Chausser des baskets pour un recrutement réussi

Changer de postures et sortir de sa zone de confort. C’est ce qui est demandé aux employeurs et aux demandeurs d’emploi qui acceptent de se frotter à une méthode de recrutement innovante. Fini le temps où le candidat la gorge nouée arrivait ses CV en mains pour passer un entretien face à un chef d’entreprise ou un responsable de ressources humaines. Depuis 2020, France Travail - alors appelé Pôle emploi - a imaginé une toute autre rencontre basée sous le signe de la convivialité, du sourire et des échanges. Des responsables de recrutement et des demandeurs d’emploi se retrouvent sur un terrain ou un stade pour ensemble se confronter à des ateliers sportifs. Le tout de manière anonyme. «On casse les codes du recrutement avec un message : Venez nous montrer ce dont vous êtes capables», analyse le directeur de l’agence de Bar-le-Duc de France Travail Yann-Éric Heintz, ajoutant que «ces opérations mobilisent toutes nos équipes et on ressent un réel engouement de tous les participants.» C’est d’ailleurs l’occasion, pour les recruteurs, de percevoir des habiletés, des compétences, des qualités comme la bienveillance, l’esprit d’équipe, l’entraide. L’initiative permet de désacraliser le fameux tête-à-tête que revêt l’entretien d’embauche en favorisant une rencontre différente révélant des valeurs et des compétences humaines et relationnelles. Le jeu est avant tout un prétexte, un révélateur de certaines qualités vivement recherchées par des employeurs. Certains souhaitent embaucher une personnalité, un leadership quand d’autres privilégient l’entraide ou la bienveillance, selon les secteurs d’activités et les postes à pourvoir. «Ensemble, on se supporte, on est solidaire, on fait équipe», explique un organisateur, premier témoin des bienfaits du sport dans le recrutement.

Trois temps forts pour de nombreux avantages

L’opération présente trois temps forts : la matinée sportive où tous les participants arrivent en tenue de sport avec simplement leur prénom écrit sur un badge. Ensemble, ils vont enchaîner les exercices animés par des professionnels qualifiés. Après un repas pris en commun où l’anonymat et la bonne humeur sont les principaux ingrédients, l’après-midi est consacré au job dating. C’est à ce moment précis que les employeurs sortent des rangs et révèlent leur identité. Cette partie reste, malgré tout, moins formelle que le classique entretien d’embauche. Et pour cause, le décor sur des bancs ou des gradins contribue à faire tomber la pression. Si l’organisation en amont s’avère importante et énergivore, en revanche, la mobilisation des volontaires est couronnée de succès. «On sait que c’est difficile de faire venir en nombre sur des forums plus classiques alors que pour cette opération originale, les demandeurs d’emploi participent avec enthousiasme. Ils sont volontaires avec un fort taux de présence», analyse l’expert de France Travail. D’ailleurs à l’heure où les métiers en tension peinent à trouver de bons candidats et où le marché du travail et la culture des candidats évoluent, les méthodes anciennes ne fonctionnent plus. Les responsables RH en ont parfaitement conscience et sont prêts à tester de nouvelles formules. SSelon le dernier bilan national, 59% des candidats avaient retrouvé un travail (CDD, CDI ou formation) dans les six mois. Ce taux est bien inférieur à un autre mode de recrutement plus classique. «Pour certains, c’est l’occasion de sortir de leur isolement, de repartir reboosté, avec une confiance et une envie de se relancer», analyse un organisateur. Quant aux employeurs, ils découvrent avant tout un visage, une qualité humaine, relationnelle qui est mise en lumière. Finalement ce match gagnant-gagnant pour l’ensemble des participants remporte tous les suffrages et cartonne partout en France, sur tous les bassins d’emploi depuis quatre ans. La preuve d’une remise en question. Le diplôme ou l’expérience ne sont plus les deux boussoles des recruteurs.