Un progrès pour l’hommeet l’animal
Sauver la vie de chiens et de chats au lieu de les euthanasier. Leur procurer des soins, expérimenter des molécules tout en respectant des règles de l’éthique. Impliquer les maîtres dans le cadre d’un protocole. Utiliser les données pour accélérer et optimiser la recherche et trouver des médicaments permettant de préserver des vies humaines. Tels sont les enjeux sérieux et ambitieux relevés par Dominique Tierny, docteur vétérinaire, assistée par toute son équipe médicale. Une expérience privée unique en France, cautionnée par les laboratoires pharmaceutiques, les biotech, EuraTechnologies.
Une battante. Vive et passionnée, le docteur Dominique Tierny reçoit dans sa clinique vétérinaire, Oncovet, au coeur du quartier universitaire de Villeneuve-d’Ascq. Dans ce premier centre de cancérologie vétérinaire privé de France, équipé d’un plateau technique, scanner et radiothérapie, elle travaille avec 11 vétérinaires et 18 salariés. La structure assume un service de soins 24 heures sur 24. Ce centre de soins de 1 150 m2 possède un plateau technique de premier plan : scanner, échographie, radiothérapie, curiethérapie, scintigraphie, blocs opératoires, laboratoires d’analyses biologiques… Cette clinique existe depuis août 2000. Depuis février 2010, OCR (Oncovet Clinical Research) complète le potentiel. Dominique Tierny, docteur vétérinaire, est à la tête de ce centre médical innovant. Alors qu’elle exerce depuis 1987, cette femme engagée n’a cessé de se former, de se remettre en question dans un but unique : permettre l’avancée médicale. Subjuguée par l’avancée des recherches médicales vétérinaires des Américains, elle n’hésite pas à aller se former en chirurgie et cancérologie aux Etats-Unis. De retour en France, elle décide d’exploiter ses connaissances complémentaires.
Des analogies physiologiques entre l’homme et le chien. Entre les affections humaines et animales, il y a moins de différences qu’on ne le croit. “Les modèles d’affections humaines sont multiples : les chiens et les chats offrent de nombreux modèles d’affections spontanées, fréquentes et proches des affections humaines. Ces modèles sont complémentaires des modèles expérimentaux qui constituent aujourd’hui la base de la recherche scientifique.” Ainsi, il est fréquent de constater que maître et chien développent les mêmes pathologies. Ils partagent le même environnement et mode de vie. Dominique Tierny cite ainsi diverses études. Par exemple, celle de l’observation des décharges sauvages pratiquées pendant plusieurs années dans les provinces italiennes de Naples et Caserta. Des lymphomes canins se sont développés au même rythme que des cancers chez l’homme. La présentation des tumeurs animales est étrangement similaire à celles de l’être humain. De plus, les chiens sont d’un format physiologique comparable à l’homme, du moins plus proche que celui de la souris, utilisée habituellement en laboratoire. Ceci permet dès lors l’emploi expérimental de molécules dont le métabolisme est comparable. En quelque sorte, le modèle félin ou canin constitue un sujet d’étude enrichissant et bien plus f iable que la souris. “Des exemples ont démontré l’intérêt de la validation d’un candidat canin ou félin. Ceci permet la recherche préclinique, à la fois pour confirmer ou infirmer l’efficacité thérapeutique, mais également pour apporter des données sur la pharmacologie et les effets indésirables de la molécule expérimentée. Cette approche bénéficie donc à la recherche en général.”
Le respect de l’animal. Un protocole. Il ne faut pas croire que nos compagnons à quatre pattes entrent dans la clinique pour devenir exclusivement des objets d’expérimentation. On en est bien loin ! OCR respecte des règles d’éthique. Le maître est averti du projet et accepte un protocole. Dès que l’animal sort, il indique les réactions, se rend aux consultations. Dans la plupart des cas, ceci évite l’euthanasie, l’animal fait l’objet des plus grands soins et d’un respect optimal. “J’ai moi-même adopté un labrador qui était chien guide d’aveugle. L’association ne pouvait le garder car il développait un cancer alors qu’il n’était âgé que de 18 mois. Je l’ai soigné ici. Aujourd’hui, il a 10 ans alors qu’il était condamné. Comme dit un de mes amis, il représente ma meilleure publicité. Le pire est que les personnes qui nous croisent pensent qu’il a été maltraité car au niveau du dos, ses poils ne repoussent plus en raison de la radiothérapie”, sourit Dominique Tierny qui a dû et doit encore vaincre bien des préjugés pour faire valoir le bien-fondé de ses recherches. Si elle est une femme de tête, elle est également une femme de coeur. Mère de famille nombreuse, elle s’occupe aussi chez elle de quelques chiens, chats et même de chevaux. “Quand je rentre à la maison, je songe d’abord à nourrir mes animaux…”
Des enjeux médicaux, économiques, sociaux. Les intérêts sont multiples. Grâce aux animaux soignés par OCR, les laboratoires pharmaceutiques, principaux clients de la clinique, gagnent du temps pour trouver des médicaments ad hoc. “Il faut en effet savoir que le cycle de développement d’un nouveau médicament jusqu’à sa commercialisation coûte aujourd’hui en moyenne entre 800 millions et 1,2 milliard de dollars, et ceci, avec un taux d’échec considérable puisque sur 10 000 substances synthétisées en laboratoire, seulement une ou deux accèderont à l’état de médicament fiable et commercialisable. Les compagnies pharmaceutiques cherchent donc à opérer une plus forte sélection. Nous proposons une solution à cette industrie. Un gain de temps, une fiabilité plus grande, des avantages économiques dans la mesure où les phases précliniques réglementaires sont assorties de davantage de résultats probants que sur l’animal rongeur.” En quelque sorte, le chien et le chat constituent un relais plus court et plus vérifiable que la souris. Le tout étant bien entendu assorti du respect de codes de l’éthique. Le bénéficiaire final reste l’homme. L’autre gagnant reste l’animal qui serait condamné de toute façon. De nouvelles chances sont données à l’un et à l’autre.
Changer les mentalités. Un combat. Des succès. Il reste à combattre bien des réticences. Créer de nouveaux dialogues lors des congrès médicaux et rapprocher la médecine vétérinaire et la médecine humaine. Convaincre le monde médical d’une nécessaire collaboration, à l’instar des chercheurs américains bien plus en avance que nous. Dominique Tierny, par ses résultats, sa force de persuasion, sa ténacité, a conquis et convaincu les laboratoires, les centres anti-cancéreux, des start-up qui travaillent sur les molécules, des biotech. Elle a dû communiquer largement sur son concept et également prendre le temps de l’expliquer. Avec succès. Lauréate en 2010, catégorie “émergence”, du concours d’aide à la création d’entreprises de technologies innovantes du ministère de la Recherche, lauréate du réseau Entreprendre Nord, lauréate LMI, agrément bio-incubateur Eurasanté : les distinctions se cumulent et se justifient. OCR, centre de recherche privé, ambitionne, d’ici trois à cinq ans, de toucher l’ensemble des segments du marché de l’industrie pharmaceutique humaine et vétérinaire. Ses recherches lui procureront également les droits d’exploitation de la propriété intellectuelle. “Notre marché est d’emblée européen et sera mondial dès que possible.” OCR crée des passerelles entre le monde médical et le monde vétérinaire. On dit que le chien est le meilleur ami de l’homme. Plus que jamais, cette maxime s’avère justifiée. Unis dans le même combat et sol idai res. L’idée n’est pas nouvelle, en revanche le concept de OCR s’avère, lui, novateur et révolutionnaire.