Entreprise Métal Insertion : un dirigeant soudé avec ses salariés

Les entreprises d’insertion offrent à la fois un accès à un emploi et un accompagnement socio-professionnel à des personnes qui en sont éloignées. À La Madeleine, Entreprise Métal Insertion (EMI), créée il y à 12 ans, a ainsi accueilli une centaine de salariés afin de les former au métier de soudeur. Rencontre avec son dirigeant, Antoine Bobot.

Antoine Bobot, dirigeant d'Entreprise métal insertion. ©Léna Heleta
Antoine Bobot, dirigeant d'Entreprise métal insertion. ©Léna Heleta

Pouvez-vous nous présenter EMI, que vous avez créée il y a 12 ans maintenant ?

Nous sommes une entreprise d’insertion en métallerie. On fabrique et on pose des pièces en acier, principalement dans la métallerie et de temps en temps dans l’industriel. Le fait d’être une entreprise d’insertion fait qu’on embauche des gens en CDDI, des contrats de quatre mois qui peuvent être renouvelés autant de fois que l'on veut pendant deux ans. Ce sont globalement des personnes qui ont des difficultés pour être embauchés parce qu’il leur manque quelque chose. C’est soit d’un point de vue social - comme la langue française par exemple -, ou d’un point de vue technique. Donc nous avons deux années pour essayer de leur donner le savoir-faire et qu’elles aient ensuite les capacités d’être embauchées.

Pourquoi se concentrer sur une entreprise d’insertion et pas une entreprise plus classique dans son fonctionnement ?

C’est très important pour moi de trouver du sens dans mon métier et de savoir pourquoi je me lève le matin, que mon travail ait un but social et politique. Et quand on se lève et qu’on a un certain nombre de personnes qu’on accompagne pour une meilleure vie et qu’on les fait progresser, le sens est évident. C’est ça l’objectif premier.

©Léna Heleta

Est-ce que cela amène des difficultés supplémentaires d’être une entreprise d’insertion ?

Cela amène pas mal de problèmes en plus. Je pense qu’on est dans une société où la performance prévaut et où la majeure partie des entreprises cherche plutôt à avoir les salariés les plus performants possible et cela laisse sur le bord de la route beaucoup de personnes. J’embauche des gens qui ne sont pas très performants, donc forcément, je suis à contre-courant de ce qui fonctionne dans les autres entreprises. Certes, j’ai un peu d’aides financières, je les paye un peu moins cher également, mais le fait d’avoir des gens moins performants, avec un taux d’absentéisme plus important qu’ailleurs, nous avons plus de problématiques à résoudre.

Comment effectuez-vous le suivi des problématiques sociales de vos salariés ?

Il y a deux personnes sur la partie administrative qui passent énormément de temps à les accompagner dans les recherches de logements, dans toutes les démarches financières ou ceux qui ont des problèmes autres, comme l’addiction par exemple. Elles passent énormément de temps à les accompagner au quotidien, elles les aident dans leurs démarches comme le ferait, entre guillemets, une assistante sociale. Alors on essaye de se mettre des limites, sinon cela peut être infini, comme tâche.

Que pensez-vous de la prise d’importance de la RSE dans les entreprises ?

C’est une bonne chose, car je suis convaincu que le travail est important pour l’épanouissement personnel, pas uniquement pour gagner de l’argent. Et si on veut qu’il y ait un épanouissement personnel de ses salariés, il faut y faire attention. Dans tous les cas, les entreprises plus classiques ne vont pas avoir le choix de tendre vers plus de RSE, parce qu’on a une génération qui arrive qui ne va pas vouloir travailler uniquement pour de l’argent. Il va falloir comprendre pourquoi elle travaille, donc les entreprises n’auront pas le choix. C’est une belle évolution sur ce point.

Le challenge financier d'une entreprise d’insertion

«L’aide directe nous verse 12 000 euros par an et par personne en CDDI. Ce n’est pas énorme. Cette année, nous allons faire 2,5 millions d’euros de chiffre d’affaires de production et on va toucher moins de 10% d’aides, donc moins de 200 000 euros. Aujourd’hui, il y a deux modèles dans l’insertion : l’ACI et l’EI. L’ACI c’est Atelier chantier d'insertion, ce sont des associations. Les aides qu’elles reçoivent sont plus importantes par salarié car elles embauchent les plus en difficulté. L'Entreprise d'insertion, c’est l’étape d’après. On embauche des gens un peu moins abîmés par la vie, donc avec des aides moins importantes. Et je trouve qu’on pourrait être plus épaulés. C’est un challenge de réussir d’être une entreprise d’insertion avec les aides dont on dispose actuellement».

Quelques chiffres 

  • 35 salariés
  • 2,5 millions d’euros de chiffre d’affaires
  • Presque 100 personnes en insertion passées au sein d’EMI depuis 12 ans