Vilogia, de plus en plus opérateur urbain
La croissance est au rendez-vous chez Vilogia qui, en 2015, a investi 400 M€ et livré 1 823 logements . Implanté dans 7 métropoles, il loge 135 000 personnes. Issu du monde de l'entreprise et de plus en plus présent dans les zones de tension, ce groupe d’immobilier social privilégie complémentairement ses relations avec les entreprises, dont il loge les salariés, et avec les collectivités locales, qui apprécient sa polyvalence. Opérateur logement historiquement, il devient de plus en plus opérateur urbain.
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«Notre objectif, c’est le logement des salariés les plus modestes», et il y a toujours de quoi faire à entendre Jean-Pierre Guillon, président du groupe Vilogia, brosser en quelques mots son évolution, depuis la création à Roubaix-Tourcoing du “1% Logement” (devenu “Action logement”) jusqu’à l’octroi en 1996 d’une compétence nationale. Son patrimoine de 45 000 logements en métropole lilloise en fait certes la plus forte présence d’un organisme de logement social sur une grande métropole en France, mais le groupe totalise aujourd’hui un ensemble de plus de 65 000 logements. «Nous avons choisi d’être présent sur les zones de tension, là où il y a un besoin criant de logements sociaux, là où l’économie se déplace, bouge, là où se manifestent des phénomènes d’attractivité très forte», explique l’ancien président du Medef régional. Et c’est ainsi qu’un premier cap de 10 000 logements sera franchi dans les prochains mois en Ile-de-France et un second le sera sur Nantes, Bordeaux, Marseille, Strasbourg, Lyon…
Interlocuteur des entreprises et des collectivités locales. Pour accompagner cette importante croissance, le groupe a ainsi structuré cette année une coopérative HLM rassemblant 25 collaborateurs − Vilogia Premium −, pour opérer un développement sur les métiers liés à l’accession, la vente de patrimoine à des particuliers et à la copropriété sur lesquels il devient très opérationnel. Résultat, «nous allons finir l’année avec 2 000 nouveaux logements et autant de mises en chantier, se félicite Jean-Pierre Guillon. Notre rythme de construction, c’est de 1 800 à 2 000 logements par an».
«De ce fait, précise-t-il, nous sommes aujourd’hui les interlocuteurs des entreprises par rapport à leurs besoins visant leurs propres salariés et des collectivités locales pour les aider dans leurs problèmes d’aménagement. D’opérateur logement, nous devenons opérateur urbain, en ce sens que de plus en plus nous participons aux projets des collectivités locales sur des projets de création ou de réhabilitation de quartiers dans lesquels nous sommes interpellé sur une vision plus large que le logement, une vision qui intègre la complexité de la société, avec les problématiques de transport et d’emploi, et permet de les comprendre.» (Lire encadré ci-après)
Une filiation entrepreneuriale revendiquée. SA d’HLM appartenant au monde patronal, filiale de l’IRD via sa sous-holding CMI, Vilogia participe de ses valeurs. «Notre actionnariat, c’est bien le monde patronal, le monde des entreprises autour d’Entreprises et Cités, indique Philippe Rémignon, directeur général du groupe. Au-delà de son caractère HLM, nous entendons bien lui donner une valeur entrepreneuriale. Depuis dix/douze ans, nous avons des caractéristiques très liées au monde des entreprises, particulièrement dans leur facette développement. Les besoins de logements sociaux sont évidents et il serait irresponsable de ne pas se développer. Nous l’avons fait en montrant aux entrepreneurs que, même dans un monde aussi contraint que le monde HLM, il est possible de se développer au cœur des zones tendues.»
Quelques chiffres illustrent cette osmose entrepreneuriale. Ainsi, le taux de production de Vilogia, c’est-à-dire le pourcentage de constructions neuves sur le patrimoine, était de 0,4% à l’époque Logicil en 2002 pour un parc de 28 000 logements ; aujourd’hui, il est de 3,2% sur un parc de 58 000 logements (données 2014) alors que la moyenne régionale est de 1,8% et nationale, de 2,4%. Sa capacité d’autofinancement nette est passée de 11 M€ en 2003 à 42 M€ en 2014, ce qui représente 16% des loyers perçus contre 12% pour la moyenne nationale des SA d’HLM : «Nous pouvons continuer à nous développer tout en maintenant de bons ratios…» Le groupe ,qui investissait 55 M€ dans le bâtiment et les services en 2002, a investi 400 M€ en 2015. «Le logement, c’est aussi tout un système économique en développement. De 85 000 personnes logées en 2004 au sein de notre parc, nous sommes passés à 135 000, soit une augmentation de 60%. Depuis 2011, nous avons logé 11 000 familles de salariés supplémentaires. Depuis 2003, nous avons accompagné 3 345 ménages tant en accession sociale en construction neuve, pour un coût de 130 à 140 000€, qu’en vente de patrimoine pour un montant moyen de 80 000€.»
