Trois cadres expérimentéspour un avenir à reconstruire

Le fabricant de dentelles Leavers Desseilles Fabrics est revenu dans le giron national. Après la décision du tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer d’accepter, le 21 juillet dernier, le plan de reprise de la direction, assorti d’une réduction conséquente des effectifs, le dentellier redevient français après avoir été letton pendant quatre ans. Retour sur une affaire à rebondissements où trois cadres ont rondement mené leur affaire.

Un coup de maître ? Après plus de deux décennies passées dans le milieu de la dentelle de Calais (chez Eurodentelles notamment), Jean-Louis Dussart prend (enfin ?) le contrôle d’une société mythique de dentelle, appuyé par Michel Berrier, directeur commercial, et par Gérard Dezoteux, directeur de la création pour le compte du Letton Lauma. Son plan de reprise et de restructuration a été agréé par le tribunal et comporte une trentaine de licenciements : Desseilles passe ces jours-ci de 107 à 74 salariés. Jean-Louis Dussart a également bénéficié du soutien du dentellier caudrésien Solstiss qui a pris 35% des parts de la nouvelle société. L’affaire n’était pourtant pas simple car Desseilles n’arrivait pas à atteindre son régime de croisière depuis sa reprise en 2007 par l’industriel Lauma. Balançant entre 8 et 9 millions d’euros de chiffre d’affaires, l’entreprise avait pourtant décroché de nombreuses commandes fin 2010. Las ! La direction faisait alors face à des problèmes de livraisons consécutifs à des retards au niveau de la nouvelle teinturerie, fruit de la fusion entre celle de Noyon (Bellier) et celle de Desseilles (TCO) et dirigée par le fabricant de dentelle caudrésien Christophe Machu (Solstiss). Changeant alors de stratégie, Desseilles choisissait d’envoyer une partie de sa production chez le grand rival de Solstiss à Caudry, Holesco, qui dispose de sa propre teinturerie (La Caudrésienne)…

Entre Solstiss et Holesco… Les premiers mois de l’année laissaient entrevoir une coopération plus poussée entre Holesco et Desseilles. Une négociation avait commencé au printemps et laissait entrevoir l’entrée d’Holesco au capital de Desseilles. Pourtant, les choses devaient en rester là malgré les conditions plus avantageuses octroyées à Holesco (qui aurait pu détenir 50% des parts). Ce dernier demandera un report de la date de décision du tribunal afin d’affiner son offre. Sans succès. La direction de Desseilles avait entre-temps pris contact avec celle de Solstiss qui, moins gourmande, se contenta de 35% des parts tout en acceptant le plan de Jean-Louis Dussart. Au final, le tribunal accepta cette reprise pour un montant symbolique de 150 000 euros, payables en partie d’ici fin 2011. Les nouveaux actionnaires amènent cependant 850 000 euros dans la trésorerie de la nouvelle entreprise, baptisée Desseilles Lace. En quelques jours, au milieu de l’été, le trio Dussart-Berrier-Dezoteux a pris de vitesse tout le monde et a conclu un accord minimal avec Solstiss.

Quid de l’aspect teinturerie ? Chez Color Bio Tech, la reprise de Desseilles entraîne un changement d’actionnariat. Les nouveaux propriétaires du fabricant ont évidemment repris les parts que Desseilles Fabrics détenait dans la teinturerie. Solstiss étant désormais actionnaire de la nouvelle société, elle conforte sa place d’actionnaire de référence chez Color Bio Tech. Bien qu’aucun nouveau pacte ne soit à l’ordre du jour, la nouvelle majorité au sein du conseil d’administration du teinturier aura à coeur de servir Desseilles de façon plus efficace que l’an dernier, quand des retards menaçaient les livraisons de Desseilles… Quelle sera l’attitude de Noyon, actionnaire à 30% de Color Bio Tech ? Sera-t-il tenté de conditionner l’entrée de Desseilles Lace à un vote à l’unanimité comme il est prévu par les statuts de la société de teinturerie ? Les prochaines semaines le diront. En attendant, bien que Desseilles soit redevenue une entreprise française, elle n’aura bénéficié d’aucun soutien des banques nationales…