Une intercommunalitédans la tourmente économique

L’agglo vit des heures intenses. Les menaces sont nombreuses qui risquent d’affaiblir son potentiel économique et financier, à commencer par Sevelnord PSA Citroën, menacé de fermeture d’ici deux ans. Le président de la CAPH a donc choisi de médiatiser les dossiers chauds, de mobiliser chez lui et au-delà et, en tout cas, de se battre.

Sevelnord1, trois syllabes qui sentent le soufre depuis que les syndicats du site PSA Citroën d’Hordain ont fait état de l’intention voilée de la direction du groupe de fermer l’usine, ce que celle-ci conteste. Mais à la CAPH on prend l’éventualité au sérieux et l’argumentaire s’appuie sur des faits qui, eux, ne sont pas contestés. Il y a tout d’abord la fin du partenariat avec Fiat, à l’horizon 2017, qui fait conjecturer certains. Puis les diminutions de personnels, elles, plus réelles : de 6 000, chiffre de départ, on passe aujourd’hui à 2 500 personnes et dans la presse économique nationale, on évoque un chiffre global mais non officiel de -10% des effectifs globaux du groupe en France. Depuis 2008, 1 600 suppressions ont déjà été opérées et le groupe déclare le 1er septembre sur son site Internet investir en Inde 650 M€ pour y construire une usine ultramoderne employant 5 000 personnes qui seront formées pour produire 170 000 voitures l’an. Par ailleurs, le site d’Hordain a réduit progressivement sa production (en fait il s’agit d’assemblage), de 169 000 unités en 2003 à 90 000 en 2010 (16 millions en 16 ans).

Des transferts en périphérie. Ces mouvements répondant à la demande de meilleure rentabilité du groupe s’accom-pagnent de bruits persistants, confirmés dans le Douaisis, de préparation de transfert géographique de l’équipementier Faurécia d’Hordain et Brebières (près d’Arras), soit 700 personnes, vers le site de Flers-en-Escrebieux, tandis que PSA a vendu ou serait en train de vendre de l’immobilier au groupe Mulliez. Immobilier qui héberge une autre unité de Faurécia, elle aussi menacée selon la CAPH qui pense que l’activité serait alors transférée à un concurrent direct, Vistéon, à Gondecourt (banlieue sud de Lille). Enfin, en face des aides publiques accordées à PSA Citroën Hordain (25,5 M€ par la Région et 14,3 par l’Etat) au gré des nouvelles productions, un aménagement du réseau routier par les collectivités territoriales du secteur (Sevelnord est à cheval sur la CAPH, le Douaisis et le Cambrésis), une zone industrielle fournisseurs par la CAPH, un giratoire d’1 M€ en projet conjointement avec les élus du Cambrésis –, la CAPH dévoile les bénéfices du groupe PSA Citroën. Le président du directoire, Philippe Varin, expliquait effectivement dans un grand quotidien parisien, le 1er septembre, que 806 M€ avaient été dégagés en 2010 (+18,5%), que la dette avait été ramenée à 1,6 milliard d’euros et que 11 milliards d’euros étaient en réservesécurité financière. La CAPH, qui compare déjà cette éventuelle fermeture à celle d’Usinor Denain, a créé un “comité de vigilance” et va multiplier les réunions publiques, tentant de mobiliser aussi sur le Cambrésis, le Quercitain et le Douaisis.

L’établissement thermal de Saint-Amand-les-Eaux. L’interminable saga semble enfin trouver un terme. “On est à la croisée des chemins, sourit d’ailleurs le président de la CAPH. Le Département ouvre enfin le portemonnaie !” Situé dans le parc de l’ancien casino de Saint-Amand-les-Eaux, cet imposant hôtel thermal est classé et, au fil des années, s’est fortement dégradé, ne conservant en termes de validité qu’une façade blanche à deux étages. Depuis longtemps, les élus de l’Amandinois demandent au Conseil général de trouver une solution, en l’occurrence une vente à un porteur de projet puisque la Ville et la CAPH sont engagées dans une revitalisation du patrimoine et du thermalisme, principale source locale de rentrées financières, porteur d’emplois locaux, entraînant à son tour le gonflement de l’offre hôtelière si précieuse pour des curistes en nombre croissant (4 000 par an alors que la ville italienne jumelée en accueille sans problème 60 000 !), qui sont souvent dans l’obligation de loger sur Lille. Depuis 40 ans, les travaux effectués par le Département concernaient la seule toiture. Le reste est d’origine, jamais les candidats au rachat, dont le groupe Partouche, propriétaire du casino et du Pasino,n’ont pu décider le Département à vendre. Mais le nouveau président, Patrick Kanner, veut solder le dossier via un appel d’offres cadré. Mais “il faudra un beau projet, surtout pas uniquement financier, prévient Alain Bocquet, sinon le thermalisme sera fini ici, on ne s’en remettra pas”. Il prend pour exemple récent une démarche qu’il qualifie de spéculative à Plombières où l’activité thermale aurait chuté de facto, au bout de quelques mois, de -6%.

Une reprise… épineuse ! La Ville et la CAPH s’emparent du dossier et menacent de préempter si le repreneur choisi par le Département ne s’engage pas, dans une sorte de charte, à prendre soin de l’emploi et du patrimoine local et tout bêtement du… thermalisme. Saint-Amand et la CAPH ont obtenu d’être les “meneurs” du dossier dans le nouveau cahier des charges auquel elles ont apporté 30 amendements, avec pour mission de “ne plus laisser faire la spéculation et les milliardaires moscovites ou qataris… Je suis d’une vigilance de Sioux” ! Le président- maire brandit la menace de la préemption et déclare sans ambages souhaiter l’arrivée d’un grand groupe, citant par exemple celui de la Chaîne thermale du soleil de Mme Guérard, épouse du célébrissime cuisinier Michel Guérard, d’Eugénie-les-Bains. Les candidats, dont cette chaîne, avanceront les prix des Domaines, soit 3,5 M€. Mais, prévient Alain Bocquet, “le Conseil général a ouvert la boîte de Pandore, peut-être faudra-t-il au repreneur débourser quelques dizaines de milliers d’euros de plus, tant l’immeuble est vétuste. L’acheteur se mettra un oursin dans la poche !”. En fin d’année, des projets définitifs seront déposés, la Ville et la CAPH choisiront.