Saveurs et Saisons insuffle l’esprit bio dans la Métropole

Homme de convictions, Thierry Decoster s’est lancé il y a une quinzaine d’années dans un pari fou : construire, sur une ferme en ruines, un lieu dédié à l’agriculture biologique. Que ce soit en magasin ou lors d’animations, les maîtres mots de l’enseigne restent la pédagogie et l’envie de partager.

Saveurs et Saisons compte 7 500 références.
Saveurs et Saisons compte 7 500 références.
D.R.

Avant, l’endroit était un vaste champ. Thierry Decoster et sa famille y ont construit 2 000 m2 dédiés à la bio.

«La Ferme du sens». Depuis, le nom de l’enseigne a changé mais la symbolique demeure. Quand il a acheté en 1994 ce vaste terrain «où il n’y avait que des vaches», Thierry Decoster avait dans la tête bien plus que la création d’une société. C’était surtout l’aboutissement d’une longue réflexion… «J’ai voulu ce lieu comme un lieu de création d’entreprises autour du bio, où chacun peut aller vers son propre sens», explique-t-il. Tout commence par la construction d’une boulangerie – le Fournil – en 1996, avec quelques produits en test. Puis place à la boucherie avec un artisan désireux de s’implanter sur le site à qui Thierry Decoster a tendu la main. La construction du magasin débute la même année, sur 280 m2. Un an plus tard, le dirigeant aux idées foisonnantes imagine un atelier pédagogique où seront donnés des conférences, des animations et des cours de cuisine. Aujourd’hui, c’est un restaurant aux recettes «100% fait maison» qui a pris la place. «A l’étage, en 1997, se sont installés des architectes en bioconstruction, c’était précurseur à l’époque», se souvient Thierry Decoster. Car, bien entendu, le bâtiment est construit dans le respect de l’environnement. Quinze ans et 2 000 m2 plus tard, Saveurs et Saisons compte 25 salariés et s’est agrandi cet été pour doubler sa surface de vente (630 m2). Adossés au magasin, deux restaurants mais aussi la brasserie Moulins d’Ascq (dont Thierry Decoster n’est pas propriétaire). Seule boutique du Nord-Pas-de-Calais à vendre du vrac en herboristerie mais aussi en café et thé, la boutique propose plus de 8 000 références en pain, produits frais, épicerie, etc.

 

Se différencier avec l’agriculture biologique. Bien entendu, de nombreux produits sont régionaux, même si le Nord-Pas-de-Calais est la dernière région en agriculture biologique avec seulement 2% de surfaces dédiées. Saveurs et Saisons fait partie du réseau national Biocoop et fonctionne avec un conseil d’administration aux valeurs réellement humaines : ne cherchant pas à tirer un maximum de marges, c’est le producteur qui bénéficie de la valeur ajoutée. Parce qu’il a envie de faire évoluer une société «trop figée», Thierry Decoster essaie, depuis 2011, d’imposer ses produits en restauration collective, mais le chemin est long et les consciences, difficiles à faire évoluer. «Même si nous sommes aidés par les collectivités et la Région, les budgets alloués à la restauration collective sont regardés à la loupe. On voit tout de suite le prix sans ce que cela génère par ailleurs. Quand on mange du pain bio, on mange mieux et on gâche moins. Mais il faut des années pour faire passer ce message. Nous avons la capacité de produire mais il n’y a pas encore le répondant au niveau commercial», déplore Thierry Decoster.

 

D.R.

Saveurs et Saisons compte 7 500 références.

De la pédagogie. «Nous refusons des produits de contre saison ou qui viennent du bout du monde. On explique aux clients pourquoi certains produits ne sont pas disponibles. C’est une stratégie gagnante. Et d’ailleurs, quand nous avons fait notre dernière campagne de publicité avec des 4 par 3, nos clients ont trouvé que cela ne nous ressemblait pas !» s’étonne Thierry Decoster. Preuve que Saveurs et Saisons a su véhiculer autour de lui les valeurs fondamentales du respect des produits et de l’environnement. Depuis peu, le magasin travaille avec une plate-forme de mise en marché des produits régionaux, Norabio à Phalempin : les produits cultivés sont directement livrés en magasin, limitant ainsi les intermédiaires et les coûts inutiles. Gain de fraîcheur, traçabilité parfaite et logistique à la pointe ! Chaque jour, plus de 250 clients viennent pousser les portes du magasin de Villeneuve-d’Ascq, un chiffre doublé le week-end. Ce samedi 5 octobre, le magasin organise, de 10h à 18h, un village régional. Vous pourrez y rencontrer les producteurs et fournisseurs locaux autour de dégustations et d’animations. Le midi, un grand barbecue est organisé, suivi de la visite du magasin. L’idée de fond de ces nombreux projets, c’est surtout l’humain, une valeur essentielle aux yeux de l’ancien formateur à l’Institut de Genech. «Notre entreprise raisonne différemment sur de nombreuses choses. J’essaie d’aider les salariés à réfléchir par eux-mêmes. S’ils me font des propositions, tant mieux ! J’ai envie de bâtir mon entreprise avec les compétences de chacun», poursuit-il. C’est pourquoi il garde de l’espace dans la ferme pour accueillir des sociétés qui voudraient s’y installer. Et même s’il ne veut pas quitter son entreprise de sitôt, il réfléchit déjà à transmettre son savoir pour que l’entreprise «continue de vivre avec ses valeurs actuelles». Mais il caresse aussi un doux rêve… La création d’un centre de recherche et développement, site de réflexion autour de l’avenir du commerce.