Politique de la ville
"Verdun est la locomotive de la Meuse”
En poste depuis dix ans, Samuel Hazard a la volonté de briguer un troisième mandat pour conduire à terme ses projets. Cet amoureux de Verdun passera ensuite la main avec la fierté d’avoir pu changer l’image de cette ville sous-préfecture, devenue le moteur de la Meuse.
Les Tablettes Lorraines: Certains vous surnomment le maire de la requalification, vous qui êtes élu depuis dix ans. Qu’est-ce que ça dit de votre action et de l’attractivité de la ville de Verdun ?
Samuel Hazard: Moi je peux vous dire qu’en arrivant aux responsabilités en 2014 étant enfant de Verdun et aspirant à être maire depuis l’âge de huit ans, j’ai souhaité créer une dynamique et démontrer aux investisseurs que j’ai fait venir au début de mon mandat, qu’il fallait investir ici. Verdun est une ville à taille humaine, où il fait bon vivre avec une qualité de vie et un cadre de vie exceptionnels. Je peux vous assurer qu’en 2014, j’ai prêché dans le désert. L’image de la ville était très mauvaise, sur tous les plans. Dix ans après, force est de constater que le travail partenarial avec l’ensemble des acteurs paie. C’est vrai que lorsque je suis arrivé, Verdun avait subi d’importantes restructurations militaires avec par exemple le départ en 1995 de Miribel du 3e régiment d’artillerie de Marine (RAMA) et 1 200 militaires en moins et aujourd’hui, c’est une nouvelle crèche, la résidence sociale des jeunes travailleurs et demain ce sera au total 300 nouveaux logements et 60 millions d’investissements dont
48 millions d’euros portés par le privé.
Il y a dix ans, c’était impossible.
Mais alors que s’est-il passé en dix ans ?
J’ai pris mon bâton de pèlerin, je suis allé voir les investisseurs et je leur ai «vendu», du moins j’ai essayé de démontrer que Verdun a tous les atouts pour répondre aux enjeux et exigences du 21e siècle en matière de durabilité, de centralité, de proximité et de bien-vivre ensemble. Et au fur et à mesure, l’image a évolué. J’ai voulu porter un message de pragmatisme que la puissance publique ne peut travailler qu’avec la puissance privée, ce n’est qu’ensemble qu’on peut réussir. À plusieurs reprises, j’ai même fait modifier les documents d’urbanisme pour permettre à des projets privés qui me semblaient pertinents pour la ville d’aboutir. C’est le cas de la Pointe Meuse avec les anciens garages Rochette en face du théâtre. Mon prédécesseur n’en voulait pas. Il y a eu vingt ans de procédures mais aujourd’hui, ce sont des appartements de standing et un investissement de huit millions d’euros. Le privé ne peut conforter qu’une vision et une ambition. Je pourrais prendre d’autres exemples. Je suis arrivé en 2014, c’était un vrai fléau avec des fermetures en chaîne : Banque de France, Monoprix, librairie Ducher, Le mess des Officiers, le Coq Hardi, Le Cotton Club tout était fermé. Et aujourd’hui ? On a porté et impulsé des projets financés par une foncière privée de 7 millions d’euros. Vous prenez la Librairie Ducher, on a trouvé un libraire indépendant avec des commerces au rez-de-chaussée. Au Coq Hardi, les travaux sont en cours avec une belle brasserie bistronomique, des appartements et dix chambres d’hôtel. Quant au Mess des officiers, c’était mon premier projet avec une procédure de cession. Je voulais absolument un hôtel 4 étoiles car Verdun est une ville touristique mais il n’y avait pas d’offre de ce niveau. Un investissement de
8 millions d’euros a donc été engagé et l’établissement fonctionne bien.
Est-ce que vous récoltez aujourd’hui ce que vous avez semé pendant dix ans ?
Bien sûr. Les investisseurs privés ont besoin que le maire soit là pour faciliter les démarches administratives. La ville a mis des aides directes de 5 000 euros. C’est important pour des petits commerces. Pour les plus gros projets, on vient autour de la table avec le GIP, le département ou encore la région. Les investisseurs ont besoin d’être respectés et considérés.
La rénovation prend du temps avec des hauts et des bas. Pouvez-vous en témoigner ?
Tout à fait. Prenons les projets emblématiques comme la médiathèque de l’hôtel des sociétés et de la crèche dans le quartier Miribel, ces deux chantiers se sont soldés par deux ans de retard avec toutes les contraintes rencontrées. Malgré tout, on arrive à livrer enfin ces deux beaux projets. Si j’avais été résigné, je n’aurais jamais réussi. Le théâtre a été un échec personnel, car notre
procédure a été mise en cause. L’échec et le retard sont inhérents de l’action, il faut avoir l’humilité de le reconnaître. On a relancé ce beau projet. Le théâtre sera restauré. Je reste déterminé.
Vous êtes sur le point de lancer un projet d’ampleur autour du patrimoine et de l’architecture, quel est votre message ?
La requalification du cœur historique de la ville s’inscrit dans un projet conduit depuis dix ans avec l’obtention récente du label Pays d’art et d’histoire. Nous sommes ici patrimoine remarquable. On réduit trop facilement Verdun à 1916 mais Verdun, c’est 2000 ans d’histoire. C’est un projet de 17 millions d’euros sur six ans. La première tranche va enfin débuter avec pour financeurs : l’État, la région, et le département pour un peu moins de deux millions d’euros dont 70 % de subventions. C’est un projet durable où on va réduire de manière forte l’empreinte de la voiture qui pollue le patrimoine de la Cité. Moi ce que je veux, c’est un vrai espace de mixité sociale, intergénérationnelle, de la mobilité douce et du bien vivre ensemble où on met en lumière le patrimoine. Ce projet va entrer en concomitance avec les travaux de la Citadelle Haute que l’on porte avec l’établissement public foncier du Grand Est. Sur ces 17 hectares, on va aménager des cheminements pédestres sécurisés où la population va pouvoir se retrouver et se réapproprier l’histoire. Il va y avoir des animaux, de la médiation culturelle, des expositions, du sport pour contribuer à une économie touristique. Le tourisme de mémoire et historique est conforté par ce tourisme culturel. Les visiteurs viennent à Verdun d’abord pour le grand Festival, pour le trail des tranchées ou d’autres manifestations. Le tourisme de mémoire n’est plus le seul. J’en suis fier car ça contribue à changer l’image de la ville. Je le revendique, Verdun est la locomotive de la Meuse et les villages environnants profitent de notre dynamique.
Vous venez de signer le contrat de ville 2024-2030 avec quel objectif ?
L’enjeu central est de rappeler le bien-vivre ensemble. C’est la priorité. Avec tous les acteurs de la ville, nous avons considérablement amélioré les conditions de vie des habitants dans les différents quartiers de la ville, même si je ne nie pas les difficultés et les problèmes. Nous venons d’ailleurs d’inaugurer peut-être le plus beau centre social de France, La Cascade Anthouard Pré l’Évêque. L’OPH va investir plus de 40 millions d’euros dans la rénovation. La première richesse d’un territoire,
ce sont ses habitants. Et moi, je connais 90 % des habitants de la ville.
Propos recueillis par A.M.
Une dynamique industrielle
«Perard, Lactalis, Paprec, Indorama Ventures, CORDM, Berni… toutes ces entreprises investissent à Verdun et créent de l’emploi. Je pourrais ajouter Terréa, qui va créer un centre de formation et va s’étendre. On compte actuellement 450 offres d’emploi non pourvues selon France Travail sur notre territoire. Il y a un écosystème favorable à l’investissement ici.»