Dossier spécial

Filière nucléaire : la nécessaire et indispensable montée en compétences

Sans structuration, sans habilitation et sans certification, les PME n’ont pas accès à la filière du nucléaire, qui en plein renouveau offre des perspectives de développement et des prises de marchés. La clef passe par la case «formation».

© Energic- Florence Hutin Obara, la directrice d'energic ST 52-55
© Energic- Florence Hutin Obara, la directrice d'energic ST 52-55

Un tableau à jour qui révèle qu’entre 2008 et 2024, ce sont près de 430 personnes qui ont été formées au sein d’Energic ST 52-55 basée sur la commune de Val d’Ornain, dans la Meuse. «Une partie de nos missions, c’est l’aide à la montée en compétences de nos adhérents qui passe par tout type de formations avec le soutien de nos partenaires, EDF ou Orano dans le cadre de l’accompagnement économique du laboratoire de Bure», rappelle Florence Hutin Obara, la directrice de cette association qui ne fédère pas moins de 130 entreprises meusiennes et haut-marnaises avec la volonté d’améliorer l’accès aux consultations et appels d’offres dans le secteur de l’énergie. Ces formations spécifiques impliquent l’organisation de cessions sur un plateau technique dédié. Si Trihom, la filiale d’Orano dispose d’un outil à Yutz, les Meusiens et Hauts-Marnais peuvent se former à proximité, sur leur département, au sein du plateau technique implanté au cœur du lycée Blaise Pascal, à Saint-Dizier, évitant ainsi les déplacements pour leurs salariés. Et pour cause, que ce soient la fabrication de pièces pour des centrales ou l’intervention sur site, les formations sont nombreuses et exigeantes : qualification UTO (Unité technique opérationnelle) qui permet d’intervenir sur les sites nucléaires d’EDF, Cefri (capacité d’une entreprise à effectuer des travaux sous rayonnements ionisants) ou encore la certification ISO 14443 en lien avec la maîtrise des enjeux et la culture de la sûreté nucléaire. «Notre rôle est de les aider, de les accompagner pour leur ouvrir les portes», ajoute la directrice d’Energic.

Se former au bon moment

Particulièrement lourd, l’engagement dans ces formations spécifiques a un coût non négligeable. Si les entreprises doivent être structurées (avec une personne ou un service dédié à la montée en compétences), ces formations ne sont pas synonymes de prises de marché automatiques. Il y a une quinzaine d’années, plusieurs industriels avaient parié sur une mise en commun via des GIE (groupements d’intérêt économique) pour décrocher des marchés hydrauliques, de manutention et de levage. Or, leur investissement n’avait abouti à presque rien, ni même à une consultation notamment sur le domaine hydraulique. «Actuellement, toutes les entreprises formées ont décroché des marchés», assure Florence Hutin Obara. Si elles ne sont pas encore très nombreuses, compte tenu du temps et de l’investissement consentis, elles travaillent toutes sur un secteur géographique restreint avec les sites de Cattenom, Nogent, Soulaines ou encore Chooz. Demain, si l’Andra obtient un feu vert à la suite de sa demande d’autorisation de création (DAC) de Cigéo à Bure, «elles seront inévitablement plus nombreuses à vouloir profiter des retombées économiques», ajoute la référente d’Energic. Beaucoup de dirigeants estiment qu’il est encore trop tôt pour se former sachant que les habilitations et les certifications ont une durée de vie limitée, en revanche, les entreprises du BTP sont dans les starting-blocks car elles sont conscientes que ce sont elles qui seront en premier mobilisées pour les travaux d’aménagement. Toutes veulent prendre le train en marche et refusent de passer à côté de ce marché qui se développera près de chez elles.

Former les jeunes qui seront les salariés de demain

Au-delà des entreprises et de leurs salariés, Energic apporte également sa pierre à l’édifice auprès des jeunes en lien avec l’Université des métiers du nucléaire qui attribuent des bourses à certains élèves méritants. C’est le cas de quatre apprenants du lycée professionnel Ligier Richier de Bar-le-Duc. L’association s’est chargée d’identifier des tuteurs et des parrains. «On sait que ces jeunes seront les salariés de demain, sans compter que notre intervention entre dans des enjeux sociétaux.» L’objectif est aussi de séduire les plus jeunes avec des actions de sensibilisation auprès des collégiens, en espérant qu’ils se tournent vers des filières techniques et la formation initiale. Les demandeurs d’emploi font partie des cibles sachant que la filière du nucléaire et plus particulièrement sa relance va se concrétiser en matière d’emplois avec 150 000 embauches d’ici 2033, selon les spécialistes. Un immense défi en termes de recrutement et de formation.