Un plan de bataille pour réveiller le recyclage des déchets électroniques

Collecte de proximité, contrats avec des récupérateurs de métaux... Après une année de quasi-stagnation de son activité, Eco-systèmes, chargé de la collecte et du recyclage des produits électriques et électroniques, promet des résultats accrus avec la mise en place de dispositifs nouveaux.

Un plan de bataille pour réveiller le recyclage des déchets électroniques

© thieury - Fotolia.comQuelque 341 000 tonnes de déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) ont été récoltées et recyclées en 2013 en France. C’est ce qu’a annoncé Ecosystèmes, l’organisme chargé d’organiser la collecte, la dépollution et le recyclage de ces DEEE, lors d’une conférence de presse, le 11 mars à Paris. L’occasion pour Christian Brabant, directeur général d’Eco-systèmes, de présenter la nouvelle stratégie destinée à accroître les volumes de DEEE traités. Il est vrai que l’an dernier, ces derniers ont augmenté de 2,1%, (en particulier grâce à une récolte accrue de petits appareils électroménagers, comme les sèche-cheveux ou les imprimantes). Cependant, depuis 2011, la tendance est à la stagnation. Certes, une baisse de la consommation l’explique pour partie. Mais le dispositif lui même “touche ses limites”, estime Christian Brabant, qui évoque un “programme très ambitieux” pour les années à venir. “Il s’agit de doubler les volumes de collecte en cinq ans”, précise Guillaume Duparay, directeur de la collecte et des relations institutionnelles d’Eco-systèmes.

Lutte contre “l’évaporation” des DEEE et nouveaux circuits. Concrètement, le plan d’action pour 2014 prévoit un renforcement des canaux de collecte et de recyclage existants et la mise en place de nouveaux dispositifs. Pour améliorer la collecte des déchets auprès des particuliers, des “meubles verts” sont déjà disposés dans les magasins. De plus, une collecte de proximité va être mise en place dans les grands centres urbains. Le dispositif devrait être déployé à Paris cette année et successivement dans d’autres grandes villes. Objectif : un point d’apport pour 25 000 habitants.
Autre volet du plan, la collecte des déchets provenant de professionnels. Elle prendra la forme d’accords avec les récupérateurs de métaux chez qui artisans, installateurs de cuisine ou chauffagistes déposent aujourd’hui leurs déchets. A ces acteurs, présents sur quelque 2 000 sites, l’organisme propose “un changement de culture assez en profondeur”, afin de nouer des contrats et de permettre à Eco-systèmes de récupérer les DEEE. Le dispositif complet prévoit notamment la mise en place d’un registre qui identifie les “apporteurs” de produits, le marquage de ces derniers et leur traçabilité. En deux ans, Eco-systèmes entend conclure des contrats avec 350 récupérateurs et 54 opérateurs de broyage. Quant aux dispositifs existants, ils seront améliorés. Des efforts de communication sont menés auprès des particuliers, notamment en proposant un outil de diagnostic et de service sur son site internet : en indiquant son adresse et le type de produit dont il souhaite se séparer, l’internaute se voit proposer plusieurs solutions concrètes (donner, recycler…) géolocalisées près de chez lui. Par ailleurs, 5 500 “meubles verts” ont été disposés dans les magasins, où les consommateurs peuvent venir déposer leurs petits appareils. “On voudrait que cela devienne encore plus un réflexe”, commente Véronique Poirier, directrice de la communication, qui s’attache à montrer au public que les produits collectés sont effectivement recyclés. Une “condition nécessaire au geste”, poursuitelle.
Autre axe de travail pour Eco- systèmes : lutter contre l’“évaporation” des DEEE sur les sites existants. Plusieurs cas de figure sont évoqués par Guillaume Duparay : les gros appareils sont volés en déchetterie, ou des livreurs ne ramènent pas les appareils en retour. Un phénomène “non négligeable”, estime-t-il. Au chapitre des remèdes figurent un marquage bien visible des produits, la sensibilisation des acteurs susceptibles de les racheter, la mise à disposition de conteneurs maritimes sur des déchetteries, ou encore un travail réalisé avec les distributeurs pour améliorer la traçabilité des livraisons. Côté répression, même Interpol est mobilisé sur le sujet, des filières internationales pouvant être impliquées dans ces trafics !

Itinéraires des kilos perdus dans la nature. Avec la mise en place de ce dispositif, “nous sommes confiants pour atteindre les 10 kg (par an et par habitant) en 2016”, estime Christian Brabant. Un chiffre qui correspond à l’objectif fixé par la directive européenne de février dernier sur le sujet. Pour l’instant, la collecte atteint 7 kg par an et par habitant. Or, une récente étude européenne menée avec l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) sur les gisements potentiels de DEEE a montré que chaque foyer composé d’une personne se sépare d’environ 20 kg de produits électroniques ou électriques. De ces derniers, un peu moins de la moitié prennent la destination d’un point de collecte, filière agréé par les éco-organismes. Le sort des autres kilos, en revanche, pose des problèmes pour l’environnement : 5,5 kg sont désinstallés par des professionnels (un chauffe-eau, par exemple) ; 4 kg sont déposés sur le trottoir et dans les ordures ménagères. La partie résiduelle transite par des sociétés de leasing et des brokers. En clair, une bonne partie des DEEE échappe encore à la filière qui permet leur recyclage. Exemple, les petits produits qui partent à la poubelle ont de bonnes chances de terminer, en bout de course, incinérés… Autre problème, les DEEE déposés sur le trottoir. “C’est une fausse bonne idée de se dire que c’est un bon geste, que cela pourra resservir”, commente Guillaume Duparay. D’après Ecosystèmes, les deux tiers de ces produits sont pillés lors d’une “collecte informelle par acteurs non identifiés”. Et les carcasses restantes représentent un risque pour les agents de nettoyage des villes, qui peuvent par exemple se retrouver aux prises avec le verre cassé d’un écran. Restent les déchets enlevés par des professionnels. Aujourd’hui, les artisans, cuisinistes ou installateurs de chauffage n’ont pas la possibilité de se rendre en déchetterie. Ils déposent de gros appareils chez des récupérateurs de métaux ou des opérateurs de broyage.