SeaFrance attend son heuredans la tourmente
La guerre de tranchée continue chez SeaFrance. Entre la direction et le syndicat majoritaire CFDT, les conflits se succèdent depuis l’adoption du plan social qui a déjà mis sur la touche plus de 700 salariés depuis un an. Entre l’attente d’une décision européenne quant aux aides récurrentes de son actionnaire (la SN CF), les procédures judiciaires avec son partenaire social numéro 1 et le yoyo des effectifs, SeaFrance joue sa survie. En octobre prochain, le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer décidera de son destin: reprise par un acteur maritime, second plan social, reprise par les salariés organisés en coopérative, liquidation judiciaire avant la mise en vente des navires ?
SeaFrance, dernier épisode ? Fin octobre prochain, la période du redressement judiciaire aura été jusqu’à son terme ultime et 18 mois après, on saura si les efforts faits par la direction aboutissent à une solution pérenne pour ce qui reste de SeaFrance. L’ambiance dans l’entreprise est gâtée par les relations exécrables entre la direction et la CFDT. Depuis près d’un an, la première réclame la communication de l’ensemble des pièces comptables du comité d’entreprise que dirige le syndicat majoritaire, soit 9 200 pièces. Ce dernier réplique que la consultation est ouverte malgré une décision de justice leur enjoignant de laisser la direction en prendre copie. “Nous avons pris un expertcomptable alors que ce n’est pas une obligation. Devant la suspicion de certains, on a pris un commissaire aux comptes. Et la direction veut aujourd’hui en nommer un second ? Tout cela n’est pas digne de la situation gravissime dans laquelle se débat l’entreprise”, s’indigne Didier Capelle, secrétaire du syndicat maritime.
Guérilla autour des pièces comptables. Depuis mars dernier, la CFDT a missionné le cabinet Diagoris pour étudier la faisabilité d’une reprise par les salariés sous la forme d’une coopérative. Dans ce cadre, il réclame depuis mars dernier des documents relatifs à la comptabilité de l’entreprise. La direction n’a pas donné suite, entraînant une procédure du CE qui a obtenu du tribunal de commerce de Paris, en juin dernier, une ordonnance obligeant les dirigeants de SeaFrance à communiquer les pièces demandées. “Ceci a entraîné un retard dans l’élaboration de notre projet de Scoop” indique Me Brun, l’avocat du CE, qui précise que “toutes les réunions du comité d’entreprise sont entachées d’illégalité ainsi que ses décisions”. En cause, les ordres du jour qui n’auraient jamais été décidés de concert. “Il y a des jurisprudences sur ce point” indique l’avocat du comité d’entreprise. Dans ce cas, la mission que le CE a conf ié à Diagoris pourrait l’être aussi. De son côté, la direction a convoqué une nouvelle réunion, “exceptionnelle”, le 27 juillet dernier, où elle espère examiner un nouveau plan qui devrait satisfaire Bruxelles et obtenir l’aide de l’Etat pour son redressement. Autre point à l’ordre du jour, l’examen des offres de cession qui seront reçues par l’administrateur judiciaire. La CFDT développe un projet de coopérative et veut un report. Un nouveau rapport de force ?
Vente à la découpe ou coopérative ouvrière ? “Evidemment, on ne proposera pas à la direction de se joindre à la future coopérative”, précise Me Brun. Un point important reste cependant à résoudre : trouver le dirigeant qui saura convaincre le tribunal du bien-fondé du constat selon lequel les salariés doivent prendre les choses en mains. Ils ont peutêtre commencé à le faire en votant massivement pour la CFDT (qui a gagné un siège de plus) lors du scrutin relatif à l’élection des représentants du personnel du 21 juillet dernier.