Sénatoriales: mission quasi-impossible pour les candidats LFI

"Les mathématiques jouent contre nous", reconnaît, lucide, Bally Bagayoko. Le candidat de La France insoumise aux sénatoriales en Seine-Saint-Denis sait qu'ici comme dans tous les autres départements concernés par les élections de dimanche...

Bally Bagayoko, candidat de La France insoumise aux sénatoriales, le 20 septembre 2023 à Romainville, en Seine-Saint-Denis © JULIEN DE ROSA
Bally Bagayoko, candidat de La France insoumise aux sénatoriales, le 20 septembre 2023 à Romainville, en Seine-Saint-Denis © JULIEN DE ROSA

"Les mathématiques jouent contre nous", reconnaît, lucide, Bally Bagayoko. Le candidat de La France insoumise aux sénatoriales en Seine-Saint-Denis sait qu'ici comme dans tous les autres départements concernés par les élections de dimanche, les chances de son parti sont quasi-nulles.

Mais cela n'empêche pas l'ancien adjoint au maire de Saint-Denis, 50 ans, de faire campagne jusqu'au bout.

Mercredi soir, lors d'une réunion dans la mairie de Romainville, il présente sa liste dans une grande salle de réception bien vide pour l'occasion: seule une dizaine de militants ou sympathisants insoumis sont présents. 

Il faut dire que les sénatoriales, une élection au scrutin indirect, ne passionnent pas les foules puisque seuls les grands électeurs, des élus, peuvent y voter.

Un mode de scrutin qui pénalise La France insoumise, qui dispose de peu d'élus locaux. 

Le refus d'alliance des écologistes, socialistes et communistes a sonné le glas des espoirs insoumis de décrocher un premier siège à la chambre haute du Parlement. Jean-Luc Mélenchon a lui-même été sénateur pendant 20 ans, mais y a été élu sous l'étiquette socialiste.

"Il faut du courage pour être là", souffle un militant aux candidats assis devant lui. Un autre sympathisant explique soutenir la formation insoumise car "déçu du Parti communiste" et de "son manque de représentativité des classes populaires" en banlieue.

Bally Bagayoko, lui, dit vouloir "créer la surprise" et espère que sa liste LFI sera récompensée par une "prime à l'union". Depuis le mois de juin, avec ses colistiers, ils se sont entretenus avec plus d'une centaine de grands électeurs de gauche. 

"Chaque parti tient ses élus, mais on essaie de récupérer ceux qui sont un peu en liberté", résume Pilar Serra, colistière de Bally Bagayoko.

"Beaucoup de grands électeurs socialistes ou écologistes sont attristés par ce désaccord", assure le candidat, en référence aux six listes de gauche présentes aux sénatoriales dans le 93.

"Il y a plein de grands électeurs qui s'affranchissent de tout ça dans l'isoloir", affirme-t-il également.

Opérations cul-de-sac

L'élection du premier sénateur LFI aurait pu être possible en cas d'accord de la gauche dans le Puy-de-Dôme. 

Mais en Seine-Saint-Denis, au regard des derniers résultats électoraux, elle aurait été particulièrement symbolique: le département le plus pauvre de l'Hexagone a voté à près de 50% pour Jean-Luc Mélenchon en 2022. 

Surtout, la Nupes y a réalisé un carton plein aux dernières législatives: l'ensemble des douze députés sont de gauche, avec neuf sièges pour La France insoumise. 

Un sénateur insoumis permettrait de "corriger une imperfection" aux yeux de Bally Bagayoko: le fait que l'UDI et la droite détiennent actuellement trois des six postes de sénateurs du département. 

Le candidat dit y croire encore: les grands électeurs "apprécieront moyennement que certains partis de gauche (PS et PCF, ndlr) n'appellent pas à la marche du 23 septembre quand on regarde la situation de la Seine-Saint-Denis sur les violences policières", pronostique-t-il.

Selon ses estimations, il lui faudrait un peu plus de 200 voix pour dérocher un poste de sénateur. En ce mercredi soir, celui qui est également cadre dans le groupe RATP, pense en avoir environ 90.

En cas de défaite, "on aura marqué le championnat par notre présence, nos valeurs et le contenu qu'on porte", philosophe-t-il, filant la métaphore sportive. 

Surtout, M. Bagayoko, d'origine malienne, ne peut pas s'empêcher de noter que "les circonscriptions gagnables d'avance, on ne les propose généralement pas à nous, les gens issus de la diversité". 

"On est quand même souvent sollicités pour être candidats sur des opérations cul-de-sac, j'en ai parfaitement conscience", sourit-il.

Comme un symbole, le maire de Romainville, François Dechy, sympathisant EELV, est venu saluer et souhaiter bon courage aux candidats insoumis avant leur réunion. Avant de vite repartir: son vote est déjà promis à une autre liste de gauche. 

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