Sur les traces du jeune Alex Batty dans une vallée de l'Aude
Au hameau de la Bastide, dans une vallée reculée de l'Aude, l'étonnement domine: c'est là qu'Alex Batty, l'adolescent britannique disparu depuis 2017, et son grand-père ont vécu un temps sous de faux noms, logés et nourris par les...
Au hameau de la Bastide, dans une vallée reculée de l'Aude, l'étonnement domine: c'est là qu'Alex Batty, l'adolescent britannique disparu depuis 2017, et son grand-père ont vécu un temps sous de faux noms, logés et nourris par les propriétaires d'un gîte en échange de leur aide.
Pour les habitants du coin, cet adolescent souriant, c'était Zach: souvent croisé, toujours poli, il ne s'épanchait guère et peu le connaissaient personnellement.
Roger Vales, 79 ans, vit au bout de l'impasse qui longe la maison d'hôtes jusque dans les collines, à quelques centaines de mètres. "C'est des gens gentils", dit à l'AFP ce retraité et conseiller municipal, à propos d'Alex Batty et de son grand-père.
"On ne savait pas, nous. Le jeune, quand on passait en voiture à la Bastide, on le voyait, +Bonjour+, et c'est tout. Et le pépé, souvent, on le voyait travailler, il arrangeait des murs par là", ajoute-t-il, devant chez lui.
C'est ici, au gîte de la Bastide, sous le regard du sévère pic du Bugarach, que l'adolescent semble avoir vécu, en compagnie de son grand-père David Batty, une bonne partie des deux années passées en France.
Vaches gasconnes
Sa mère Melanie, qui en avait perdu la garde car jugée "instable", s'était enfuie avec lui à l'été 2017 lors de vacances en Espagne. S'en est suivie une longue errance, passant par le Maroc, avant les Pyrénées françaises, l'Aude donc, mais aussi l'Ariège et les Pyrénées-Orientales, selon le procureur de Toulouse.
D'abord, un passage par Camps-sur-l'Agly, commune d'une cinquantaine d'âmes et quelques vaches gasconnes, où se trouve la Bastide.
"Zach est arrivé dans notre gîte pour la première fois fin de l'automne 2021", racontent dans un communiqué Frédéric Hambye et Ingrid Beauve, deux Belges qui avaient acheté cette ferme peu avant.
Il devait y rester quelques jours ou semaines, en contribuant "à la maintenance" contre logis et couvert. Son séjour, sans sa mère, s'y répète lors de "périodes plus ou moins longues".
Il aidait au jardin, "aimait cuisiner", écrivent-ils, dans cette cuisine visible depuis une fenêtre de la grande bâtisse en pierre de taille.
Un carillon au dessus de l'entrée tinte au souffle du vent. Les propriétaires sont absents. Mais la porte reste ouverte aux visiteurs, accueillis par une ardoise "Bienvenue au gîte de la Bastide!"
Une casserole de pâtes en sauce est restée sur la cuisinière. Derrière, deux grandes tables en bois auxquelles se sont sans doute attablés Alex et son grand-père, David.
La maire du village, Rolande Alibert, ne parle plus à la presse. La faute aux journalistes anglais, explique-t-elle, qui ont encombré la petite route passant devant chez elle, avant de bifurquer le long du gîte.
L'édile, "fatiguée", n'en peut plus. Les gendarmes, venus chez elle lundi après-midi, repoussent gentiment les reporters.
Adopté
Parti, Alex a été découvert marchant sur une route mercredi avant l'aube, par un chauffeur livreur qui l'a confié aux gendarmes. Depuis, il a été rapatrié samedi vers Manchester, en Angleterre, où il a retrouvé sa grand-mère qui en a la garde.
Il a quitté le gîte parce que sa mère souhaitait l'emmener en Finlande, et non parce qu'il ne se plaisait pas dans la région.
Il y "menait une belle vie, car il vivait à un endroit magnifique", et avait été "en quelque sorte adopté par la famille qui gérait le gîte", raconte Susie Harrison.
"Je pense que c'était bien pour Alex de vivre avec ces gens adorables", estime cette Anglaise de 61 ans, installée dans la région depuis vingt ans.
Elle ajoute avoir rencontré Melanie Batty en octobre 2021 au marché de Mirepoix (Ariège), à 75 kilomètres de là. La mère d'Alex lui dit s'appeler Rose.
Très vite, Susie Harrison pense que c'est une complotiste car, lorsqu'elle lui dit avoir contracté le Covid-19, celle-ci lui répond: "Ce n'est pas vrai, le Covid n'existe pas".
Puis la sexagénaire comprend que "Rose" recherche "une communauté spirituelle. Pas tellement une communauté à rejoindre, mais plutôt à diriger (...) Elle était sûre de connaître et comprendre le monde, et elle voulait le montrer aux autres".
Selon elle, Alex n'a pas souffert des obsessions de sa mère. "C'était un garçon adorable, amical, gentil, poli et en bonne santé", décrit-elle.
"C'est une région où beaucoup de gens viennent chercher leur spiritualité", ajoute Eve-Lauve Florent, aide à domicile de 42 ans à Camps-sur-l'Agly. "Dans le coin, lance M. Vales, il y a beaucoup d'illuminés qui sont venus s'installer."
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