Stratégie

Saint-Quentin : Moret Industries ambitionne de devenir leader de la transition écologique industrielle

Groupe familial français saint-quentinois né en 1968, Moret Industries est l'un des fleurons de l’agro-industrie. Sa stratégie de diversification et ses nombreuses filiales lui ont permis au fil des décennies de proposer à ses clients de nombreuses technologies variées et pointues. Son credo : fournir des solutions industrielles durables et innovantes, économes en énergie et réduisant les émissions de CO2. Objectif pour Olivier Dambricourt, à la tête de Moret Industries depuis janvier 2022 : devenir un leader de la transition écologique industrielle, grâce à cette logique d’économie circulaire.

Olivier Dambricourt  ambitionne de « recentrer le groupe sur une voie qui correspond fondamentalement à l'ADN industriel » de Moret Industries.
Olivier Dambricourt ambitionne de « recentrer le groupe sur une voie qui correspond fondamentalement à l'ADN industriel » de Moret Industries.

Picardie La Gazette : C’est la première fois de l’histoire de Moret Industries qu’une personne extérieure à la famille fondatrice prend les rênes du groupe, un changement de taille qui signe aussi le début d’une nouvelle ère pour le groupe ?

Olivier Dambricourt : C’était effectivement le moment de recentrer le groupe sur une voie qui correspond fondamentalement à son ADN industriel. J’ai au départ rejoint le groupe, en juin 2021, en qualité de manager de transition, le Conseil d’administration m’ayant chargé d’une mission de réflexion sur la stratégie et l’avenir de Moret Industries. Stratégie que nous allons aujourd’hui déployer.

Le groupe était historiquement sur deux grands marchés, celui des pompes, dont il était devenu l’un des leaders européens, et l’agroalimentaire, notamment le sucre. Depuis 2015, Moret Industries connaissait une période compliquée, à cause notamment du retournement du marché du sucre, le groupe a dû faire face à de lourdes échéances financières, alors même que son activité business décrochait. Depuis, nous essayons de retrouver une trajectoire financière soutenable, et avons retrouvé de la visibilité grâce à un récent accord avec nos partenaires bancaires. La restructuration que nous avons amorcée est lourde, et va prendre du temps.

La transition énergétique constitue la pierre angulaire de la restructuration du groupe, comment concrètement se traduit-elle ?

Il s’agissait effectivement de mener une réflexion sur la définition d’un business durable, ce que j’avais fait lors d’une de mes précédentes missions. Et cela passe notamment par une utilisation intelligente du dioxyde de carbone, pour qu’il ne constitue plus un déchet mais une opportunité pour l’industrie.

Nous nous sommes basés sur les compétences industrielles du groupe, pour établir quels types d’enjeux de la transition énergétique nous pouvions identifier pour aider nos clients à repenser leurs procédés de production, pour qu’ils soient plus frugaux en énergie, en consommation d’eau et en émissions de polluants.

Il faut bien avoir à l’esprit que l’industrie fonctionne depuis des décennies avec les mêmes procédés, conçus à une époque où personne ne se posait la question de l’énergie et des externalités négatives, en particulier les émissions de CO2.

Certaines de nos solutions, déjà dormantes dans le portefeuille de technologiques de Moret Industries, sont déjà effectives. Nous venons par exemple de signer avec Tereos un important contrat pour mettre en place un Champ électrique pulsé (CEP), une technologie propre et moins consommatrice d’énergie, permettant d’extraire le sucre par des champs électromagnétiques pulsés. C’est la première fois que nous allons l’utiliser à grande échelle dans une usine sucrière, le système sera opérationnel à l’été 2023 et permettra à Tereos d’économiser de 20 à 25% d’énergie par tonne de sucre.

Cette technologie pourrait également être utilisée en amont de l’industrie de méthanisation, pour améliorer le rendement méthanogène. Nous allons justement répondre à un appel d’offres de GRDF dans le domaine de l’amélioration du site méthanogène.

Le CEP a été mis au point par notre filiale basée à Charmes, Maguin, c’est de cette entité que nous voulons redéployer notre capacité d’innovation, avec l’aide de la Région, qui nous prête 1 million d’euros sur six ans pour financer notre effort en matière de R & D dans l’efficacité énergétique et la transition écologique.

Tambour laveur de betteraves, pour Cosum Beet aux Pays-Bas.

Avec cette stratégie basée sur l’économie circulaire, vous élargissez également le spectre de vos clients…

Effectivement, les industries ne font pas partie de notre clientèle historique. Avec ces solutions innovantes qui seront le marché fin 2024/ courant 2025, nous ciblons les incinérateurs, les industries verrières, cimentières, sidérurgiques, etc. Toutes celles qui ont des procédés générant beaucoup de fumées acides. Le groupe se positionne vraiment sur des technologies de rupture.

Nous travaillons sur deux grands axes pour récupérer les thermies perdues : la dépollution des fumées industrielles, en particulier celles dites à haute température, et la façon de récupérer les calories contenues dans ces fumées pour les transformer en énergie. Ce qui peut passer par le pompage thermique, nous explorerons dans un second temps les machines à Cycles organiques de Rankine (Organic Rankyne Cycle – ORC), qui produisent - selon le principe de la thermodynamie - de l’électricité à partir de turbines fonctionnant dans des gammes de températures particulières.

Le groupe accompagne également la création d’une filière bois, nous sommes avec notre filiale Promill (basée à Dreux, en Eure-et-Loire) l’un des leaders européens du séchage de bois, et nous fournissons les meilleures presses du monde. Moret Industries consolide actuellement Maguin et Promill en une seule organisation opérationnelle à Charmes, où 150 personnes devraient assez vite travailler, l’enjeu c’est de passer de 40 millions d’euros de chiffre d’affaires (Maguin et Promill) à plus de 60 millions d’ici cinq ans.

Comment ce nouveau virage est accueilli par vos collaborateurs ?

Les équipes ont besoin de rêver, de se projeter dans un futur motivant, où elles ont le sentiment qu’elles auront à jouer un rôle positif pertinent, qui a du sens, humainement et éthiquement parlant. Cette nouvelle orientation a également vocation à les remotiver efficacement, pour qu’elles continuent de s’investir et de se sentir utile.