Télétravail : Employeur ou salariés peuvent-ils encore dire non ?
Avec la 2e vague de Covid-19 et le nouveau confinement national, la question du télétravail est plus que jamais présente. À l’heure actuelle, le recours au télétravail est-il devenu obligatoire pour l’employeur ? Et côté salariés, un refus est-il envisageable ? Le protocole national a été remis à jour au 29 octobre 2020 et nous éclaire sur le sujet.
Avec la seconde vague de Covid-19, le télétravail apparaît aujourd’hui comme un sujet incontournable.
Refus du télétravail : côté employeur
On savait déjà que sa mise en œuvre peut s’imposer en cas de circonstances exceptionnelles pour garantir la protection des salariés, ou sur recommandation expresse des autorités en raison du contexte sanitaire ou encore du fait d’une situation de vulnérabilité attestée médicalement. Mercredi soir 28 octobre, le président de la République avait annoncé que le télétravail allait être généralisé partout où cela est possible. Jean Castex a, lui, précisé à l’Assemblée nationale le lendemain matin que toutes les fonctions qui peuvent être télétravaillées doivent l’être 5 jours sur 5. Aujourd’hui, le protocole national indique que, dans les circonstances actuelles, il doit être la règle pour l’ensemble des activités qui le permettent. Le temps de travail en télétravail est de 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance. Dans les autres cas, il faut réduire les interactions sociales notamment en aménageant le temps de présence. L’employeur doit ainsi organiser systématiquement un lissage des horaires de départ et d’arrivée des salariés afin de limiter l’affluence aux heures de pointe. Le ministère du Travail précise que le télétravail peut faire l’objet d’un accord d’entreprise, d’une charte ou d’un simple accord entre salarié-employeur. Le protocole indique également que l’employeur doit, dans le cadre du dialogue social de proximité, veiller au maintien des liens collectifs et à prévenir les risques liés à l’isolement des salariés en télétravail. Rappelons toutefois que le protocole national, qui contient un ensemble de recommandations, n’a pas de force contraignante même s’il parait difficile, dans le contexte actuel, de ne pas le suivre. En effet, un syndicat avait récemment demandé la suspension de l’exécution de ce protocole national, notamment sur le fait qu’il pose le principe du port du masque systématique en entreprise dans les lieux collectifs clos. Mais, le 19 octobre, le Conseil d’État a considéré qu’en l’état actuel des connaissances scientifiques, le port du masque systématisé dans les espaces clos, combiné notamment au respect des gestes barrières, était justifié. Pour le Conseil d’État, le protocole sanitaire est un ensemble de recommandations pour la déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur. Il n’a pas de force contraignante. Et sa suspension éventuelle n’aurait donc aucune incidence sur les obligations en matière de santé et sécurité. Ainsi, en cas de refus du télétravail, le risque principal pour l’employeur est de voir sa responsabilité engagée au titre de l’obligation de sécurité s’il n’a pas pris suffisamment de mesures pour protéger la santé de ses salariés.
Refus du télétravail : côté salarié
Face à la pandémie, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés (Code du travail, art. L.1222-11). Dans ce cadre, le salarié ne peut pas refuser le télétravail et n’a pas d’avenant à son contrat de travail à signer.
À noter : les salariés en télétravail conservent leurs droits notamment concernant les titres restaurant, sous certaines conditions, ou les temps de pause.
Conseil d’État, 19 octobre 2020, n° 444809 (le protocole national est un ensemble de recommandations sur la mise en œuvre pratique de l’obligation de sécurité de l’employeur. Questions-réponses du ministère du Travail sur le télétravail, mis à jour le 22 octobre 2020.
Protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l’épidémie de Covid-19 (29 octobre 2020).
Anne-Lise Castell
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Éditions Tissot
Pour Réso Hebdo Éco / https://reso-hebdo-eco.com/.