).
Un salarié avait été licencié pour fautes graves commises dans le cadre de son activité d’ingénieur commercial, et pour des motifs similaires dans le cadre de son poste de directeur général de la société. Il avait saisi la juridiction prud’homale pour obtenir paiement de diverses sommes.
Pour la Cour de cassation, le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, qui a pour objet d’indemniser le salarié tenu, après rupture du contrat de travail, d’une obligation limitant ses possibilités d’exercer un autre emploi, ne peut dépendre uniquement de la durée d’exécution du contrat, ni son paiement intervenir avant la rupture. Le paiement pendant la période d’exécution du contrat de travail de la contrepartie financière prévue par une clause de non-concurrence nulle, qui s’analyse en un complément de salaire, n’est pas dénué de cause.
Pour condamner le salarié à rembourser une somme au titre de la clause de nonconcurrence, les juges du fond avaient retenu qu’aucune cause de nullité n’affectait cette clause assortie d’une contrepartie financière, sous forme de versement d’une indemnité mensuelle. Et, l’employeur ayant renoncé à l’application de cette clause, le salarié n’avait jamais été soumis à une obligation de non-concurrence. Or, la clause de non-concurrence qui prévoyait le versement d’une indemnité avant la rupture du contrat de travail était nulle et l’employeur ne pouvait obtenir la restitution des sommes versées au titre d’une clause nulle, lesquelles constituaient un complément de salaire.