Salon des Entrepreneurs de Paris : Artisan et chef d'entreprise, même combat ?
Passionnés, les artisans sont aussi obligés d’intégrer une dimension de gestion de leur entreprise. Avec du partage et de l’accompagnement en plus, l’aventure se passe bien. Témoignages, lors du récent Salon des Entrepreneurs, à Paris.
Leur point commun ? Privilégier la passion à la sécurité. Le 5 février à Paris, dans le cadre du Salon des Entrepreneurs, une séquence était consacrée à «Faire de sa passion son métier : témoignages d’artisans accomplis !» Devant un auditoire attentif, plusieurs de ces artisans-entrepreneurs se sont succédé devant l’auditoire. Par exemple, Christophe Bertrand est à la tête de À La Reine Astrid, une chocolaterie dotée d’un réseau de six boutiques en Île-de-France. C’est l’aboutissement d’une trajectoire variée, d’une carrière dans l’événementiel sportif, de la direction d’un poney-club à un poste au sein de la Maison du chocolat. Les pièges de l’activité ? «Ne vous trompez pas entre trésorerie et capacité de financement (…). Rentrez dans vos syndicat patronaux, et échangez avec vos confrères…», conseille Christophe Bertrand, qui a connu des difficultés financières pour s’être emmêlé les pinceaux. Il s’investit aussi pour aider un village producteur de cacao, au Cameroun, à se constituer en filière. «Je m’épanouis en donnant du sens à ce que je fais (…) Le chocolat, c’est sexy, c’est sympa, mais on ne gagne pas particulièrement bien sa vie. J’ai divisé mon salaire par cinq, mais c’est tellement gratifiant», conclut-il. Autre témoignage, mais même variété dans le parcours : à 25 ans, Dimitri Rucki vient d’ouvrir Les Ateliers Rucki. Dès l’enfance, «je suis tombé amoureux du cuir», raconte-t-il. Un proche familial travaille alors dans une sellerie automobile. Très jeune, Dimitri Rucki est médaillé de bronze, meilleur artisan de France. Ensuite, il n’hésite pas à partir de maisons aussi prestigieuses que Hermès, pour aller en Australie, puis, en Suisse… «J’avais plein de propositions, mais l’ambition que j’avais était personnelle», analyse le jeune homme. C’est sur le conseil de son épouse, qu’il décide de créer sa propre entreprise. Aujourd’hui, «je suis très heureux dans ma vie, même si mes comptes bancaires ne sont pas à la hauteur de mes ambitions», résume-t-il.
Retrouver des passions d’enfance
Troisième témoignage, celui de Christophe Vincent : 43 ans. Il y a dix ans, il a fondé Greenstep, entreprise spécialisée dans l’éco-construction en bois, et qui compte aujourd’hui une douzaine de salariés. Cette aventure puise dans «plusieurs ingrédients» accumulés au cours de la vie, qui ont fini par s’amalgamer, explique Christophe Vincent. Amoureux du sport, il a retenu «l’écocitoyenneté», typique des Pays-Bas, le pays de sa mère. À cette matrice, il a ajouté des études dans le secteur du bâtiment, qu’il juge à l’époque «rétrograde». Résultat : direction le Royaume-Uni, pour devenir barman, puis, consultant, et… être débauché par Orange. «Au bout de quelques années, j’ai eu l’impression de stagner, et les vieux démons sont revenus à la surface : bâtiment, écocitoyenneté et sport… J’ai voulu lancer une crèche en éco-construction», raconte Christophe Vincent. Le projet ne s’est pas concrétisé mais la réflexion, menée avec son actuelle associée a fini par générer Greenstep.
Éviter le piège des courriers frauduleux
Les retours d’expérience des autres artisans-entrepreneurs évoquent eux aussi un désir profond de sortir des carrières toutes tracées. Ainsi, Anne-Lise Simonnet, vient de fonder La Sicilienne, une marque de vêtements, après avoir travaillé 14 ans dans l’industrie pharmaceutique. «J’ai eu envie de faire autre chose, de créer, j’ai toujours adoré la mode. J’ai eu 40 ans, et bing ! J’ai quitté mon boulot», témoigne la jeune femme. Quant à Laure Montastier, à 30 ans, elle vient de créer, Icono Cadre, une société d’encadrement d’art à Saint-Ouen. Après des études de droit et l’histoire de l’art, et une expérience de juriste dans le secteur de l’audiovisuel, elle a décidé de se recentrer sur «quelque chose de manuel, en rapport avec l’art.»
Comme les autres entrepreneurs, ces deux femmes témoignent de l’importance du partage et de l’accompagnement. L’inconvénient d’être artisan ? «La solitude. Dans une entreprise, vous avez des collègues, des réunions. Là, c’est l’inverse. Il a fallu gérer la solitude», raconte Anne-Lise Simonnet, qui continue de s’appuyer sur ses amis et sa famille, ainsi que sur un coach. Laure Montastier, elle, a suivi une formation en deux ans en alternance, «très enrichissante.» Comme juriste de formation, elle se sent plutôt assez à l’aise avec l’administration. Toutefois, «il ne faut pas faire l’impasse sur les aides que la CMA [Chambre des métiers et de l’artisanat] ou un comptable peut apporter», conseille la jeune femme. On apprend, par exemple, à ne pas tomber dans le piège des courriers frauduleux qui visent les entrepreneurs qui s’installent, en se présentant sous un masque administratif…