Politique de la Ville

Thionville, un avenir d’ambitions

Nancéien de racines, Pierre Cuny a mené une carrière émérite dans le secteur médical. Médecin endocrinologue au Centre Hospitalier Régional Metz-Thionville, il s’est engagé en politique en 2008, avant de devenir maire de Thionville huit ans plus tard. Président de la Communauté d’agglomération Porte de France-Thionville, il porte un regard pragmatique et serein sur les évolutions de son territoire. Sans jamais perdre cette conviction ancrée : croire en l’humain..

Pierre Cuny est maire de Thionville depuis le printemps 2016. © Laurent Siatka
Pierre Cuny est maire de Thionville depuis le printemps 2016. © Laurent Siatka

Quel est le sens de votre engagement en politique?

J’ai toujours été intéressé par la chose publique. Je suis issu d’une famille traditionnellement tournée vers les autres. Mon père, Gérard, fut l’un des pionniers de la gériatrie en France. Je ne suis pas un professionnel de la politique. En 2008, je me suis engagé auprès de Jean-Marie Demange, alors maire de Thionville. Puis dans l’opposition, j’ai pensé qu’être utile, c’est être constructif. Après son décès, je me suis rapproché d’Anne Grommerch. Ensemble, nous avons conquis la mairie en 2014. Suite à son décès, je suis devenu, en 2016, maire, avant d’être réélu six ans plus tard. Je garde cette certitude : si la politique est un métier, cela ne peut pas être un métier toute une vie.

La proximité, c’est un facteur essentiel pour vous?

Un maire est comme un médecin généraliste. Il faut aimer les gens. Sans cela, malgré toutes les compétences, c’est difficile de mener un mandat. Cela passe par le respect des personnes et des engagements. L’élu doit avoir une vision claire de l’avenir de son territoire, un cap déterminé. Nous vivons dans une société qui privilégie trop l’immédiateté, l’effet d’annonce. Malheureusement, trop souvent, cela nuit à l’action responsable et durable. La politique doit, à bien des égards, retrouver son sens noble du terme. Le maire est le premier maillon de notre modèle républicain, celui que les citoyens plébiscitent en premier. À Thionville, la proximité, ce sont, par exemple, 150 réunions publiques que j’ai animé, la création du Conseil des Sages, du Comité de Transition Écologique. Cela crée du lien et implique les habitants.

Qu’est-ce qui a changé ces dernières années à Thionville?

Je pense pouvoir dire que beaucoup de Thionvillois sont fiers de l’être. La ville a gagné en attractivité. Elle évolue sur beaucoup de plans. Nous avons investi 170 millions d’euros en dix ans. Le taux de commerces vacants est passé de 24 % à 8 %. La ville s’est désendettée de moins 18 millions d’euros. Tout cela contribue à attirer de nouveaux habitants et à garder ceux qui y résident. C’est important pour une ville de rester attractive pour sa jeunesse. Beaucoup d’investissements récents : la Passerelle de l’Europe, la construction du Site Polyvalent de Thionville (S.P.O.T.), la rénovation de la façade de l’Hôtel de Ville, un développement universitaire passé de 900 à 2 500, une dynamisation du commerce de proximité via l’action Cœur de ville. Je n’ai pas touché à la fiscalité. L’ambition est de transformer et d’adapter Thionville aux enjeux de notre temps.

Les incertitudes budgétaires nationales vous inquiètent-elles?

Très certainement. Dans les débats actuels sur les déficits publics, on entend tout et son contraire. Nous sommes tous conscients des difficultés et des efforts à fournir. Réduire les dépenses, générer des recettes, bien sûr, mais pas n’importe comment, pas brutalement, pas à l’emporte-pièce. Je trouve scandaleux cette sorte de suspicion, ce procès d’intention, qui est faite aux collectivités locales. Elles représentent 70 % de l’investissement public et font vivre de nombreuses entreprises. Oui, simplifions, mais vraiment et de façon cohérente. Ne faut-il pas clarifier nos strates administratives ? Je suis pour une décentralisation accentuée et que l’État se concentre sur ses missions régaliennes. Il faut aussi clarifier la relation entre régions et départements.

