L’Anses consolide son ancrage au port de Boulogne

Situé bord à quai au cœur du port de Boulogne-sur-Mer, le laboratoire de sécurité des aliments spécialisé dans la qualité et la sécurité des produits de la pêche et de l’aquaculture s’étend. Les nouveaux espaces de recherche, qui abritent désormais les doctorants de l’Université du Littoral Côte d’Opale, ont été inaugurés le 14 juin.

Le laboratoire de Boulogne est implanté sur le quai, directement en lien avec l’industrie de la pêche.
Le laboratoire de Boulogne est implanté sur le quai, directement en lien avec l’industrie de la pêche.

Quelque 281 m² de surface de plancher ont été ajoutés par le cabinet parisien Werner Stutz collectif architecture au bâtiment existant. Cette extension, d’un coût d’1,157 million d’euros, financé par la Région (à 50%), la communauté d’agglomération du Boulonnais et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), s’intègre dans la dynamique régionale en matière de recherche dans le domaine de la qualité et de la sécurité des produits aquatiques. Elle permet d’accueillir les scientifiques de l’Unité de biochimie des produits aquatiques de l’ULCO, mutualisant ainsi les forces et les moyens pour répondre aux enjeux propres à la filière des produits de la mer. Fort d’une équipe de plus de vingt personnes, se consacrant à la qualité et à l’hygiène des aliments, dirigée par Laurent Laloux et Anne Brisabois, le laboratoire développe des méthodes de détection, de caractérisation et de qualification d’agents pathogènes (micro-organismes et parasites) et de contaminants chimiques (amines biogènes, microplastiques…) présents dans les poissons, les coquillages et les crustacés.

Des références internationales

Le laboratoire de Boulogne porte trois mandats nationaux de référence pour l’histamine, première cause des toxi-infections alimentaires associées aux produits de la pêche, les Anisakidae et parasites isolés de poisson et le Vibrio, genre bactérien dangereux en cas de consommation de produits de la mer crus. «Le laboratoire de référence, explique le directeur général de l’Anses, Roger Genet, apporte une expertise scientifique et technique aux administrations sanitaires par le développement et la validation de méthodes d’analyse de contaminants chimiques et d’agents pathogènes microbiologiques, la formation de laboratoires agréés et reconnus, l’organisation d’essais interlaboratoires et l’animation de réseaux de labos.» Le site est, de surcroît, associé au laboratoire de référence de l’Union européenne pour la bactérie Listeria monocytogenes.

L’extension a été inaugurée par Nicolas Lebas, vice-président du Conseil régional chargé de l’enseignement supérieur, le sous-préfet Jean-Philippe Vennin, Frédéric Cuvillier, président de la communauté d’agglomération du Boulonnais, et Roger Genet, directeur général de l’Anses.

Ses travaux ont des applications directes en visant la sécurité des consommateurs. «Nous travaillons par exemple sur des bactéries que l’on trouve dans les estuaires et qui, avec le réchauffement climatique, présentent un risque accru, souligne Thierry Grard, responsable de l’unité de biochimie des produits aquatiques. Nous étudions par exemple un vibrion qui affecte le bar d’aquaculture, comme ceux élevés par Aquanor à Gravelines. Nous cherchons des méthodes pour lutter contre cette bactérie en n’utilisant ni vaccin ni antibiotique.» À ses côtés, Stéphanie Coppin étudie les effets des mêmes bactéries sur l’homme.

Quel risque face aux microplastiques ?

L’Anses de Boulogne s’intéresse à une nouvelle problématique pour l’alimentation, les microplastiques. Décrites pour la première fois en 1972, mais réellement étudiées depuis 2004, ces petites particules de plastique, dont la taille est comprise entre 100 nm et 5 mm, se trouvent partout dans l’environnement : l’air, les cours d’eau, la terre, mais aussi dans les océans dans lesquels plus de 10% des plastiques produits dans le monde finissent leur vie. En fonction de leur composition ou de leur densité, elles peuvent flotter à la surface, être présentes à différents niveaux de profondeur, voire se déposer dans les fonds marins. «L’ensemble des espèces vivantes, des plus petites comme le zooplancton aux plus grandes comme les baleinespeuvent les ingérerprévient le docteur Guillaume Duflos, adjoint au chef du département des produits de la pêche. Au-delà de leur composition (polypropylène, polyéthylène, polystyrène), elles véhiculent des contaminants chimiques (métaux lourds, toxines, pesticides) et biologiques (bactéries) qui viennent se fixer à leur surface.» Le laboratoire, dans le cadre d’un projet de recherche intitulé «Nanoplastics», s’efforce à répondre à différentes questions : comment quantifier les microplastiques dans les aliments, quel est le niveau d’exposition de l’être humain à ces particules via l’alimentation et si l’homme y est exposé, quel est le risque pour sa santé ? Comme le rappelle Nicolas Lebas, vice-président du Conseil régional chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche, «cette extension s’inscrit dans le contrat de plan État-Région Marco (11 millions d’euros de budget), dont l’objectif est de mettre en place une approche originale et innovante pour l’étude du milieu marin, de ses ressources et de la qualité des produits aquatiques. Marco a pour finalité la protection de l’environnement, mais aussi du consommateur, ainsi que la valorisation sociétale associée». Ce laboratoire national ne peut qu’accompagner le développement de la filière d’excellence pêche du premier centre européen de transformation et de valorisation des produits aquatiques.