Au procès du RN, "y a zéro preuve !" soutient Marine Le Pen

Les cours de droit de Marine Le Pen remontent à longtemps mais s'il y a bien quelque chose de "fondamental" dont elle se rappelle, c'est la "présomption d'innocence" jusqu'à "preuve du contraire". Et dans l'affaire des soupçons d'emplois fictifs du RN...

Marine Le Pen (c) arrive au tribunal correctionnel de Paris, le 14 octobre 2024 © Alain JOCARD
Marine Le Pen (c) arrive au tribunal correctionnel de Paris, le 14 octobre 2024 © Alain JOCARD

Les cours de droit de Marine Le Pen remontent à longtemps mais s'il y a bien quelque chose de "fondamental" dont elle se rappelle, c'est la "présomption d'innocence" jusqu'à "preuve du contraire". Et dans l'affaire des soupçons d'emplois fictifs du RN, "y a zéro preuve !", martèle-t-elle à son procès.

La leader du Rassemblement national est à la barre pour le troisième jour de suite - elle est interrogée pour chaque contrat suspect qu'elle a conclu entre 2008 et 2016, pour un montant total de 470.000 euros, lorsqu'elle était députée européenne, à chaque fois après l'assistant parlementaire mis en cause.

Ce mercredi, il s'agit de Guillaume L'Hullier, qui selon l'accusation a été rémunéré sur l'enveloppe européenne de Marine Le Pen alors qu'il était en réalité directeur de cabinet de son père, Jean-Marie Le Pen. 

Le parquet "considère qu'il n'y a pas de preuve" qu'il a bien travaillé pour elle, rappelle la présidente Bénédicte de Perthuis.

Marine Le Pen, tailleur noir, souffle à la barre, insiste sur chaque mot d'un débit lent : "Il a fait, un travail, d'assistant parlementaire".

Puis vite, comme souvent quand les questions se précisent, elle s'agace et change de sujet. "Moi j'ai un problème, Madame la présidente".

La veille, dit-elle, on lui reprochait qu'une autre de ses assistantes parlementaires - sa très proche et cheffe de cabinet dans l'organigramme du parti Catherine Griset - n'habitait pas au bon endroit (à Bruxelles, une obligation de son contrat). Et aujourd'hui, c'est le fait que Guillaume L'Hullier exerçait à "Montretout", son "domicile" à l'époque. 

"Je les mets où mes assistants parlementaires ? Dans le jardin, dans une cahute ?" s'emporte-t-elle, outrée - oubliant de préciser que Montretout était surtout la résidence de son père, où se trouvaient les bureaux des collaborateurs de ce dernier.

Contrairement à la plupart de ses 24 coprévenus qui ont déserté le tribunal après le premier jour d'audience, Marine Le Pen est là en permanence ou presque. 

La vraie question

Jugée pour détournement de fonds publics et risquant notamment une peine d'inéligibilité, elle passe ses audiences à faire des allers-retours entre le banc des prévenus et le strapontin devant son avocat pour lui chuchoter quelque chose, dossiers et feuilles couvertes de post-its sur les genoux.

Mardi soir jusqu'à près de 22 heures - après avoir refait l'audience devant les journalistes à quasiment chaque pause - elle était encore au pupitre à vouloir démontrer que le Parlement européen était en tort sur une régularisation de contrat. 

"Madame le greffier, vous pouvez montrer" tel document à l'écran ? lançait celle qui a été avocate quelques années au début de sa carrière.

Dès qu'elle a la parole, Marine Le Pen fait tout pour la garder. Ainsi que la maîtrise du sujet: contre le Parlement européen, dont le RN est la "bête noire" et qui "a menti" plusieurs fois à l'audience, ou "la mauvaise foi" du parquet. Et surtout expliquer "la politique" - le tribunal lui rappelant souvent que ce n'est pas le sujet.

"La vraie question", esquive-t-elle mercredi encore, "c'est : sur la base de quels indices graves et concordants je suis obligée de répondre ?". "Vous n'êtes pas obligée de répondre", nuance la présidence.

"Pardon mais y a un problème de droit ! C'est à moi de venir prouver mon innocence", s'insurge une fois encore la triple candidate à la présidentielle, estimant que "l'accusation n'apporte aucun élément". "Madame la présidente, mon sentiment... c'est qu'il n'y a zéro preuve, zéro élément probant".

La présidente ne se laisse pas émouvoir, rappelle qu'on est, au moment du procès, au delà du stade des simples "indices". 

Et que "c'est le tribunal qui appréciera s'il y a oui ou non des éléments suffisants", poursuit la magistrate. Quant au "zéro élément probant"... "c'est votre façon de voir les choses".

L'audience reprendra lundi avec d'autres interrogatoires.

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