Soirée de gala à Amiens
Après Mignon Palace, Gilles Defacque retourne sur les lieux de son enfance bercée par le musichall et orchestre ce cabaret burlesque – rythmé par l’orchestre du Tire Laine – où circassiens et comédiens complices invitent Fellini et les Marx Brothers.
Ce soir on improvise !
Adepte depuis toujours d’un joyeux métissage des arts, le patron du Prato – Pôle national des arts du Cirque à Lille – embarque à nouveau comédiens, circassiens et musiciens pour une odyssée burlesque où cet infatigable Ulysse au royaume de l’imaginaire croise ombres, revenants et sirènes avant d’accoster sur les rivages enchanteurs de ses souvenirs d’enfance. Accueilli par notre clown loquace métamorphosé en auteur incompris, le spectateur assistera ensuite à d’improbables ou virtuoses numéros de music-hall où les comédiens palabrent sur les chemins du surréalisme, les musiciens impriment un tempo d’enfer ou ralentissent la cadence et les circassiens nous bluffent ou nous laissent coi. Un cabaret du bout du monde – la baie de Somme, terre matricielle de l’enfance de Gilles Defacque – où les figures tutélaires du burlesque seraient les fées bienveillantes penchées sur le berceau de ce spectacle bien né. S’il pointe parfois une douce nostalgie au gré de cette touchante parade de saltimbanques, l’humeur n’est pas au spleen passéiste mais au désir utopique – et modeste – d’un cirque global qui parlerait aussi du monde d’aujourd’hui. Une plongée poétique dans une nuit étoilée sur le mode «ce soir on improvise»… Confidences d’un artiste généreux.
Un cabaret d’aujourd’hui «Pour Mignon Palace, j’ai pu travailler avec une équipe formidable et on a eu l’envie commune de poursuivre ce voyage surréaliste au pays de l’enfance. Ce sont de jeunes artistes, venus parfois de loin, et j’aime cette idée de transmission. Ils sont venus écouter le vieux clown parler de ses souvenirs du cabaret de ses parents à Friville-Escarbotin, dans la baie de Somme, et de cette culture populaire dont je suis un héritier, mais moins avec un regard nostalgique que dans le désir de construire un cabaret d’aujourd’hui. J’aime montrer le côté nomade des artistes de cirque, une troupe de saltimbanques où l’on perçoit entre eux beaucoup d’humanité que l’on partage naturellement avec le public. Dans ce spectacle où les femmes mènent la barque – en particulier Stéphanie Petit, notre nouvelle Yolande Moreau, et Tiphaine Raffier notre madame Loyal – les personnages sont des «encombrants», des petites gens à qui je rends hommage. Ce sont aussi des revenants qui viennent de loin mais nous parlent de notre monde et font écho à la crise d’aujourd’hui. J’aime conjuguer rigueur et folie dans mes spectacles, même s’il faut être très précis avec les numéros d’acrobaties ou d’équilibre. Cependant, je préfère donner l’illusion que c’est improvisé alors qu’en fait tout est réglé au cordeau. Seule la musique de Nono (Arnaud Van Lancker et son orchestre du Tire Laine, NDLR) crée une énergie différente à chaque représentation et imprime le tempo à l’équipe. Pour ce spectacle, j’ai imaginé que l’on fabriquait un film muet lors de la représentation et, évidemment, les influences cinématographiques sont nombreuses. Je leur ai montré Les Vacances de Monsieur Hulot de Jacques Tati ou L’Ange bleu de Josef von Sternberg où le vieux professeur tombé amoureux fou de Marlène Dietrich devient clown pour la suivre. J’ai beaucoup regardé les grands comiques burlesques comme les Marx Brothers ou Buster Keaton mais aussi des films muets plus méconnus comme A travers l’orage de David Wark Griffith avec Lillian Gish ou les premiers Max Linder».
Représentations le 13 mars à 19h30 et le 14 mars à 20h30 au Cirque Jules Verne, place Longueville à Amiens. Renseignements et réservations au 03 60 01 02 40 ou au 03 22 22 20 20.