Au PS, la séquence Cazeneuve met Olivier Faure sur la corde raide avant le congrès

Après l'hypothèse avortée de Bernard Cazeneuve à Matignon qui a divisé le PS, le premier secrétaire Olivier Faure se retrouve sur la corde raide, alors que se profile un nouveau Congrès où ses opposants réclament toujours que les...

L'ex-Premier ministre Bernard Cazeneuve à l'Elysée, le 14 mai 2017 à Paris © Eric Feferberg
L'ex-Premier ministre Bernard Cazeneuve à l'Elysée, le 14 mai 2017 à Paris © Eric Feferberg

Après l'hypothèse avortée de Bernard Cazeneuve à Matignon qui a divisé le PS, le premier secrétaire Olivier Faure se retrouve sur la corde raide, alors que se profile un nouveau Congrès où ses opposants réclament toujours que les socialistes se libèrent de la tutelle insoumise. 

Olivier Faure est accusé par ses opposants internes et par le camp d'Emmanuel Macron de n'avoir pas tout fait pour permettre à l'ex-Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve d'être désigné par le chef de l’État. Et d'avoir de fait permis la désignation d'un Premier ministre de droite, Michel Barnier.

Le bureau national du parti avait en effet refusé de s'engager a priori à ne pas censurer un gouvernement Cazeneuve, provoquant la colère, en interne, de la maire de Paris Anne Hidalgo, de la présidente d'Occitanie Carole Delga, de la maire de Vaulx-en-Velin Hélène Geoffroy ou encore du maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol, tous opposants à Olivier Faure.

Tous y voient la volonté du premier secrétaire, partisan de l'union de la gauche, de ne pas froisser la coalition du Nouveau Front populaire, conclue dans l'urgence aux législatives pour contrer l'extrême droite, et de ne pas s'attirer les foudres de La France insoumise, très hostile à Bernard Cazeneuve.

Car c'est bien l'alliance avec LFI qui est mise en question par les opposants, comme lors de la Nupes, première alliance de gauche conclue en mai 2022. 

Mais pour les partisans d'Olivier Faure, Emmanuel Macron n'avait de toute façon jamais réellement envisagé de nommer Bernard Cazeneuve ou une autre personnalité qui aurait mené une politique de gauche.  

"Cette hypothèse n'existait pas, mais nos opposants sont tombés dans le jeu des macronistes, qui rejettent la responsabilité d'un gouvernement de droite sur la gauche", regrette l'eurodéputé Pierre Jouvet, secrétaire général du parti. 

Le président de la Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel relève aussi qu'il y aurait eu "une petite difficulté" à faire admettre l'option Cazeneuve aux autres partenaires du NFP, alors qu'il n'a pas soutenu l'alliance et a quitté le PS pour marquer sa désapprobation à la Nupes. Olivier Faure lui-même y avait vu "une sorte d'anomalie". 

"Ils ont fait le choix de conforter l'unité du NFP", mais cette séquence va laisser des traces, soutient Nicolas Mayer-Rossignol: "Les gens voient bien que la gauche n'a pas tout fait pour mettre quelqu'un de gauche à Matignon", résume celui qui s'était opposé à Olivier Faure lors du dernier Congrès, à Marseille, en janvier 2023.

Pour l'ancien président de la République et député François Hollande, Emmanuel Macron "ne voulait pas nommer (Bernard Cazeneuve), mais la direction du Parti socialiste lui a donné le prétexte pour ne pas le faire".

Se regarder le nombril

Pour un autre député, Olivier Faure préférait "toute autre option" que Bernard Cazeneuve, y compris le LR Xavier Bertrand ou la très éphémère hypothèse Thierry Beaudet, le président du Conseil économique social et environnemental (CESE), pour éviter de "bouger les équilibres" à gauche et préparer sa candidature à la présidentielle.  

Des critiques qui visent juste à "faire tomber Olivier Faure" et prendre la tête du parti, balaye un "Fauriste". 

Les opposants réclament un congrès en début d'année prochaine. "2025, oui, mais on ne va pas se précipiter", pour ne pas donner l'impression "de se regarder le nombril" en pleine instabilité politique, répond la direction. 

Pierre Jouvet affirme que les partisans du Premier secrétaire restent majoritaire, y compris chez les députés. "Tous ceux qui sont arrivés récemment dans le parti sont sur une ligne unitaire à gauche".

Mais les opposants assurent avoir aussi engrangé des soutiens et fait revenir des mécontents partis après la Nupes. 

Ils remarquent aussi que "ça secoue" au sein du camp Faure, où les députés Philippe Brun et Jérôme Guedj, et le maire de Saint-Ouen Karim Bouamrane ont critiqué la stratégie et le rapport à LFI. 

Olivier Faure sort d'une "séquence électorale réussie", rétorque Pierre Jouvet, avec le doublement du nombre de députés socialistes à l'Assemblée, un rééquilibrage de l'alliance de gauche où LFI est moins hégémonique, et le bon résultat des européennes (14%) autour du leader de Place publique Raphaël Glucksmann, pourtant sur une ligne plus anti-LFI.

"Le PS s'est remonétisé", note auprès de l'AFP le politologue Rémi Lefebvre, mais sur "une ligne de crête: être favorable à l'union, tout en ayant sa propre ligne, plus responsable". 

Pour un autre opposant, qui reste persuadé qu'une alliance avec LFI ne permettra jamais de gagner le pouvoir, "Olivier Faure est adulé par certains et détesté par les autres. Il ne peut apaiser le parti".

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