Une cession douce débouchant sur une extension et la diversi
Reprise sans histoire de Best Environnement par Philippe Lebon qui reste dans un métier proche de son métier d’origine, la fabrication d’équipements de protections individuelles et collectives pour le secteur du désamiantage. Mais l’usine de Lambres en profite pour se tourner vers de nouveaux marchés et s’attaque aussi à la dépollution en général.
Si cette cession peutêtre qualifiée sur le plan juridique de “sans histoire”, fluide même, elle n’en a pas moins été émaillée d’évènements rares qui auraient pu à un certain moment interrompre le processus. Mais elle reste exemplaire à bien des égards, en raison du professionnalisme permanent qui y a présidé.
Quels sont votre formation et votre parcours professionnel avant cette reprise ?
Après une formation de juriste en Droit des Affaires notamment, je suis entré dans la société familiale créée par mon père. Au sein de cette entreprise qui a connu un fort développement, j’ai occupé différents postes pendant plusieurs années avant d’en assumer la présidence et jen suis parti volontairement fin 2009. J’ai tout appris dans cette entreprise d’une trentaine de personnes qui est toujours présente en Asie et en Europe, dans un créneau d’activités que je connais bien. Je voulais donner un nouvel élan à ma vie professionnelle et agir seul. Je suis alors devenu directeur général d’un important groupe régional dédié à l’industrie du levage. Mais voyant qu’il était impossible d’en devenir actionnaire, je me suis à nouveau libéré et c’est ensuite, alors que je cherchais une nouvelle activité industrielle et que j’étais décidé à m’en donner le temps, que j’ai eu l’opportunité de rencontrer Christopher John Elliott en septembre 2010, qui avait fondé Best et l’avait établi à Saint- Laurent-Blangy.
Quel a été le facteur déclenchant votre volonté de reprendre une entreprise ?
Je n’étais absolument pas fixé sur une reprise ou une création. On pourrait discuter des heures sur les avantages et les inconvénients de chaque formule. Tout cela dépend de tellement de paramètres : est-on apte au pilotage de l’équipe de l’entreprise cible, dispose-t-on de suffisamment de fonds propres, de temps ? Je me suis posé beaucoup de questions et je voulais trois choses primordiales : réorienter ma carrière professionnelle, être en mesure de piloter le développement d’une entreprise de façon autonome et ne pas concurrencer les sociétés qui m’avaient jusque là fait confiance. Je me suis donc fait à l’idée d’une reprise lorsque dans mon réseau financier et bancaire, le CIC m’a indiqué une opportunité intéressante, Best Environnement. J’étais prêt sur le plan technique à une reprise de part mon expérience et surtout je ne voulais rien faire dans la précipitation car ce cap dans ma vie, je voulais le doubler avec succès, fort du soutien de ma famille et de quelques proches. Je m’étais dit qu’entre création et reprise, mon coeur et ma raison balançaient et donc que ce serait très probablement les circonstances qui décideraient pour moi. Or cette opportunité de rencontrer ce personnage qu’est Christopher J. Elliot, procédait de ces circonstances-là. J’ai eu d’une certaine façon la chance de tomber sur un homme comme celui-là, la “séduction” humaine a fonctionné tout de suite, donc l’idée de la reprise s’est ancrée dans mon esprit. Je savais que la qualité de nos relations était l’un des ingrédients nécessaires à la réussite du rachat de son entreprise.
Quelles actions avez-vous menées dans votre carrière pour vous faire penser que vous étiez capable de reprendre une entreprise ?
Je pense avoir acquis au fil des années le sens de l’homme dans l’entreprise et de l’humain en général. D’autant que l’entreprise familialedans laquelle j’avais évolué était déjà dans une activité de protection de l’opérateur. L’objectif d’apporter de la sécurité et de la protection à des hommes au-delà de tout objectif louable et indispensable de rentabilité, était un moteur de motivation important pour moi. Best intervenant dans ce créneau de la protection de l’homme au travail dans le secteur du désamiantage, j’étais en pays de connaissance tant sur le plan technique que commercial. De plus, les mêmes valeurs humaines gouvernaient l’activité proprement dite et pour cette raison, je me suis senti capable de reprendre cette société là ! Cela dit, l’une des lacunes de la mécanique de la transmission est de faire croire ou d’exiger que l’on reste dans son métier d’origine pour faire de la reprise un succès. Je ne le pense pas avec le recul. Si l’entreprise reprise est déjà d’une certaine taille et est parvenue à franchir avec succès des premiers paliers de croissance, le challenge est selon moi envisageable. Il faut alors au repreneur du vécu, du talent et une grande confiance en soi. Je pense que j’aurais donc pu y arriver dans un tout autre secteur d’activité quand bien même je ne dis pas que j’aurais forcément convaincu sur ce sujet particulier mes interlocuteurs chargés de la transaction.
