Agriculture

Une année noire pour les agriculteurs en Meuse

Les jeunes agriculteurs, la chambre d’agriculture et la FDSEA de la Meuse ont tiré la sonnette d’alarme le 25 août dernier sur les conséquences des intempéries sur les récoltes 2024. À quelques jours d’une cession de rentrée programmée le 12 septembre prochain à Bras-sur-Meuse, Nicolas Perotin, le président de la chambre d’agriculture de la Meuse dresse le bilan de cette année 2024 particulièrement difficile pour la profession. Rencontre.

Nicolas Perotin, président de la Chambre d’agriculture Meuse. © Chambre agriculture Meuse.
Nicolas Perotin, président de la Chambre d’agriculture Meuse. © Chambre agriculture Meuse.

Vous venez de publier une note de conjoncture particulièrement inquiétante. Quelle est la situation ?

Le contexte est très lourd avec un climat exécrable. Depuis la mi-octobre, la pluviométrie a été quasiment multipliée par deux par rapport à une année normale avec toutes les conséquences sur les récoltes. La qualité n’est pas là, ni le rendement d’ailleurs. Le prix mondial des céréales ne dépend pas des résultats français. Et cette année, les bons résultats aux États-Unis et en Russie font que les prix baissent. En France, au-delà des prix, c’est le manque de qualité qui nous pénalise. On se retrouve avec des blés ou des orges déclassés. Quand on fait cette équation avec les questions de rendement, de prix du marché et de prix dégradés, on voit bien que les résultats ne seront pas au rendez-vous par rapport aux années précédentes. Les conditions climatiques ont également rendu difficile la récolte des fourrages qui sont certes en nombre mais de très mauvaise qualité.

Ces résultats décevants pour ne pas dire inquiétants arrivent dans un contexte déjà difficile pour la profession qui s’était mobilisée il y a quelques mois. Quelles sont aujourd’hui les priorités ?

La grande difficulté, c’est d’avoir des réponses à nos questions autour des urgences et du court terme concernant les trésoreries de certains agriculteurs. Il y a donc tout un travail de nos services avec les centres de gestion et les banques pour identifier individuellement toutes les personnes qui pourraient être au pied du mur avec des trésoreries dégradées. L’enjeu est d’échelonner les remboursements avec le souhait à la fois que le Conseil régional se porte garant pour de nouveaux prêts de trésorerie et que l’État se mette à contribution pour supporter des intérêts qui pourraient être trop lourds. Des discussions sont actuellement menées. L’idée est qu’un tiers des intérêts supplémentaires soit supporté par l’État, un tiers par la région et un tiers par l’agriculteur. Les Banques ont aussi des dispositifs. Les réponses seront donc individuelles. L’objectif est d’éviter que quelqu’un s’enlise et crée des dettes fournisseurs. Mais la grosse tension risque d’apparaitre seulement en fin d’année quand les factures les plus lourdes seront à payer.

Est-ce que le tableau est complètement noir ou certains ont pu tirer leur épingle du jeu ?

C’est vrai que dans cette situation-là, la polyculture élevage est une première assurance avec des prix corrects dans la viande. Malheureusement, la crise sanitaire s’ajoute au paysage avec la FCO (fièvre catarrhale ovine) ou encore la PPA (peste porcine africaine) aux portes du Pays, du côté de l’Alsace. On doit aller rapidement dans le préventif avec la vaccination.

Le 12 septembre prochain, vous organisez votre cession de rentrée à Bras-sur-Meuse. Quel message sera alors délivré ?

Notre volonté est de sensibiliser tous les partenaires et les acteurs politiques pour évoquer aussi le moyen terme. Rappelons-nous qu’en début d’année, des engagements avaient été pris concernant la souveraineté alimentaire ou encore les questions de compétitivité de nos exploitations. On est dans une année difficile, ce n’est ni la première, ni la dernière, et c’est justement maintenant que nous devons placer nos entreprises dans la durée avec davantage d’agilité. Pour faire face à des situations complexes, le poids administratif et réglementaire doit être allégé et la fiscalité doit pouvoir nous permettre d’épargner les années où ça va mieux… pour pouvoir être ensuite en capacité d’être plus résilients quand les problèmes se multiplient. Nous avons aussi un travail d’introspection sur nos exploitations à engager de notre côté. En Meuse, notre spécificité c’est d’avoir de la polyculture élevage. Malgré tout, il faut réfléchir à des systèmes résilients, avec par exemple de la production de biomasse.

A.M.