Banque Populaire ouvre ses données sur les paiements des étrangers

Des Belges ou des Russes, lesquels dépensent le plus en France ? Où vont-ils, et dans quelles régions achètent-ils le plus ? La Banque Populaire donne accès à ces données, anonymisées. Une mine d'informations potentielle pour les opérateurs publics et privés locaux, économiques et touristiques. Et aussi pour la recherche.

Dans les Hauts-de-France, entre 2017 et 2018, le nombre de transactions concernant les Britanniques et les montants ont respectivement augmenté de 32 et 47%. Et la tendance se confirme en 2019.
Dans les Hauts-de-France, entre 2017 et 2018, le nombre de transactions concernant les Britanniques et les montants ont respectivement augmenté de 32 et 47%. Et la tendance se confirme en 2019.

En matière touristique, c’est un complément précieux aux enquêtes de l’Insee. Mais la source est bancaire… Michel Roux, directeur du développement des Banques Populaires, présentait récemment le portail de l’«Observatoire des données au service du territoire», de l’établissement. Ce dernier est librement accessible sur Internet (https//donnesterritoire.banquepopulaire.fr). L’utilisateur y accède aux informations concernant les dépenses des étrangers en France, en montant et en nombre, au niveau des départements et des régions. Il peut suivre leur évolution dans le temps. Ces informations sont extraites des tickets émis par les cartes de crédit appartenant à des étrangers, à l’exclusion des transactions relevant du e-commerce.

Cela concerne donc 1,2 milliard de transactions, comptabilisées chaque année depuis janvier 2017, y compris en sans contact, mais hors e-commerce et paiements en espèces, auprès de  400 000 commerçants clients de la banque. L’outil permet, par exemple, de connaître le Top 3 des régions où se rendent les étrangers en 2018 : il s’agit de l’Île-de-France, suivie d’Auvergne Rhône-Alpes, puis, de la Provence-Alpes-Côte-d’azur (PACA). Autre constat que permet l’outil, l’effet Brexit n’est pas encore patent dans les Hauts-de-France, ou, en tout cas, il n’a pas découragé les Britanniques de se  rendre dans cette région. Bien au contraire : entre 2017 et 2018, le nombre de transactions les concernant et les montants ont augmenté, respectivement,  de 32 et 47%. Et la tendance se confirme en 2019. «Utiliser des données commerciales anonymisées pour les mettre au service du développement régional» : tel est le but de l’Observatoire, pour Michel Roux, qui évoque un procédé «gagnant/gagnant» pour les territoires et l’établissement bancaire, engagé dans ces économies locales.

Remplir les campings et décrypter les tendances de fond

Un avis qu’illustre André Joffre, président de la Banque Populaire du Sud et de la Fédération nationale des Banques Populaires (FNBP), et vice-président de la Chambre de commerce et d’industrie de Perpignan : «l’Observatoire représente un élément qui s’ajoute à la panoplie dont disposent déjà les analystes. Avec l’avantage qu’il est gratuit. Dans le cadre d’une manifestation, on peut par exemple déjà demander à Orange d’où viennent les gens qui participent, mais c’est payant (…). L’Observatoire peut être utilisé à des finalités marketing. Par exemple, à Perpignan, le festival de photographie Visa pour l’image amène beaucoup de monde. On peut se demander où communiquer pour en chercher davantage. Or, il est toujours plus facile d’accélérer un flux que de l’initier. Là, on pourra, par exemple, se rendre compte que l’on a beaucoup de Barcelonais, et donc, on pourra travailler pour développer cela». Autre application possible, d’après André Joffre : en se basant sur la population qui y vient déjà, essayer de remplir les campings au mois d’avril, lorsque des capacités d’accueil restent disponibles…

Mais le potentiel de l’Observatoire va au-delà de ces applications immédiates. En effet, sur le site Internet, les 107 jeux de données sont disponibles en open data : ils peuvent être téléchargés et réutilisés librement, à des fins non commerciales. Ils  devraient donc intéresser les start-up, qui peuvent concevoir des services en intégrant ces informations, ou des chercheurs académiques. Déjà, Banque Populaire travaille avec l’Université Paris Orsay, dans le cadre d’un projet qui vise à identifier les facteurs de l’innovation territoriale.

Les Banques Populaires sont loin de délivrer toutes les données qu’elles détiennent : techniquement, elles connaissent aussi l’activité des commerçants, grâce au code NAF. Elles pourraient aussi donner le détail des dépenses au niveau des communes. Mais pour ces paramètres, une limite s’impose : «la granularité très fine peut nuire à la confidentialité», explique Michel Roux.