Audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce de Douai-Cambrai
Retour à la normale sur le front des procédures collectives
Lors de l’audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce de Douai-Cambrai qui s’est tenue le 10 janvier, son président Jean-François Krummenacker est revenu sur l’activité soutenue de sa juridiction en 2023, un millésime notamment marqué par le retour du nombre d’ouvertures de procédures collectives à un niveau supérieur à celui de la période pré-Covid.
Sur le front des défaillances d’entreprises, la parenthèse Covid est bel et bien refermée. Alors que le nombre d’ouvertures de procédures collectives était tombé à des niveaux historiquement bas en 2020 et 2021, sous l’effet principalement des aides publiques mises en place pour tenter de contrebalancer les conséquences économiques de la pandémie, il s’est, depuis, envolé. L’an dernier, il a en effet bondi de 32,8% à l’échelle nationale, pour avoisiner 55 000, soit davantage qu’en 2018. Le Douaisis et le Cambrésis n’ont pas fait exception.
Des dettes sociales rédhibitoires
À l’occasion de l’audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce de Douai-Cambrai qui s’est tenue le 10 janvier, le procureur de la République de Douai, Frédéric Fourtoy, a pris la parole le premier pour pointer une «hausse de l’activité très significative en 2023, qui a fait suite au début de rattrapage observé en 2022». Un constat immédiatement confirmé par le président de l’institution, Jean-François Krummenacker. «Après avoir rattrapé en 2022 celui de 2019, le nombre des ouvertures de procédures collectives l’a très largement dépassé en 2023. Nous avons ouvert trois sauvegardes, 62 redressements judiciaires et 229 liquidations judiciaires». Le total d’ouvertures de procédures collectives s’est ainsi porté à 294, contre 239 un an plus tôt et 132 en 2021.
Malgré l’envolée, François Krummenacker y voit plutôt un «retour à la normale», entretenu par une combinaison de paramètres. Et d’évoquer le début de remboursement des Prêts garantis par l’Etat (PGE), qui a précipité les difficultés d’entreprises exsangues, l’inflation des prix, notamment énergétiques, ou encore le déficit de préparation et/ou de compétences de certains dirigeants. Avec également, en règle générale, un dénominateur commun : «Les dossiers sont pires qu’avant, la dette sociale étant rédhibitoire et impossible à moratorier», a-t-il relevé. Du transport au commerce, en passant par le bâtiment, peu de secteurs d’activité ont été épargnés. «Il s’agit le plus souvent d’entreprises de petite taille, avec quatre à cinq salariés en moyenne», a précisé le président de la juridiction.
Une soixantaine d’emplois préservés
Au rayon des bonnes nouvelles, Frédéric Fourtoy a cependant mis en exergue l’efficacité des actions de prévention et des procédures mises en œuvre (redressements judiciaires, plans de cession…) par le tribunal, qui «ont contribué à sauver une soixantaine d’emplois» en 2023, mais aussi la diminution continue du délai moyen constaté entre l’introduction d’une instance et sa plaidoirie. Celui-ci est passé durant l’année écoulée de 5,9 mois à 5,5 mois. Afin que cette dynamique puisse se poursuivre, François Krummenacker a notamment intimé les plaideurs à recourir davantage à la conciliation.
Sans vouloir se livrer à un exercice de prédiction, ce dernier a pour autant admis, à l’aune de la morosité ambiante, ne pas s’attendre à une embellie en 2024 sur le front des procédures collectives. «Il est frappant d’observer que certains chefs d’entreprise se résignent à baisser les bras. Récemment, nous aurions pu initier une dizaine de procédures de redressement judiciaire dans l’optique de sauver l’entreprise, mais leur dirigeant respectif ne l’a pas souhaité, n’en ressentant plus l’envie», s’est désolé François Krummenacker.
L’autre écueil persistant a trait aux tensions sur le marché de l’emploi, qui empêchent des artisans, des TPE et des PME de recruter et qui, par là-même, peuvent menacer la poursuite de l’activité commerciale. Autant de difficultés de recrutement auxquelles le tribunal de commerce de Douai-Cambrai n’est, du reste, pas exempt. «Après avoir passé l’intégralité de l’exercice 2023 avec un effectif incomplet, nous démarrons 2024 toujours en sous-effectif», a ainsi regretté François Krummenacker, qui s’est cependant réjoui de l’élection de quatre nouveaux juges.
Un tribunal endeuillé
Avant de détailler l’activité de la juridiction en 2023, Jean-François Krummenacker a tenu à rendre un double hommage. À Henri Descamps d’abord, décédé le 17 novembre dernier. Celui-ci avait fondé en 1989 le tribunal de commerce de Douai-Cambrai, qu’il avait présidé jusqu’en 1995. À Philippe Quignon ensuite, greffier associé de la juridiction, disparu cinq jours plus tard.