Un meilleur climat des affaires en 2019

Ce moment solennel signe la clôture de l'année 2019 et le commencement officiel de 2020. Après une année 2018 difficile en raison d'un nombre conséquent de liquidations judiciaires, 2019 aura été marquée par une amélioration du climat des affaires avec des liquidations judiciaires en baisse, même si les TPE restent encore fragilisées par une situation sociale instable.

A droite, Eric Feldmann, président du Tribunal de commerce Lille Métropole, lors de son allocution. Crédit photo Victor Mahieu
A droite, Eric Feldmann, président du Tribunal de commerce Lille Métropole, lors de son allocution. Crédit photo Victor Mahieu

Avec ses 65 magistrats consulaires, le Tribunal de commerce de Lille Métropole (TCLM) a rendu, en 2019, 1 207 jugements et 356 ordonnances de référé : “Si depuis une dizaine d’années sur tout le territoire, le volume des affaires enrôlées en contentieux a diminué de près de 50%, en revanche voici deux années que cette baisse a été stabilisée au TCLM“, détaille son président Eric Feldmann, rappelant également le délai record dans lequel les décisions sont rendues (cinq semaines après plaidoirie pour les jugements et deux semaines pour les ordonnances de référé). 35 juges consacrent leur activité aux entreprises en difficulté, pilier de l’activité du TCLM, qui préconise avant tout la prévention. “2019 marque incontestablement une amélioration de nos chiffres puisque le nombre de redressements judiciaires a diminué d’environ 10% passant de 370 à 331 et surtout concernant les effectifs salariés concernés, passant de 2 949 à 1 082“, se réjouit Éric Feldmann. D’une manière moins significative, les liquidations judiciaires et les liquidations judiciaires simplifiées sont passées de 715 à 697 pour un nombre de salariés concernés passé de 976 à 1 109 soit une augmentation de 13,63%. “Au total, ce sont près de 1 500 emplois en moins qui sont concernés par ces procédures collectives en 2019” rappelle le président. Des chiffres qui reflètent une amélioration du climat économique en 2019, marqué tout de même par la poursuite du mouvement des Gilets Jaunes initié en 2018 et plus récemment, des grèves liées à la réforme des retraites, sur le commerce.

L’indispensable prévention

Le président ne cesse de le préciser d’année en année : rien ne vaut la prévention pour lutter contre le dépôt de bilan. Les chiffres le confirment : le nombre de procédures amiables (mandat ad-hoc et conciliation) passe de 54 à 72 soit + 33% pour 14 441 salariés concernés, contre 2 500 concernés par les procédures collectives, soit 5,5 fois moins. Et de rappeler que les procédures amiables, qui conviennent aux situations conjoncturelles – trou d’air, perte brutale d’un gros client ou gros fournisseur – réussissent à 70/75% des cas, alors que les procédures collectives, liées à des difficultés d’ordre structurel, échouent quant à elles dans 70/75% des cas. “Si la procédure de sauvegarde connaît un tel échec, c’est parce qu’elle est collective, donc publique et connue de tout l’environnement économique. Dès lors, les assureurs-crédits ne couvrent plus les risques sur les créances des fournisseurs des entreprises en sauvegarde“, déplore Éric Feldmann. Le président préconise surtout une meilleure prise de compte, dans les réformes des procédures des entreprises en difficulté, des TPE/PME, souffrant d’une peur du tribunal ou d’une absence trop généralisée de culture comptable et financière. Le TCLM continuera donc pour 2020 ses actions de prévention et de sensibilisation, notamment auprès des organismes tels que le Medef, la CPME, l’U2P, la Chambres des métiers, les CCI ou les associations diverses d’entrepreneurs et de commerçants, ainsi que les cellules détection-prévention ou de CIP (Centre d’Information et de Prévention), en lien avec les greffes. Une amélioration du climat économique que l’on doit aussi aux expériences réussies en Hauts-de-France, à l’image du Fonds Premier Secours – 496 emplois sauvés depuis son instauration il y a 32 mois au niveau du TCLM et 1 337 au niveau de la région Hauts-de-France (près de 9,6 M€ en 2019 contre 5,8 M€ en 2018) –, ou d’Hauts-de-France Prévention en lien avec la CCI.

Mieux financer le risque

Connaître des difficultés pour une entreprise n’est pas un pêché (…). Mais dans les cas qui nous préoccupent, les sous qu’il faut aller chercher à la banque pour les entreprises en difficulté se font rares“, regrette Éric Feldmann. En effet, suite à la crise de 2012 des dettes souveraines, les banques et établissements de crédit se doivent de renforcer leur haut de bilan, au détriment parfois d’un meilleur financement du risque pour les entreprises en difficulté. Le TLCM préconise donc une coordination optimale des acteurs, notamment avec une charte de sensibilisation à la prévention avec les experts-comptables et les commissaires aux comptes, signée dans les semaines à venir. “Dans le loi Pacte, en-dessous de 8 M€ de CA, il n’est plus obligatoire de recourir aux services d’un commissaire aux comptes. Pour nous, c’est un non-sens.” D’où la nécessité pour l’expert-comptable de pouvoir aussi alerter son client lorsque les indicateurs virent au rouge. “Mais si la situation économique reste éminemment fragile, en particulier dans des secteurs comme le BTP ou le retail, les différentes données illustrent aussi le dynamisme, l’esprit d’entreprise des acteurs économiques de la métropole qui savent s’adapter aux situations (…), notamment en investissant dans la recherche et le développement“, complète Patrick Mignot, procureur de la République adjoint.


Renouvellement de l’effectif

Dix nouveaux juges ont été accueillis en ce début d’année et en quatre ans, le TCLM a renouvelé 50% de son effectif total. Au-delà de la formation initiale et continue dispensée par l’ENM (Ecole Nationale de la Magistrature), les juges lillois bénéficient d’une “formation maison” sous la houlette de Philippe Canivez et Stéphanie Bolze, pour répondre notamment aux évolutions législatives selon lesquelles le TCLM se voit confier les procédures collectives de sociétés de plus de 250 salariés et 40 M€ de CA sur les cinq départements des Hauts-de-France, ainsi que sur les problèmes de concurrence sur les ressorts des Cours d’Appel de Douai, Amiens, Reims et Rouen.

À droite, Éric Feldmann, président du Tribunal de commerce Lille Métropole, lors de son allocution. Crédit photo Victor Mahieu