Une réponse au défi du financement du Made in France
Pour apporter des financements aux industriels du Made in France, Crystal, gestionnaire de patrimoine et FFI, Forces françaises de l'industrie, se sont associés pour créer un fonds d'investissement. Bpifrance, la banque publique d'investissement apporte sa garantie.
C'est l'une des faiblesses souvent pointées de l'économie française. «La France est un grand pays d'épargne(...) Mais quasiment rien ne va dans nos entreprises, ETI et PME», explique Bruno Narchal, fondateur et président de Crystal, acteur majeur de la gestion de patrimoine en France (près de 22 milliards d'euros d'actifs conseillés).
Le 18 juin, à Bercy, il annonçait la création du fonds FFI Croissance, un FPCI, Fonds professionnel de capital investissement, aux côtés de représentants des FFI, Forces Françaises de l'Industrie. Ces dernières réunissent des industriels qui misent sur le Made in France (MIF) depuis 2019. «Ce fonds FFI Croissance va prendre des participations dans des entreprises dont le chiffre d'affaires se situe entre 2,5 et 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, à thématique industrielle et qui ont déjà atteint un équilibre financier», a précisé Bruno Narchal, devant un auditoire de quelque 200 industriels et financiers.
Crystal prévoit de recueillir 50 millions d'euros sur les douze mois qui viennent pour nourrir ce nouveau fonds. «Il nous fallait un vrai professionnel de la finance pour passer à une échelle supérieure», commente Laurent Moisson, l’un des fondateurs de FFI qui mobilisaient déjà leur réseau pour réaliser des investissements dans des entreprises industrielles.
À présent, les FFI participeront à l'identification des entreprises potentiellement concernées par le fonds distribué par Crystal et au comité de sélection. Le fabricant de jeans 1083, l'une des entreprises iconiques du MIF, sera-t-elle parmi les premières à bénéficier de ces investissements ? «Nous avons des fonds d'investissements classiques qui veulent miser sur nous : ils parient sur la valeur que va prendre l'entreprise, et non sur la richesse que nous allons créer ; cela ne nous intéresse pas», est venu témoigner Thomas Huriez fondateur de la marque il y a 11 ans.
Un capital patient pour des projets de long terme
Aujourd'hui, son entreprise a franchi la barre des 12 millions d’euros de chiffre d'affaires. Pour Thomas Huriez, nul doute n'est permis : avec un marché français de 67 millions de jeans par an dont moins de 1% sont MIF, «le potentiel est énorme».
Mais pour ses projets d'avenir, il a besoin d'un capital patient : il souhaite implanter des petites usines dans les territoires, à la fois lieux de fabrication et d’inspiration pour la clientèle locale. «Nous n'avons pas les moyens de raconter nos histoires par la publicité. Nous sommes notre meilleur média et cela engendre un modèle de développement différent. Si nous réalisons une très grosse usine dans la Drôme avec 500 salariés, nous aurons deux problèmes : nous allons épuiser le bassin d'emplois. Et nous allons engager peu de consommateurs vu que seuls les habitants de la région se sentiront concernés», explique Thomas Huriez.
Côté investisseurs, le fonds FFI Croissance sera proposé à une «clientèle avertie», précise Bruno Narchal. Il s'agit d'investissements à long terme à hauteur de 100 000 euros. Leur risque en capital est limité par la garantie apportée par Bpifrance, la banque publique d'investissement : 70% de la somme investie durant les trois premières années, puis 50%. Autre caractéristique de ce dispositif : il est éligible au dispositif de réinvestissement dans le cadre d'une cession d'entreprise, avec une exonération des plus-values sur le long terme. «Je serai ravi d'être le premier souscripteur», a déclaré Philippe Rivière, lors de la présentation du fonds. Cet entrepreneur a fondé, il y a cinq ans, le groupe industriel ACI Groupe, qui réalise aujourd'hui 200 millions d'euros de chiffre d'affaires. Il est déjà engagé dans le financement de petites entreprises.