Wivy, le «Netflix de l’animation» dans les EHPAD

Longtemps, les seniors vivant dans les maisons de retraite ont été laissés de côté, et leur bien-être négligé. Pour remédier à cela, afin d'accompagner et de divertir les personnes âgées résidant dans ces établissements, la start-up Wivy a créé une application pour aider les animateurs dans leurs tâches et redonner le sourire aux résidents.


L'équipe Wivy, avec deux des trois co-fondateurs, Baptiste et Loïc Fruleux (au second plan).
L'équipe Wivy, avec deux des trois co-fondateurs, Baptiste et Loïc Fruleux (au second plan).

Il n’y a pas d’âge pour se divertir et s’évader du quotidien parfois peu amusant des EHPAD, et c’est exactement ce à quoi sert l’application Wivy, créée par trois cousins, Loïc Fruleux, Baptiste Fruleux et Thomas Navarez. C’est ce dernier qui est à l’origine du projet Wivy. En effet, animateur en gérontologie, c’est en montrant à ses deux cousins une animation pour les résidents de son EHPAD à Gap, qu’il avait mis plus de 30 heures à réaliser sur son temps libre - parce que son directeur ne voulait pas qu’il le fasse sur son temps de travail ! -, que l’idée est apparue.

Limpide. «Avec Baptiste on s’est dit, 'c’est génial, pourquoi tu ne le partages pas, car il y a d’autres animateurs qui doivent en avoir besoin'. On s’est donc intéressés au sujet, nous avons fait une étude de marché et on s’est rendu compte que c’était une vraie problématique dans les établissements, qu’il n’existait pas vraiment de support pour les personnes âgées en EHPAD», explique Loïc Fruleux, l’un des cofondateurs.
Ce support est pourtant essentiel à la vie dans les EHPAD et au bien-être des résidents : «Nous sommes dans de l’animation sociale, donc l’objectif, c’est de faire discuter les résidents, les intéresser, les motiver. Ce sont des personnes qui ont des pathologies, des histoires de vie différentes donc, forcément, on ne peut pas simplement aller copier des quiz sur internet.»

L'anecdote pour aider les seniors

Place donc au cœur de l’application : les animations. Depuis le lancement de l’application, leur nombre a fortement augmenté, et plus de 500 sont désormais disponibles. Et elles sont souvent renouvelées par les équipes de Wivy, composées de sept salariés et de deux freelances. Car c’est aussi cela la volonté des fondateurs : proposer du contenu mis à jour le plus souvent possible. «On s’adapte vraiment aux évènements de la semaine, aux mois, aux saisons. Ce renouvellement apporte quelque chose en plus», déclarent les fondateurs. «Nous sommes un peu le Netflix de l’animation en gérontologie», sourient-ils.

Parmi les animations proposées par l’application, on retrouve un juke-box, un journal mensuel, des jeux de mémoire ou de logique, des quiz ou encore des blind-tests. Ces deux derniers sont d’ailleurs des «imbattables» selon Baptiste Fruleux. Pour continuer de faire évoluer le contenu, Wivy collabore avec l’INA, afin d’ajouter des vidéos aux différentes animations.

Comme l’indique Baptiste Fruleux, le plus important dans l’application n’est pas de faire tous les jeux ou d’écouter toutes les chansons, mais de partager un moment entre résidents et  animateurs. «Une des choses les plus importante dans notre application, c’est que derrière chaque question ou jeu, il y a une petite anecdote, qui apporte un complément d’information. En géral, l’animateur va rebondir en demandant : 'Qu’est-ce que vous faisiez madame dans les années 1970 ? Est ce que vous êtes déjà allé voir ce chanteur en concert ?' C’est ce moment-là qui est le plus important. Les questions sont en fait un prétexte. Certains animateurs oublient même l’application et passent beaucoup de temps sur les anecdotes». 

Des animations culturelles

Pour faire évoluer au mieux les animations, la start-up donne la possibilité aux animateurs de noter et de laisser des commentaires après chaque jeu. Ils peuvent faire également des suggestions d’animations et de thématiques, car c’est pour eux que l’application est faite. Pour les familles qui souhaiteraient utiliser cette application, il faudra attendre la déclinaison de Wivy famille, qui est l’un des projets de la société.

Car l’objectif est de mettre les personnes âgées dans les meilleures dispositions grâce à l’application. Et pour ce faire, Wivy est en lien avec l’université de Caen afin d’approfondir les recherches sur ces sujets. «Une chercheuse travaille chez nous, et fait son doctorat en CIFRE. Elle travaille notamment sur l’impact de l’animation sociale sur la capacité de communication des résidents, leur capacité de mémorisation et le maintien de l’identité. Car quand on arrive en EHPAD, on a un peu tendance à perdre son identité et devenir un patient. L’animation sociale a un rôle majeur pour éviter cela, ou en tout cas adoucir ce passage en institution, qui est souvent difficile à vivre», souligne Loïc Fruleux.

Ce travail de recherche scientifique plaît aux EHPAD puisqu’en France métropolitaine, 898 résidences ont pris l’abonnement annuel, et 96% des clients le renouvelle, ce qui rend fiers les fondateurs. Ces derniers souhaitent encore gagner des parts de marché en France, et ont déjà commencé à s’exporter avec «un client en Suisse et cinq en Belgique». Mais le concept n’est pas simple à exporter en langue étrangère : «L’application est très culturelle, donc on ne peut pas simplement se permettre de traduire l’animation en allemand et en anglais par exemple, il faut tout refaire entièrement», déclarent-ils. Trop complexe pour le moment, mais l’idée reste dans les cartons.