«Vilogia est une société qui colle aux besoins et au dynamisme des entrepreneurs. Ils ont besoin qu’on loge leurs salariés dans de bonnes conditions. Ils n’en sont que plus efficaces, plus satisfaits et subissent moins de pression… Notre développement est uniquement focalisé sur les besoins des salariés.» Chacun s’y retrouve : salariés, entrepreneurs, collectivités !
ENCADRE
Interactions logement/travail/transport chez les salariés en métropole lilloise
Le logement prime sur l’emploi et les transports. Des trois critères que sont le logement, le travail et le transport, lequel prime pour les salariés de la Métropole ? Le bailleur social Vilogia leur a posé la question. Réponse : le logement. Une bonne nouvelle pour ce bailleur social conforté ainsi dans sa stratégie et une donnée à intégrer par les entreprises dans leur politique sociale.
A ses actionnaires représentés par quelque 180 chefs d’entreprise, réunis début juin au siège du bailleur en présence du président du Conseil régional, Xavier Bertrand, Vilogia a présenté les résultats d’une enquête qu’il a fait réaliser par l’institut d’études lillois “Règle de trois” pour identifier l’approche des salariés de la Métropole vis-à-vis du triptyque logement/emploi/transport. Une bonne façon d’interpeller soi-même et son environnement, actionnaires entrepreneurs, collectivités…, sur les locataires leurs raisonnements, leurs arbitrages, leurs concessions, etc., avec l’objectif de «répondre encore mieux à leurs problèmes et de satisfaire au maximum leurs besoins». Comme le dit Philippe Rémignon, «notre dynamique de développement mise au service du monde économique doit aussi rentrer dans l’équation compliquée que vivent les salariés entre leur contrat de travail, leur logement et leur temps de transport». Ce sont ainsi 711 ménages salariés habitants du territoire (SCoT) de la métropole lilloise et représentatifs en termes de CSP et d’habitat qui ont été interrogés par téléphone entre le 9 et le 23 mai 2016.
L’état des lieux. «Sans surprise», les trois critères prioritaires dans le choix du logement sont dans l’ordre sa qualité et ses caractéristiques, son coût et son cadre de vie (commune ou quartier), la proximité avec le lieu de travail étant secondaire. Les salariés sont globalement très satisfaits de leur logement actuel, même si c’est sur la qualité du logement qu’ils ont dû faire le plus de concessions.
Emploi et transport. 85% des salariés interrogés travaillent sur le territoire de la MEL. Ils consacrent 22 minutes en moyenne en trajet domicile/travail comme la moyenne des Français (23 minutes), même si des disparités existent entre 17 minutes dans la Couronne Sud et 32 minutes dans le territoire de la Lys. A 74%, c’est la voiture qui est le moyen de transport utilisé pour une durée de 21 minutes, devant les transports en commun (25% et 31 minutes), surtout sur les secteurs centraux de la Métropole. A 56%, ils estiment qu’il est difficile de changer de lieu de travail sans augmenter son temps de trajet.
Leurs projets. 6 répondants sur 10 estiment qu’il est difficile de se loger en métropole lilloise, en particulier (à 75%) les locataires du secteur social pour deux raisons majeures : le prix et l’offre de logement. 38% ont le projet de déménager à court ou moyen terme, en particulier les locataires (59%) et les jeunes de moins de 35 ans (52%), populations qui habitent aujourd’hui sur le centre de l’agglomération. Les propriétaires, souvent en périphérie, sont très ancrés dans leur logement, quand les locataires, beaucoup plus lillois, se positionnent sur le souhait de déménagement.