Combien de temps s’est passé entre l’idée et la clôture du dossier ?
Le tout a duré 8 mois, j’ai rencontré le cédant en septembre 2010, le closing a eu lieu le 7 mars 2011. Il s’agit là d’un délai exceptionnellement court et très spécifique au dossier Best Environnement.
Quels ont été les facteurs prépondérants dans le choix de l’entreprise reprise ?
Tout d’abord l’homme qui vendait. Ce Britannique de 73 ans avait crée un groupe à taille européenne en partant de la fabrication de simples extracteurs d’air sur les chantiers de désamiantage. Il y avait une sorte d’aura autour de lui. Il y avait 7 autres candidats repreneurs, mais il m’a semblé que j’avais de fortes chances de réussir tant le courant est tout de suite passé entre nous. De plus, Best avait précisément la taille de l’entreprise cible que je cherchais, ce qui est assez rare pour être souligné. En effet, Best est une équipe d’une quarantaine de personnes, localisée dans ma région d’origine Le désamiantage, opération à la fois très délicate et très sécurisée. et avec un process industriel identifiable. J’ai tout de suite senti non seulement que cette société pouvait et devait progresser mais que cela demandait une totale réorganisation interne ainsi qu’une stratégie commerciale et industrielle nouvelle. Cela me convenait tout à fait. Enfin, cette entreprise était saine. Elle avait un CA de 13 M€ au closing ainsi qu’une notoriété professionnelle reconnue sur un marché solide. Le second atout est important dans nos professions liées à la protection individuelle, encore plus dans le désamiantage, parce que nous sommes extrêmement encadrés et régulièrement contrôlés par toute une série de tutelles officielles. Nous sommes contraints aussi au strict respect de textes draconiens surtout en France, pays où ces questions sont traitées très sérieusement. Best était reconnue par ces interlocuteurs comme un acteur compétent dans son secteur. C’était pour moi un argument de plus pour la reprendre.
Quels ont été vos partenaires durant cette reprise ?
Essentiellement les banques. Mon partenaire historique depuis 20 ans, qui ne m’a jamais lâché, le CIC, et qui était aussi le premier partenaire financier de Best avant la reprise. Puis la Banque Populaire extrêmement professionnelle qui a suivi tout le parcours de la reprise à mes côtés ; mais aussi le Crédit du Nord ainsi qu’ “Initiative et Finance”, un fonds d’investissement, partenaire de l’opération. Plusieurs acteurs financiers avaient accepté de m’accompagner dans ce challenge de la reprise de cette société et il m’aura été difficile de choisir le partenaire idoine afin de remporter le sprint final.
Sur quels critères avez-vous estimé la valorisation de l’entreprise ?
Elle s’est bâtie d’abord sur des bases purement financières pour être affinée et garantir les chances d’acceptation de ma proposition finale. Il m’a été possible avant de transmettre cette proposition au cédant, de rencontrer les équipes de Best qui à cet égard, ont toutes eu une attitude transparente. J’ai apprécié leurs réponses mais aussi leurs questions qui masquaient de toute évidence une grande inquiétude sur l’avenir de leur entreprise générée par un manque d’informations lié à la confidentialité de la transaction. Ces heures passées ensemble ont été assurément enrichissantes et déterminantes dans ma volonté de reprendre l’entreprise mais également in fine les hommes qui la constituent. La qualité de l’information transmise aura permis une transmission fluide entre gentlemen.
Au final comment avez-vous trouvé l’entreprise reprise ? Avez-vous été surpris par certains points ?
Des surprises, non ! La transparence des informations a été totale, ce qui ne nous a pas empêchés de procéder à plusieurs audits. Il y a eu des différences sur quelques sujets mais aucune difficulté majeure. Quant à Best en tant que tel, j’ai déjà dit plus haut qu’elle était connue, performante et respectée. Christopher J. Elliot l’a cédée au bout de 15 ans d’aventure entrepreneuriale passionnante, mais je dirais avec beaucoup d’humilité et de respect pour lui, que son côté britannique l’a poussé à un peu trop surveiller le marché et un peu moins l’entreprise elle-même. Son manque de présence physiquedans Best a peu à peu poussé le personnel à s’autodiriger et cela, il m’a fallu le rectifier dès mon arrivée ; il n’y avait plus de stratégie de développement à laquelle était associé le personnel. Une telle situation ne pouvait être pérenne et des conséquences négatives auraient été à déplorer pour Best tôt ou tard. Quoiqu’il en soit je veux rendre hommage à ce chef d’entreprise et je sais qu’aux vues de son histoire ce dernier vendait plus que son entreprise . Il vendait aussi une “part de sa vie” ; cela n’est assurément pas facile même dans de bonnes circonstances.
