Entretien avec Virginie Raisson-Victor, cofondatrice du mouvement «Le Grand Défi des entreprises pour la planète»

«Agir en coconstruction avec les salariés est indispensable»

Virginie Raisson-Victor, présidente du GIEC Pays de la Loire et cofondatrice du mouvement «Le Grand Défi des entreprises pour la planète», interviendra le 27 octobre de 18h à 20h lors de la conférence inaugurale de la biennale ECOPOSS.

Virginie Raisson Victor. © Christophe Levet
Virginie Raisson Victor. © Christophe Levet
La Gazette Nord - Pas de Calais : Comment les TPE/PME peuvent-elles s'inscrire dans une démarche plus durable?

Virginie Raisson-Victor : Déjà, c'est une question de temps, pour se former et comprendre comment on peut faire évoluer son marché. Mais c'est aussi une question de coût : quel impact cela va avoir sur mon activité, sur le climat, quelle dépendance cela va engendrer, comment rendre utile mon marché... L'Homme a toujours eu du mal à se projeter dans le futur et le système pousse à l'inverse. Et malheureusement, nous sommes face à une échéance qui n'autorise pas beaucoup la lenteur !

Il y a une vraie dissonance cognitive entre la prise de conscience du développement durable et les injonctions d'un système économique qui pousse à produire toujours plus rapidement et à rentabiliser le coût d'un investissement.

Quels conseils pourriez-vous donner à une TPE/PME qui veut s'engager ?

La première démarche d'un entrepreneur est de rejoindre un réseau de dirigeant(e)s pour établir une feuille de route. La prise de conscience est essentielle et l'avantage d'une PME, c'est une plus grande flexibilité de l'actionnariat. Le risque est de voir son modèle changer, la transition n'est pas facile mais le chemin est nécessaire.

Dans le mouvement du «Grand Défi des entreprises pour la planète», vous prévoyez des propositions pour mieux avancer, parmi lesquelles celle de la triple comptabilité. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Il ne faut pas rendre des comptes uniquement sur les éléments financiers ! Il y a aussi le capital humain et le capital écologique, on parle de triple comptabilité. On a trop négligé ces deux derniers depuis une trentaine d'années. Et on le paie aujourd'hui. Les jeunes générations fuient les entreprises non responsables. Il faut réintégrer les schémas économiques dans nos schémas écologiques. Cela passe bien sûr par l'impact carbone, mais aussi par la biodiversité, les conditions de travail et de recherche... Je pense aussi à la participation des salariés à la gouvernance de l'entreprise, à la codéfinition des missions avec les collaborateurs... C'est indispensable pour la longévité de l'entreprise.

Quelle serait la suite ?

Intégrer cette triple comptabilité dans le droit et les pratiques. C'est cette triple comptabilité qui compte. Donner du sens, c'est faire participer ses salariés à la gouvernance de l'entreprise, codéfinir avec eux les missions... Cela demande du temps et des moyens, mais on voit les bénéfices des entreprises qui le font : elles n'ont pas de difficultés de recrutement et leurs marques sont attractives. Oui, il y aura du renoncement mais le changement est possible.