Faut-il redéfinir pénalement le viol? Un rapport parlementaire relance le débat

"Il est temps d'agir" : un rapport parlementaire, publié mardi, préconise d'intégrer la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol, relançant le débat sur une question qui divise tant chez les professionnels du droit...

un rapport parlementaire, publié mardi, préconise d'intégrer la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol © Fred TANNEAU
un rapport parlementaire, publié mardi, préconise d'intégrer la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol © Fred TANNEAU

"Il est temps d'agir" : un rapport parlementaire, publié mardi, préconise d'intégrer la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol, relançant le débat sur une question qui divise tant chez les professionnels du droit que dans les rangs des associations féministes. 

"Alors que s’est clos" le procès des viols de Mazan "qui aura été par bien des égards le procès de la culture du viol, il est temps d’agir", estime dans son rapport final la mission d'information sur "la définition pénale du viol" conduite par la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale. 

Face à une "criminalité sexuelle qui ne recule pas" et "un climat d'impunité qui perdure", cette mission, dont les conclusions devraient déboucher sur une proposition de loi, propose d'"intégrer la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol et des agressions sexuelles".

"La nouvelle définition doit préciser que le consentement est spécifique, doit être donné librement et peut être retiré à tout moment", précise encore le rapport qui doit être présenté par les députées Véronique Riotton (Ensemble pour la République) et Marie-Charlotte Garin (Europe-Ecologie Les Verts).

A l'heure actuelle, l'article 222-23 du code pénal définit le viol comme "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise".

Ces quatre critères - violence, contrainte, menace, surprise - seront conservés, précise le rapport. L'idée est d'ajouter la notion de non consentement afin que soient pris en compte les "cas de sidération, de contrôle coercitif ou d’exploitation de situations de vulnérabilités" qui ne sont à l'heure actuelle "pas explicitement couverts par la loi".

Inquiétudes

Car aujourd'hui, "faute de définition claire", le "consentement est souvent instrumentalisé par les agresseurs (+Je ne pouvais pas savoir+, +Elle n’a rien dit+), ce qui alimente les stéréotypes sur le viol, complique les dépôts de plainte et engendre de nombreux classements sans suite, au détriment des victimes", met en avant la mission parlementaire. 

Pour les rapporteures, la définition actuelle contribue par ailleurs "au maintien de préjugés sociétaux sur ce qu’est une + bonne +victime (qui résiste, se débat, est +exemplaire+ dans son comportement), un +vrai+ viol (avec violence et contrainte, par un individu monstrueux et/ou étranger)."

La question d'une redéfinition pénale du viol, à laquelle Emmanuel Macron s'est dit favorable, ne fait pas l'unanimité en France. Ses opposants mettent notamment en garde contre un renversement de la charge de la preuve quand d'autres s'inquiètent d'un "glissement vers une contractualisation des rapports sexuels".

Au sein même des associations féministes, la question divise. D'un côté, celles qui défendent la réforme, estimant que la prise en compte de la notion du consentement ne serait que l'application de la Convention d'Istanbul, ratifiée en 2014 par la France. 

De l'autre, celles qui s'inquiètent de la non prise en compte de situations dans lesquelles le consentement est extorqué et contraint.

Baguette magique

"On ne dit pas que tout est simple et binaire. Nous ce qu'on dit, c'est que le viol ne peut pas être uniquement caractérisé par la violence, la menace, la contrainte et la surprise, parce que cela laisse des centaines de milliers de victimes sur le côté, et ça, ce n'est pas acceptable", souligne auprès de l'AFP Marie-Charlotte Garin. 

"Ce que nous souhaitons changer, c'est la façon de faire l'enquête", indique de son côté Véronique Riotton. "On donne des outils différents aux forces de sécurité et aux magistrats pour pouvoir sanctionner autrement". 

Dans son rapport, la mission reconnaît que la réforme "n'aura pas l’effet d’une baguette magique sur les violences sexuelles" et qu'elle ne doit pas "nous dispenser d’un plan global, ambitieux et financé, de lutte contre les violences sexuelles et la culture du viol". 

En 2022, 230.000 femmes ont été victimes de viols, tentatives de viol et/ou agressions sexuelles en France, selon les données du ministère de l'Intérieur. 

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