Un gain de 4 millions d'euros au loto au coeur du procès du "Petit Bar"

Un gain de plus de quatre millions d'euros au Loto par le beau-frère de Jacques Santoni, chef présumé du "Petit Bar", aurait-il aidé cette bande criminelle corse à blanchir une partie de son argent sale...

L'établissement "Le Petit Bar", le 8 avril 2013 à Ajaccio, en Corse © -
L'établissement "Le Petit Bar", le 8 avril 2013 à Ajaccio, en Corse © -

Un gain de plus de quatre millions d'euros au Loto par le beau-frère de Jacques Santoni, chef présumé du "Petit Bar", aurait-il aidé cette bande criminelle corse à blanchir une partie de son argent sale ? L'accusation le pense, lui plaide "la chance".

Au total, ils sont 24 prévenus au procès du réseau de blanchiment supposé des dizaines de millions d'euros du pactole du "Petit Bar", ouvert le 24 février devant le tribunal correctionnel de Marseille et prévu pour durer jusqu'au 16 mai. Parmi eux, Jean-Laurent Susini, 42 ans.

"J'avais de la chance", a expliqué vendredi le quadragénaire, soupçonné d'avoir fait bénéficier sa sœur Sonia, à l'époque épouse de Jacques Santoni, de son gain de 4.115.700 euros.

Le 24 novembre 2018, à 08h52, cet agent d’assurances, adepte des jeux et des paris sportifs, valide dans un tabac du Cours Napoléon à Ajaccio une grille gagnante de Loto. A l'entendre, il aurait joué ses numéros fétiches, sa date de naissance, celles de sa sœur, de sa compagne et de ses neveux.

Expliquant qu'il joue traditionnellement pour le compte de sa sœur Sonia Susini et de lui-même, le gros lot est donc partagé entre eux deux. Soit un peu plus de deux millions d'euros de la Française des Jeux qui tombent comme une aubaine, selon l'accusation, offrant un moyen inespéré au couple Jacques Santoni et Sonia Susini de justifier son train de vie luxueux et sa vie de palace sans rapport avec leurs ressources officielles.

"Si vous êtes le seul gagnant et que vous partagez avec votre sœur, en contrepartie de rétrocessions de la part de Jacques Santoni, c'était pour eux un moyen de justifier leur train de vie ?", lance au prévenu la présidente du tribunal, Patricia Krummenacker. 

Un "cadeau" jamais remboursé ?

"Il n'y a jamais eu de protocole passé avec Jacques Santoni", répond Jean-Laurent Susini, malgré l'accord qui se dessine entre les deux hommes à travers les sonorisations et les interceptions téléphoniques réalisées par les enquêteurs. 

En déclarant sa sœur co-gagnante, Jean-Laurent Susini aurait-il reçu la promesse d'un retour en espèces, pour compenser un gain qui aurait dû lui revenir intégralement ? La Française des Jeux a en tous cas attesté que Jean-Laurent Susini, avec 50 petits gains auparavant --pour un total de 34.000 euros--, était un joueur habituel, ce qui n'était pas le cas de Sonia Susini. 

Des conversations téléphoniques tumultueuses entre le frère et la sœur évoqueraient ce "cadeau", et, pour l'accusation, ces  disputes seraient en fait la conséquence du non-respect de sa promesse de rétrocession par Jacques Santoni.

Comme d'autres membres du premier cercle du "Petit Bar", Jean-Laurent Susini aurait été présent lors d'opérations de comptage d'espèces, avec des bruits caractéristiques de machines à compter les billets. "Vous me parlez d'un bruit de meuble il y a sept ans, qu'est-ce que je peux vous dire ?", oppose-t-il à la lecture des multiples sonorisations d'appartements. 

Le 24 juin 2020, à son arrivée à Ajaccio, les douanes avaient retrouvé 18.500 euros dans sa valise.

Alors que l'accusation suppose un transport d'espèces en Corse pour le compte du "Petit bar", Jean-Laurent Susini parle lui du "déménagement de son bas de laine", les clés de son appartement parisien devant être rendues.

"Il n'y a pas beaucoup de Français qui ont un bas de laine de 18.500 euros, commente la présidente du tribunal.

"Il n'y a pas beaucoup de Français qui ont gagné au Loto", rétorque Jean-Laurent Susini. 

Sa sœur sera interrogée lundi.

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