Exocell dans le tunnel

Exocell, la start-up douaisienne qui s’est notamment fait remarquer par ses installations de traitement de l’eau pour Ariane 6 à Kourou, est dans une très mauvaise passe. En redressement judiciaire depuis le 10 novembre dernier, la société pourrait disparaître.

Les stations d’épuration d’Exocell sont mobiles et modulables.  (Aletheia Press / MR)
Les stations d’épuration d’Exocell sont mobiles et modulables. (Aletheia Press / MR)

Cinq ans après son lancement, Exocell vit de sombres heures depuis le début de la crise sanitaire. Spécialisée dans la conception, la commercialisation et le service dans le traitement des eaux, l’entreprise, dirigée par deux cadres ingénieurs issus des métiers de l’eau, Matthieu Georgel, président de l’entreprise, et Stanislas Michaux, son directeur général, ne tient plus qu’à un fil… Quand ils créent leur entreprise en 2015, les deux cadres font la promotion d’une certaine conception des stations de traitement des eaux. «On n’a pas de brevet déposé au niveau mondial. On réalise des équipements mobiles et modulables», indique Matthieu Georgel. «Quand un industriel a besoin d’une station, il s’engage généralement dans un équipement fixe, en béton, qui est destiné à une seule tâche. Avec nos installations, on dépasse ces contraintes», ajoute son associé. Si l’on prend l’exemple du secteur agroalimentaire, on sait qu’une station est construite pour vingt ans, que le traitement de l’eau sera paramétré pour telle ou telle pollution et pour tel ou tel débit. Avec Exocell, la station s’apparente à un jeu de construction dont la taille des pièces peut changer (pour s’adapter aux débits), le logiciel varier (pour le traitement des eaux). Elle est, de plus, transportable.

Une croissance très soutenue dans un marché qui s’ouvre

Six ans après sa création avec 160 000 euros de capital, la société, qui emploie 13 salariés, développe un chiffre d’affaires de 1,5 million d’euros (le double de celui réalisé en 2019 et un quintuplement en quatre ans). Exocell s’appuyant sur la recherche et le développement, une grande partie de ses dépenses finance l’émergence de nouvelles solutions pour le traitement des eaux. Le premier équipement est sorti six mois après la création. Depuis, 150 équipements ont été installés. Des marchés conséquents se sont enchaînés : pour le Grand-Paris et sa nouvelle ligne souterraine de RER ; pour Eiffage en sous-traitance du Centre national de l’exploration spatiale (CNES) avec une station d’épuration destinée à recueillir les eaux des réservoirs qui entourent le pas de tir. Ces réservoirs servent à absorber l’onde de choc qui se déploie lors du décollage d’une fusée. L’eau déversée va également absorber la fumée dégagée par le combustible brûlé lors du décollage. Elle sera traitée par la station d’Exocell afin d’y filtrer les métaux lourds. En deux semaines, l’eau est rendue au milieu naturel.

«En redressement judiciaire, les portes se ferment»

L’entreprise a su s’exporter avec des chantiers en Afrique. Ses clients sont des grands comptes (Vinci, Eiffage) comme des PME de la région. Dans les ateliers de la zone du Bonnel, une partie des 13 personnes travaille encore. Les profils démontrent la large palette des compétences rassemblées : ingénierie en plasturgiste, dans le numérique… En outre, les dirigeants se sont inscrits dans une démarche solidaire et sont classés Esus (Entreprise solidaire d’utilité sociale). «On coche toutes les cases, mais quand on est en redressement judiciaire, les portes se ferment», constate Stanislas Michaux. Déjà bénéficiaire d’un PGE au printemps, soutenue par le réseau Autonomie Solidarité, l’entreprise n’a pas obtenu de succès auprès du médiateur de la Banque de France. Rentable au bout de quatre ans d’activité avec un modèle de recherche et développement qui consomme beaucoup en fonds de roulement, Exocell a pourtant un carnet de commandes potentielles fourni. «On veut faire un parc d’équipement avec les solutions de services qui l’accompagnent. Nous avons sollicité la Région pour trouver une porte de sortie», expliquent encore les dirigeants. Un cri d’alarme qu’il faut entendre. Et vite !