Une révolution nécessaire ?
La lecture de L'économie qu'on aime ! fait plutôt du bien. Paru au printemps dernier aux éditions Rue de l'Echiquier, le petit ouvrage est signé par trois enseignants diplômés de l'ESSEC : Amandine Barthélemy, Sophie Keller et Romain Slitine.
L’économie qu’on aime !, essai «positif» sur l’économie telle qu’elle peut être, se veut un remède contre la sinistrose qui touche ce qui concerne l’économie : crises répétitives depuis 2008, chômage récurrent, élections “décevantes” ont en effet rendu les Français moroses. Cet essai d’une centaine de pages tente de leur redonner le moral en prenant le pari (presque un poncif aujourd’hui) de changer de recettes et d’«explorer de nouvelles pratiques». Les trois auteurs l’affirment : «La bonne nouvelle, c’est que des solutions existent. Mieux, elles fonctionnent !» Loin de toute idéologie, ce guide souhaite offrir une nouvelle vision de l’entreprise qui ne doit rien à une quelconque innovation et qui place le processus décisionnel au centre de sa stratégie. A cet égard, le cas de Bosch est édifiant et cloue le bec à ceux qui pensent que marginalité et échec guettent ceux qui veulent tout partager.
Une fondation qui réinvestit 99% de ses profits… Quand il crée son entreprise en 1886, Robert Bosch met en place une gestion originale : «L’entreprise a pris la forme d’une fondation d’utilité publique assurant chaque année un réinvestissement de 99% des profits réalisés en son sein. Quatre milliards d’euros sont consacrés par an à la recherche et au développement ; 16 brevets sont déposés chaque jour, conférant à l’entreprise une formidable capacité d’innovation sur les marchés technologiques et concurrentiels qui sont les siens.» De fait, Bosch pèse aujourd’hui 50 milliards d’euros de chiffre d’affaires et emploie 300 000 personnes dans 135 pays. Le «small is beautifull» n’est pas le périmètre adéquat pour réduire ce type de modèle. L’entreprise n’est plus une fin mais un simple moyen. C’est cet aspect quasi philosophique qui marque la lecture du livre. La croissance auto-centrée n’a pas d’objet. Le sens donné à la croissance n’est plus financier (même si le résultat net reste évidemment la condition sine qua non de toute prise de risque). La problématique de la décroissance n’est qu’un leurre. Le débat porte essentiellement sur l’emploi, l’enracinement territorial de la production de richesses, la coopération plutôt que la concurrence, et «dessine la société de demain». Et les auteurs de conclure : «Il faut croire à l’efficacité des entreprises qui mobilisent les territoires, à l’esprit d’initiative dans un espace de démocratie et d’intérêt collectif. Il faut exiger de nos coopérations la construction d’une place pour chacun dans les échanges économiques, ceci doit être le minimum de nos ambitions collectives.» A mettre dans toutes les mains !