Assises Nationales de l'Économie Circulaire des Minéraux

« Faire évoluer les curseurs, sans compromettre les enjeux environnementaux et de santé »

La troisième édition des Assises Nationales de l'Économie Circulaire des Minéraux* se tiendra à Lille les 2 et 3 avril autour de thématiques telles que les sédiments et terres, les déblais BTP et les coproduits minéraux de l’industrie. On en parle avec Cyril Scribot, consultant en économie circulaire du CD2E.


Cyril Scribot (à gauche), consultant en économie circulaire du CD2E.
Cyril Scribot (à gauche), consultant en économie circulaire du CD2E.

Quels sont les principaux enjeux des Assises Nationales de l'Économie Circulaire des Minéraux et pourquoi était-il essentiel pour le CD2E et la Région d’organiser cet événement ?

Historiquement, nous travaillons sur la valorisation des sédiments de dragage, provenant notamment des sites portuaires. Ils sont aujourd’hui principalement enfouis, mais n’existe-t-il pas des utilisations possibles pour les travaux publics ou d’autres secteurs ? N’est-il pas envisageable de faire évoluer les réglementations sur ces questions ? La Région a pris ce sujet à bras-le-corps et souhaite dynamiser ce secteur lié à la transition écologique. Des projets de recherche ont été lancés et se concrétisent aujourd’hui.

L’organisation de ce rendez-vous répond à une véritable demande des acteurs du secteur, qui souhaitaient élargir la réflexion à l’ensemble des minéraux. C’est l’occasion d’aborder ces enjeux collectivement : acteurs publics et privés, gestionnaires de matières usagées, acheteurs publics, bureaux d’études, industriels du BTP et de l’industrie minérale, ainsi que les ports. L’objectif est de ne pas cloisonner la réflexion matériau par matériau. Et cette question est d’ailleurs centrale dans les travaux du futur canal Seine-Nord Europe : que faire des matériaux excavés ?

Le secteur des minéraux est souvent perçu comme peu compatible avec l’économie circulaire. Quels sont les leviers et innovations qui permettent d’intégrer davantage de circularité dans cette filière ?

De nombreux outils, usines, sites logistique, etc., sont aujourd’hui opérationnels pour y parvenir. Il est également essentiel de mailler le territoire avec des structures dédiées à la circularité des minéraux, en s’appuyant notamment sur le transport fluvial. Parallèlement, il est primordial de renforcer la formation des acteurs du marché sur les aspects techniques et la sécurité environnementale. A ce titre, des guides ont été publiés par les pouvoirs publics pour encadrer le secteur et rassurer les entreprises, et d’autres outils ont été déployés comme le site spécifique sur cette thématique mis en ligne par le CD2E.

Le CD2E accompagne les acteurs économiques et institutionnels vers des modèles plus durables. Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de projets ou d’initiatives qui seront mis en avant lors de ces assises ?

Nous aurons des retours d’expérience des ports de Calais, Boulogne-sur-Mer et Lille, ainsi que d’Haropa Port, le port fluvio-maritime de l'axe Seine, et du bassin d’Arcachon sur la valorisation des sédiments de dragage. EDF interviendra également sur la gestion des sédiments de barrage.

Parmi les innovations présentées, la société Unelo exposera son procédé d’éco-voiries intégrant des sédiments dans la construction des routes. De son côté, la société Neocem présentera sa nouvelle usine de production de ciment bas carbone dans l’Oise, un projet initié par des ingénieurs d’IMT Nord Europe et accompagné par le CD2E.

Quels sont les principaux freins réglementaires, techniques ou économiques que rencontrent les acteurs du secteur pour accélérer l’adoption de pratiques circulaires ?

Les guides publiés par les autorités compétentes restent, à mon sens, trop prudents au regard des volumes de minéraux disponibles. Aujourd’hui, selon ces publications, 80 % des sédiments ne sont pas valorisables. Notre travail consiste à faire évoluer les curseurs, sans bien entendu compromettre les enjeux environnementaux et de santé. Il faut également comprendre que leur enfouissement coûte de plus en plus cher, notamment pour encourager le recyclage. Une grande partie est d’ailleurs envoyée en Belgique, où la réglementation sur l’enfouissement des minéraux est différente de la nôtre. C’est la genèse de notre réflexion.

A l’issue de ces deux jours d’échanges, quelles avancées concrètes ou engagements attendez-vous de la part des participants pour faire progresser l’économie circulaire dans le domaine des minéraux ?

Ce rendez-vous est avant tout l’occasion de confronter les attentes des industriels aux réglementations en vigueur et de réfléchir à leur évolution. L’objectif du CD2E et de ses partenaires est de montrer que des solutions existent, mais aussi de faire bouger les lignes pour une meilleure compréhension mutuelle entre la filière et le législateur, afin d’initier des démarches collaboratives. Cela serait impossible sans le soutien de la Région, qui, je le répète, est pleinement impliquée sur ces sujets.

* Auparavant Assises Nationales de la Valorisation des Sédiments