L'agroalimentaire mise sur l'export collaboratif
Chasser en meute : l'expression, souvent utilisée pour l'export, vaut aussi pour le secteur de l'agroalimentaire. Le gouvernement encourage la pratique via des appels à projet. Témoignages
«L'export collaboratif est une clé de la réussite», explique Marie Cambon, chargée de mission Amériques au ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.
Début avril, ce dernier organisait des « Journées Export » durant lesquelles s'est tenue une table ronde consacrée à cette modalité particulière de l'export. Un véritable enjeu pour le secteur agroalimentaire, composé aux trois-quarts de petites entreprises. Mais attention, l'export collaboratif, cela signifie «se structurer dans la durée pour développer des opérations de prospection à l'international. Ce n'est pas du one shot», précise Marie Cambon.
Le ministère soutient ce type de démarches, via plusieurs dispositifs, dont des appels à projet, «structuration des filières» de FranceAgriMer. Il s'agit d'opérations dont le budget dépasse les 100 000 euros. Trois exemples de projets menés dans ce cadre ont été présentés, – chacun à hauteur de 200 000 euros – dont deux portés par l'ANIA, Association nationale des industries alimentaires.
L'un d'entre eux encourage la collaboration entre les sociétés, via un volet de «mentorat», entre des entreprises qui souhaitent se développer à l'international et d'autres, encore plus expertes, qui acceptent – à titre gracieux – d'apporter leur analyse et leurs conseils. «Même si on fait de l'export depuis plusieurs années, on peut toujours apprendre», explique Franck Chaulvet, gérant de WAS International, cabinet de conseil chargé du dispositif.
C'est effectivement l'avis de Sylvie Burczak, responsable export de François Doucet Confiseur. L'entreprise provençale, créée en 1969, réalisait déjà 15% de son chiffre d'affaires à l'étranger, Elle n'en n'a pas moins souhaité avoir recours à un programme d'aide à l'export. «Notre objectif est de passer d'un export opportuniste à un export structuré», explique Sylvie Burczak . Pour elle, le dispositif s'est révélé «très formateur».
Une ferme laitière en 3D
Également porté par l'ANIA, un autre projet, auquel participent cinq entreprises de l'agroalimentaire, dont Alain Milliat (jus de fruits et infusions premium), vise le marché chinois. Il a été confié au cabinet EOC International. Pour Anne Martel-Reison, sa gérante, «l'export collaboratif n'est pas seulement utile aux petites entreprises. Pour aborder un marché aussi complexe que la Chine, il vaut mieux se serrer les coudes et arriver avec une offre étendue».
EOC International a donc aidé les entreprises à bâtir un marketing partagé sur la base d'identité commune «les moments partagés». Et les entreprises bénéficient du concours de l'équipe du cabinet, implantée en Chine, qui connaît les circuits de distribution de détail visés par les prospects. Le projet – qui démarre – est «très prometteur», juge Simon Narcisse, directeur commercial d'Alain Milliat. Pour lui, l'opération représente un «investissement, qui, au regard du coût, peut s'avérer très rentable».
Autre exemple de projet, enfin, celui porté par l'Adepta , qui regroupe 240 équipementiers et fournisseurs de services pour l’agroalimentaire et l’agriculture, dans plusieurs filières. «La démarche va au delà de la mutualisation des coûts. (..). Notre force, c'est aussi de pouvoir proposer une offre globale plus attractive pour les clients étrangers», explique Sumer Javed, chargée de communication de l'Adepta . En plus des outils classiques ( brochures, sites Internet), celle-ci a développé une ferme laitière modélisée en 3D. «C'est un outil qui dépasse les barrières de la langue, et permet de valoriser chaque équipement, même les plus petites machines, qui sont positionnées dans la ferme», explique Sumer Javed, Le visiteur peut évoluer – virtuellement – à l'intérieur de la ferme et cliquer sur chacun des éléments présentés ( comme un abreuvoir), pour accéder à des informations techniques et aux contacts des entreprises concernées. D'autres projets similaires sont prévus pour les autres filières de l'Adepta (viticulture...).
L'export agroalimentaire inégalement touché par la crise
Avec la crise, en 2020, les exportations de produits agroalimentaire ont baissé de 3,1%. L'impact a été très différencié selon les filières (-12,3% pour les vins et spiritueux, +2,7% pour les oléagineux, +10,7% pour les semences et plants). En 2019, l'export de ce secteur avait connu un fort essor (+7,8%), générant un solde commercial positif de 64 milliards d'euros.