A l'aube à Shanghai, la recherche d'un emploi pour la journée

Le jour vient de se lever dans la banlieue de Shanghai, capitale économique de la Chine, et une dizaine d'hommes brandissent leur carte d'identité pour attirer l'attention de l'employé d'une agence d'intérim, dans l'espoir de décrocher...

Des personnes à la recherche d'un emploi attendent à une bourse du travail informelle sur un trottoir à Shanghai, le 11 juillet 2024 © Hector RETAMAL
Des personnes à la recherche d'un emploi attendent à une bourse du travail informelle sur un trottoir à Shanghai, le 11 juillet 2024 © Hector RETAMAL

Le jour vient de se lever dans la banlieue de Shanghai, capitale économique de la Chine, et une dizaine d'hommes brandissent leur carte d'identité pour attirer l'attention de l'employé d'une agence d'intérim, dans l'espoir de décrocher un emploi, pour douze heures, dans un entrepôt.

"On a besoin de gens forts", clame l'employé, prévenant que la température monte vite dans cet entrepôt, alors que l'été bat son plein.

Jour après jour, des milliers de travailleurs venus des campagnes tentent de décrocher quelques heures de travail dans des usines ou sur des chantiers, des emplois précaires plus difficiles à trouver alors que la deuxième économie mondiale tourne au ralenti.

Venu lui aussi chercher un emploi, Shen Peng, 34 ans, est bredouille depuis dix jours.

"Je veux un travail à l'usine", confie à l'AFP cet homme originaire de la province du Shaanxi (nord), qui dit que pour l'instant, on lui a surtout proposé des emplois très physiques et très mal payés.

Ancien chef dans un restaurant, il s'occupe seul de son enfant: "Sa mère est tombée malade et elle est décédée, donc je me sens redevable (...) je dois trouver quelque chose qui paie plus."

A Shanghai, Shen Peng paie 40 yuans (environ 5 euros) pour une petite chambre avec climatisation dans une pension. Mais il s'estime heureux quand il compare avec d'autres qui partagent une chambre uniquement équipée d'un ventilateur.

N'importe quel travail

Ce n'est pas la première fois que le trentenaire tente sa chance dans la mégapole chinoise: en 2017 déjà il était venu à Shanghai, mais à l'époque il avait l'embarras du choix face aux offres d'emplois, reflet d'une économie chinoise alors florissante.

Shen Peng avait travaillé dans une usine du groupe taïwanais Quanta Computer, gagnant jusqu'à 8.000 yuans par mois (plus de 1.000 euros au taux de l'époque), repas et logement fournis.

Désormais, il se rend bien compte que l'embauche se fait plus sélective.

"Dans le passé, il n'y avait aucune limite, tant que vous connaissiez les 26 lettres de l'alphabet en anglais", se souvient-il. Maintenant, il raconte que les recruteurs refusent les gens qui semblent en surpoids, craignant qu'ils ne soient pas assez en forme pour le travail.

Shen Chunping, venu de la province de l'Anhui (est), a eu plus de chance à l'agence d'intérim de la banlieue de Shanghai: il a décroché un emploi temporaire pour faire la plonge dans un restaurant, pour un salaire journalier de 112 yuans (14 euros).

Un soulagement pour lui, resté sans emploi en mai et en juin.

"Je ne suis pas très grand, je n'ai pas fait beaucoup d'études, je suis juste allé au collège. Donc maintenant je prends n'importe quel travail", explique-t-il à l'AFP.

Plus difficile

"J'ai fait de tout, j'ai livré des colis, j'ai travaillé comme agent de sécurité, j'ai livré des repas, j'ai vraiment fait de tout", ajoute-t-il.

Mais "cette année, il y a plus de gens (qui cherchent du travail) et qui n'arrivent pas à trouver".

A l'extérieur d'un bâtiment fade près d'une agence d'intérim, une centaine de personnes étaient réunies mardi, aux premières heures du jour, pour une bourse aux emplois informelle.

Beaucoup d'entre elles portaient des pelles, espérant que des employeurs les recruteraient immédiatement pour travailler sur des chantiers.

Certains des candidats, arrivés dès 03H00 du matin, discutaient en grignotant du pain grillé vendu dans un stand non loin de là.

"C'est un peu plus difficile cette année, par rapport à l'an dernier, l'expansion de Shanghai a atteint sa limite", raconte Shao Tongfang, venu de la province de l'Anhui pour chercher un travail.

M. Shao parle par expérience: cela fait vingt ans qu'il se cherche un meilleur avenir à Shanghai. Il compte revenir à une vie d'agriculteur, dans sa province natale. "Dans quelques années, quand je ne pourrai plus rester ici."

Venu de la même province, Mei Buqin espère encore décrocher un emploi à Shanghai, car "ce n'est pas dans ma ville natale que je vais le faire".

Alors que le soleil se lève, l'un des heureux élus se rend à son travail d'un jour: sourire aux lèvres, il monte à l'arrière d'un scooter conduit par son nouvel employeur en direction du centre-ville.

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