Thionville développe une forte politique de santé, pourquoi?

Thionville est reconnue Ville Santé OMS. Cela se traduit localement par des actions de prévention et d’équipements sanitaires de premier plan. Nous avons mis en place en 2016 dans les écoles thionvilloises un plan destiné à combattre l’obésité infantile. Il a été étendu à l’ensemble de l’agglomération. En 2020, durant la pandémie, le centre de vaccination de Thionville a été l’un des plus importants de la région. La ville accueille sur son territoire des structures importantes comme le CHR Metz-Thionville, la clinique Ambroise Paré, la clinique Notre-Dame, l’hôpital le Kem, un cabinet médical de garde, le centre médical de Soins Immédiats… La maternité a été reconstruite. Attirer des médecins est aussi un défi. Nous arrivons à maintenir un tissu de professionnels grâce à l’incitation et à l’accompagnement en termes de locaux. Thionville est par ailleurs engagée dans la lutte contre le tabagisme. Elle est devenue l’une des trois «villes libres sans tabac» de la région, avec Nancy et Joinville. Notre contrat local de santé flèche l’accès à la santé, aux droits et aux soins, le bien-être et la santé mentale, la santé environnementale, les maladies métaboliques, cardiovasculaires et les cancers chez les adultes et donc l’engagement contre le tabagisme.

Quelle place pour Thionville au sein de la future Thionville Fensch Agglomération?

Le 1er janvier 2026, la nouvelle collectivité territoriale Thionville Fensch Agglomération sera opérationnelle. Elle est déjà bien avancée, née de la fusion entre les communautés d’agglomérations Portes de France-Thionville et du Val de Fensch. Avec mon collègue Michel Liebgott, nous sommes partis du constat que notre territoire, riche de hautes potentialités, était trop morcelé. Thionville Fensch Agglomération sera forte de 160 000 habitants. Ce qui en fera la 2e ECPI en Moselle et la 3e en Lorraine. Je dis toujours que les planètes se sont alignées pour aboutir à cette réalisation. Il s’agit d’être plus fort sans dépenser plus. Cette fusion répond aux enjeux de transition écologique, de santé, de reconquête des friches industrielles, d’universités, de mobilité, de sécurisation de l’eau, de développement des zones d’entreprise, d’attractivité territoriale. L’ambition sera de mieux vendre la métropole européenne que nous serons. Thionville, dans son développement propre, aura un rôle pivot. Cela permettra de faire avancer et de concrétiser des structures manquantes comme un pôle universitaire et un parc des expositions.

Pourquoi Thionville 2030?

En 10 ans, la ville s’est développée, a progressé, est revenue à son seuil historique de 43 000 habitants grâce aux actions menées sur le logement, sur le développement urbain, sur son image dynamique. C’est l’une des rares villes de plus de 40 000 habitants à gagner en population dans le Grand Est. Pour répondre à cet enjeu de croissance démographique, j’ai présenté Thionville 2030 au travers de sept projets labellisés englobant de profondes mutations pour la Zac du Couronné, la Rive droite, les quartiers Saint-Pierre et La Milliaire, la Côte des Roses-Bel Air et la création d’un écoquartier Rive gauche. Thionville 2030, c’est enfin la montée en puissance du Bus à Haut Niveau de Service (BHNS).

Qu’avez-vous appris de votre expérience d’élu?

J’ai une longue carrière de management dans le médical. Ceci transposé à la politique, je reste persuadé que rien n’est possible si on ne croit pas aux personnes et à leurs potentiels. Être maire, c’est être passionné et ne rien attendre en retour. Je ne suis pas d’accord avec ce que l’on entend trop souvent, à savoir que le politique ne pourrait pas grand-chose. Il n’y a d’impuissance en rien. Même, et surtout, en politique, de la volonté permet de faire avancer bien des dossiers. Il faut le vouloir fortement, avoir du charisme et être convaincu.



Thionville a franchi la barre des 43 000 habitants : une première depuis presque 50 ans. © Ville de Thionville - David Hourt

Projet de longue date, la Passerelle de l’Europe a été inaugurée le 12 juillet 2022. © Ville de Thionville - David Hourt