Un changement dans la continuité
La réforme d’unification des règles de la commande publique a tout de l’arlésienne pour les acteurs des contrats publics après trois tentatives infructueuses en 1997, 2004 et 2009. Il aura fallu que l’exécutif procède par voie d’ordonnance (Cf. décret n°2019-259 du 29 mars 2019 ; Arrêté du 22 mars 2019 portant l’annexe préliminaire du CCP ; Arrêté du 22 mars 2019 relatif aux données essentielles dans la commande publique ; Arrêté du 22 mars 2019 relatif au fonctionnement et à la composition de l’observatoire économique de la commande publique ; Arrêté du 22 mars 2019 relatif au recensement économique de la commande publique et en deux temps (sous les présidences de François Hollande et d’Emmanuel Macron) pour que le mouvement aboutisse à la création du nouveau Code de la Commande Publique (CCP).
En effet, l’ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 et le décret 2018-1075 du 3 décembre 2018 ont été publiés au JO et sont entrés en vigueur le 1er avril 2019. À ces deux blocs s’ajoutent des annexes ainsi que divers arrêtés et avis1 qui comportent notamment la grille de correspondance avec les anciennes dispositions. Le CCP a pour objectifs de regrouper sous un prisme commun plus d’une quarantaine de textes dispersés, incluant bien entendu les ordonnances du 23 juillet 2015 (Cf. ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession) et du 29 janvier 20162 relatives aux marchés publics et aux contrats de concessions, mais également les textes relatifs à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, à la lutte contre les retards de paiement, à la sous-traitance ou encore aux règlements alternatifs des litiges. Privilégiant une logique de codification à droit constant, le législateur a souhaité simplifier et sécuriser la commande publique, un secteur économique vital pour les entreprises, qui représente plus de 200 milliards d’euros soit 10 % du PIB en 2014.
Principe de résiliation pour faute
Aussi, le CCP reprend, pour les marchés, les jurisprudences établies relatives à l’offre anormalement basse, à la modification unilatérale des contrats administratifs et au droit au maintien de l’équilibre financier du contrat. Il intègre aussi le principe de résiliation pour faute et pour motif d’intérêt général, la force majeure ainsi que les dispositifs relatifs aux règlements alternatifs des litiges. Pour les concessions, on ajoutera que le code procède à l’intégration de la jurisprudence relative à l’attribution provisoire sans publicité ni mise en concurrence en cas d’urgence. Il est à noter qu’un soin tout particulier est apporté à la définition des notions essentielles qui concerne les opérateurs économiques (candidat ou soumissionnaire) et les procédures (appel d’offres, procédure avec négociation, procédure adaptée ou marché sans publicité et mise en concurrence). Sauf exception, les contrats en cours d’exécution ne sont pas régis par le CCP, qui ne s’applique qu’aux seuls marchés publics et concessions pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence publié à compter du 1er avril 2019. Le Code œuvrant dans la continuité confirme également le caractère obligatoire du recours à la dématérialisation des procédures de passation (mise en concurrence et remise des offres) et de la gestion de la facturation (notamment via la plateforme Chorus Pro). Du changement dans la continuité, une réforme de simplification dont les entreprises et les acheteurs publics avaient bien besoin pour améliorer l’intelligibilité et la transparence de la commande publique.
Émilien AMIZET
Avocat, Droit public des affaires Grand Est, Fidal
José-Manuel OLIVEIRA
Avocat, Responsable de Missions,
Droit public des affaires Grand Est, droit de l’immobilier, Fidal