Quels ont été les bons et les mauvais moments de cette reprise ?
Il n’y a pas eu de mauvais moments, juste une grosse frayeur lorsque le cédant a été hospitalisé d’urgence durant plusieurs semaines. Nous étions proches du possible “closing” de l’opération et quand bien même il n’y a jamais eu de découragement, son état de santé était primordial et susceptible de faire échouer l’opération. Un autre moment impactant fut l’obtention d’un accord de principe du président de la CA du Douaisis, Christian Poiret, d’accueillir l’entreprise dans le Douaisis. Cela a été obtenu après moins d’une heure d’entretien avec ce dernier, et aura permis avant même mon arrivée dans l’entreprise de planifier son nécessaire déménagement. Ce fut un moment important et majeur dans l’opération d’avant reprise et je dois dire avoir apprécié cet homme d’action. Enfin, la signature à Paris fut à la fois d’une certaine façon un soulagement mais aussi et surtout un grand moment qui marquait le début d’un nouveau challenge pour moi.
Quels sont vos projets pour Best ?
Il y en a beaucoup…. J’entame avec Best un nouveau parcours professionnel ambitieux. Il s’est déjà passé un an depuis la reprise et beaucoup de choses ont changé dans la société. La réorganisation de l’entreprise, la nomination de responsables de services ainsi que la mise en application d’une véritable organisation fonctionnelle nous permettant d’ores et déjà de mieux satisfaire nos clients. Le déménagement de nos services supports et des services techniques est effectif depuis plusieurs mois déjà. Nos moyens tant matériels qu’humains nous permettent d’appréhender l’avenir sereinement dans un Tests systématiques de tous les équipements effectués sur place. contexte économique pourtant très compliqué. La constitution d’une équipe de direction dans l’entreprise, la création d’un département recherche et développement, l’ouverture de deux nouvelles agences sur Paris et Lyon ou encore le recrutement de cinq nouveaux collaborateurs nous permettent d’enregistrer une croissance à deux chiffres de notre activité. Je ne veux pas perdre de vue l’objectif majeur de satisfaction de nos clients dans un domaine d’activité ou notre professionnalisme est le garant de notre avenir. Avec mes équipes, j’entends conforter Best sur son marché initial et également nous ouvrir les portes de marchés à l’exportation pour lesquels notre expérience devrait compter. Enfin, le secteur d’activité du désamiantage est sans ambiguïté un métier éprouvant pour les opérateurs avec la consigne de se protéger en permanence car ils font face à un ennemi invisible, et aussi la nécessité de se former régulièrement aux nouvelles règles ou usages de la profession. C’est pourquoi, la formation de nos clients et prospects fait partie intégrante du dispositif de développement de Best. Des partenariats étroits avec plusieurs centres de formation dédiés au métier du désamiantage ont été récemment officialisés avec nous. De plus nous voulons être et rester actifs et pour ce faire, nous accueillons sur Lambres-lez-Douai la plateforme du pôle d’expertise et de formation amiante au sein de laquelle interviennent nos partenaires de l’INRS et de l’OPPBTP aux fins de formation des futurs formateurs du secteur du désamiantage.
Enfin le grand défi de Best est la dépollution en général. Le désamiantage pour lequel nous fournissons des protections, n’est qu’une composante de la dépollution où il y a tant à faire. Le parc immobilier public, privé ou professionnel est au coeur de cette activité multiforme. Best souhaite donc élargir son champ d’intervention et adapter son outil de production aux nécessités du moment et à venir.
Auriez-vous 3 conseils à donner à un repreneur ?
D’abord, ne pas se tromper sur ses intentions. Une entreprise, on la vit 24h sur 24. Disons-le autrement, ne pas devenir le mauvais leader de son entreprise parce qu’on s’est trompé de voie. Puis bien s’entourer, ouvrir toutes les portes car il faut beaucoup d’informations de tous ordres. Enfin, apprendre la patience, ne pas se donner de calendrier.