Trois policiers mis en examen après le décès d'un homme lors des émeutes à Marseille
Trois policiers du Raid, une unité d'élite, ont été mis en examen jeudi à Marseille pour "violences avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner" et placés sous contrôle judiciaire dans l'enquête sur le décès d'un homme...
Trois policiers du Raid, une unité d'élite, ont été mis en examen jeudi à Marseille pour "violences avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner" et placés sous contrôle judiciaire dans l'enquête sur le décès d'un homme de 27 ans lors des émeutes début juillet.
Ils sont interdits de "rentrer en contact avec les parties civiles" et de participer en tant que policiers "à des interventions concernant des violences urbaines et de grands événements sur la voie publique", a indiqué le parquet dans un communiqué.
Dans la nuit du 1er au 2 juillet, alors que le centre de Marseille était en proie à des dégradations et pillages, Mohamed Bendriss, 27 ans, avait perdu la vie après un malaise alors qu'il circulait à scooter.
Il est le seul mort imputé aux forces de l'ordre à ce jour pendant cet épisode de violences urbaines qui s'était déclenché dans plusieurs villes de France et sur plusieurs jours à la suite du décès du jeune Nahel, tué par un policier lors d'un contrôle routier à Nanterre fin juin.
Lors de l'autopsie du corps de cet homme marié, père d'un enfant et dont la veuve attend un deuxième enfant, avait été repérée sur sa poitrine la trace de ce qui semblait être l'impact d'un tir de LBD (lanceur de balle de défense).
Pillage de Foot Locker
Selon le parquet, l'exploitation des images de vidéosurveillance a montré que dans pendant la nuit, alors que la colonne du Raid avait été informée d'un nouveau pillage du magasin Foot Locker et de sa réserve, situés au centre de Marseille, Mohamed Bendriss a poursuivi à scooter un homme ayant pris la fuite avec un sac "contenant des marchandises volées dans ce commerce".
Le fuyard à pied, qui a ensuite été interpellé, a indiqué lors de son audition qu'un homme à scooter "avait tenté de lui prendre le sac de force et l'avait poursuivi", le forçant à abandonner la marchandise volée, ajoute le parquet.
"Il existe donc des éléments démontrant que ces deux individus participaient à une action d'appropriation frauduleuse dans un contexte de pillage généralisé des magasins du centre-ville", selon lui.
"Mohamed Bendriss parvenait quant à lui à s’enfuir à scooter, longeant la colonne du Raid en circulant à contre-sens sur le trottoir. C’est dans ces circonstances qu’il était atteint dans un laps de temps très court par deux tirs de LBD, dont l’un au niveau du thorax se révélera mortel", complète le parquet. Mohamed Bendriss avait été découvert en arrêt cardio-respiratoire quelques rues plus loin.
Des investigations complémentaires doivent être réalisées "quant à la régularité des conditions d’emploi des armes utilisées à l’encontre" de Mohamed Bendriss et "à la proportionnalité de cet engagement", note encore le parquet.
- Risque de désengagement -
Sa compagne est "évidemment satisfaite du déroulement de l'enquête" et "de l'identification d'abord de ces trois policiers du Raid", a réagi auprès de l'AFP son avocat Arié Alimi. Mais elle "sollicite la requalification immédiate des faits en homicide volontaire compte tenu du double tir dont il a été victime", relève-t-il par ailleurs dans un communiqué.
"C'est assez rassurant de voir que l'information judiciaire a évolué et vite (...) et inquiétant en même temps de constater que de tels manquements de la part d'un corps d'élite aient pu, à ce stade, être constatés", a réagi l'avocat de la mère de Mohamed Bendriss, Me Thierry Ospital.
De son côté, l'avocat d'un des policiers, Dominique Mattei, a jugé auprès de l'AFP la mise en examen de son client "injustifiée". "Le danger était caractérisé par ce scooter qui fonçait sur le convoi" de policiers, selon lui.
Pour Bruno Bartoccetti, chargé de la zone Sud au syndicat Unité SGP Police FO, les policiers se sentent aujourd'hui "désabusés": "On s’est retrouvé dans des situations d'extrême violence, où on a été en danger, on se demande même comment il n’y a pas eu des morts dans nos rangs, et après, à la sortie, le regard sur l’institution, ce sont des contrôles judiciaires".
Au niveau national, Unité SGP Police FO a estimé dans un communiqué que "le risque de désengagement des forces de l'ordre lors de prochaines séquences de crise est sans précédent".
Ces nouvelles mises en examen de membres des forces de l'ordre interviennent moins de trois semaines après celles de quatre policiers, soupçonnés d'avoir roué de coups un jeune homme de 21 ans dans le centre de Marseille, après l'avoir grièvement blessé avec un tir de LBD.
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