Logement, emploi et transport. A 58%, mais prioritairement les plus de 50 ans, les propriétaires et les CSP+ privilégient un emploi plus proche de leur logement que l’inverse, alors qu’à 48%, avant tout les locataires tant HLM que privé, ouvriers et CSP- privilégient un logement proche de leur lieu de travail. A considérer les concessions qu’ils sont prêts à consentir : 55% les accepteraient sur l’emploi pour de meilleures conditions de logement, contre 45% à l’inverse, et 64% sur le temps de transport pour un meilleur emploi, contre 36% sur l’emploi pour améliorer le temps de transport. Il est à noter que cette tolérance à l’allongement du temps de transport est limitée. S’ils sont 71% à accepter un allongement de 15 minutes pour un emploi meilleur, ils ne sont plus que 42% si le temps supplémentaire passé dans les transports atteint 30 minutes de plus et seulement 18% s’il atteint 45 minutes de plus.
En conclusion, analyse Marianne Pichon, directrice de la performance globale chez Voligia, «le triptyque logement/travail/transport en métropole lilloise est un mécanisme complexe, mais très largement influencé par le logement qui prime dans les priorités de choix, même au regard d’un meilleur emploi. Il y a davantage de tolérance en termes de temps de transport, mais l’élasticité sur son augmentation est assez faible. Emploi et transport : les salariés sont prêts à des concessions pour autant qu’elles améliorent le cadre de vie. Sinon, dans leurs choix ils placent en premier le logement, en deuxième l’emploi et enfin le transport. Même dans un cadre économique tendu comme aujourd’hui, cette priorité au logement est très fortement ancrée, tout en sachant que le logement est la première dépense au budget des salariés».
Si Philippe Rémignon fait le constat d’un repli sur le logement depuis le début de la crise en 2008, avec le développement du cocooning au détriment de la mobilité professionnelle, il dit «très motivante (pour Vilogia) la priorité (à donner au fait de) détendre l’accès au logement qui sera un facteur de mobilité». «Plus vous allez faciliter la capacité à se loger normalement, plus il y aura une positivité sur l’autre facteur. Notre stratégie de focalisation sur l’accès au logement, sur une meilleure qualité de logement et sur un meilleur environnement en sort renforcée”, explique-t-il, en défendant en direction des élus, des entrepreneurs, des organisations syndicales (raisonnement qui s’articule autour du constat d’une double crise) «celle d’une insuffisance d’offre dans les métropoles et celle d’un excédent d’offre qui se traduit par une explosion de la vacance dans les villes moyennes. C’est en intégrant ce constat que nous pouvons nous adapter aux spécificités de chaque territoire».
A l’adresse des entreprises, Jean-Pierre Guillon recommande d’intégrer la problématique logement dans leur politique sociale au lieu de penser qu’emploi et logement sont deux choses qui n’ont rien à voir l’une avec l’autre, qui sortent du périmètre de l’entreprise. Moins il y a de tension sur le logement, plus il y aura une chance de mobilité.
ENCADRE
Les chiffres 2015 de Vilogia
− 3 métiers : bailleur, constructeur et aménageur
− 65 000 logements en patrimoine, dont 45 000 en métropole lilloise
− 382,7 M€ de chiffre d’affaires (341,9 M€ en 2014)
− 949 collaborateurs
− 286 marchés attribués
− 390 M€ investis, dont 313 M€ en construction et 77 M€ en réhabilitation, gros entretien et entretien courant
− 7 territoires d’implantation : Lille Métropole, Paris Métropole, Grand-Sud (Marseille), Bordeaux Métropole, Grand-Est (Nancy-Metz, Strasbourg), Lyon Métropole et Nantes Métropole
− 5 sociétés spécialisées dans le domaine du logement : Vilogia SA, Vilogia Premium, LogiFIM Groupe Vilogia1, Vilogia Maison familiale lorraine, SEMI Blanquefort.
− 135 000 personnes logées, dont 92 000 en métropole lilloise, à 63% des salariés et à 20% des retraités
− 1 823 logements neufs livrés, dont 318 en accession à la propriété et 664 en métropole lilloise
− 950 logements réhabilités, dont 837 en métropole lilloise pour 58 M€
− 2 000 constructions lancées, dont 174 en accession et 558 en métropole lilloise
− 16 projets de rénovation urbaine
1. ESH à Armentières, partenaire de Vilogia depuis 2013, officiellement intégrée en 2016 et se spécialisant dans la gestion immobilière et le développement de l’offre locative en Hauts-de-France, hors métropole lilloise, 3 511 logements locatifs, 8 700 personnes logées, près de 50 logements neufs livrés.