Agriculteurs cherchent revenus complémentaires
Au Salon international de l'agriculture, les entreprises spécialisées dans l’agrivoltaïsme se présentent comme une source de revenu complémentaire pour les exploitants agricoles et les éleveurs.

Où trouver des compléments de revenus ? Ce 10 février, le tribunal de commerce de Lille Métropole a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire concernant la société Agrikolis. Celle-ci propose la « livraison flexible » de colis encombrants, via 300 fermes relais. Pour ces dernières, cela représente quelques centaines d'euros mensuels de revenu d'appoint. Une autre société, Mon Hangar, fait l'interface entre agriculteurs disposant d'espaces de stockage disponibles et particuliers ou professionnels qui en manquent. En toile de fond de ces initiatives, les difficultés économiques des agriculteurs : plus du tiers d'entre eux estiment que leur revenu n'a cessé de baisser depuis trois à cinq ans, selon l'étude Ipsos, « Agri-Enjeux 2030-2035 » pour le média Reussir Agra (février 2025). Mais selon l'étude, en terme de diversification de leur activité, c'est avant tout la production d'énergie renouvelable qui apparaît comme une voie d'avenir pour les agriculteurs (45% d'entre eux).
Et en face, les offres ne manquent pas. Lors du Salon international de l’agriculture qui s'est tenu à Paris ce mois de février, plusieurs stands étaient consacrés à ces thématiques, et plus particulièrement à l'agrivoltaïsme. Parmi ces stands, celui de CalyWattSol, petite société implanté en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie. « L'énergie est devenue une source de revenu comme une autre dans le monde agricole. Il y a la méthanisation, l'éolien, les panneaux solaires sur les toits des bâtiments...Et depuis trois ans, l'agrivoltaïsme est rentré dans les mentalités. Il y a dix ans, tout cela était très marginal. Aujourd'hui, les agriculteurs nous contactent », témoigne Jean-Philippe Weber, chargé de territoire photovoltaïque et agrivoltaïque dans l'entreprise.
« filet de sécurité » ou spéculation
L' agrivoltaïsme repose sur le principe de l'association de la production agricole et énergétique sur une même parcelle. Il ne s'agit pas seulement pour l'agriculteur (ou l'éleveur) de percevoir un loyer en permettant l'installation d'une infrastructure de production d'énergie sur ses terrains. « Cela modifie sa manière de travailler. Par exemple, ces structures fournissent de l'ombre qui contribue à passer les épisodes de sécheresse », explique Jean-Philippe Weber. Une étude de l'INRAE, Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement, le confirme : sous les panneaux photovoltaïques, la température baisse de 3 à 4 degrés en été et l'humidité augmente de 11%, des conditions qui améliorent la production de matière sèche jusqu'à 30% et augmente la qualité du fourrage. Au total, « les revenus de l'agrivoltaïsme peuvent constituer jusqu'à 20 à 30% du chiffre d'affaires de l'exploitation », avance Jean-Philippe Weber. La part est variable, augmentant les années de mauvaises récoltes. « Il s'agit d'un filet de sécurité. Ces revenus n'ont pas vocation à se substituer à ceux de l'agriculture », précise-t-il.
Le principe est imposé par la loi APER pour l’accélération de la production des énergies renouvelables, adoptée en 2023. Les textes prévoient que la production d'électricité reste « secondaire ». Et des agriculteurs semblent y trouver leur compte : les projets se multiplient. On en compte 200 en exploitation, selon France Agrivoltaïsme, qui représente les acteurs de la filière dont les les agriculteurs, relaye le journal La Croix (25 février). Mais la Confédération Paysanne, syndicat agricole, met en garde. Contre les projets « alibi » en réalité majoritairement tournés vers l'énergie. Et aussi, contre des « loyers » élevés payés aux agriculteurs par les entreprises du secteur énergétique, désireuses d'occuper le terrain, qui risquent de générer la spéculation foncière et empêcher la transmission des terres.